La sous-traitance constitue un assouplissement au principe général de
l’exécution personnelle des marchés publics. Elle autorise les opérateurs
économiques à confier à une ou plusieurs entreprises tierces l’exécution d’une
partie du contrat dont ils sont les titulaires et qu’ils ne peuvent ou ne
veulent exécuter eux-mêmes. Le recours à la sous-traitance permet aux
opérateurs économiques de s’appuyer sur des compétences et des moyens
extérieurs pour postuler à l’attribution de marchés publics. Elle favorise ainsi
notamment l’accès des petites et moyennes entreprises à la commande publique.
Le
régime juridique relatif à la sous-traitance pour les contrats de droit privé
et de droit public est défini par la loi
n° 75-1134 du 31 décembre 1975, d’ordre public, et, pour les règles
propres aux marchés publics passés par des acheteurs soumis au code de la commande publique, par les articles L. 2193-1 à
L.2193-14 ainsi que les articles R. 2193-1 à R. 2193-22 du code (marchés
publics classiques) et R. 2393-24 à R. 2393-40 du code (marchés publics de
défense ou de sécurité).
1.
Définition de la sous-traitance :
L’article 1er de la loi du 31 décembre 1975 définit
la sous-traitance comme « l’opération par
laquelle un entrepreneur confie par un sous-traité, et sous sa responsabilité,
à une autre personne appelée sous-traitant l’exécution de tout ou partie du
contrat d’entreprise ou d’une partie du marché public conclu avec le maître de
l’ouvrage ».
En matière de
marchés publics, la sous-traitance est l’opération par laquelle l’opérateur
titulaire d’un marché public qui présente les caractéristiques d’un contrat d’entreprise confie à un opérateur tiers, par un contrat distinct
et sous son entière responsabilité, l’exécution d’une partie des prestations
qui lui ont été confiées par l’acheteur.
La sous-traitance
n’est ainsi permise que lorsque le marché public principal est un contrat
d’entreprise.
Le contrat
d’entreprise est également dénommé louage d’ouvrage et d’industrie, et est un
contrat par lequel une personne, l’entrepreneur, s’engage envers une autre, le
maître d’ouvrage (ou donneur d’ordres), à exécuter moyennant une rémunération
un travail indépendant sans mandat et sans représentation du maître d’ouvrage.
L’article 1779 du code civil
décline le louage d’ouvrage en trois catégories :
« 1° Le louage de
service ;
2° Celui des
voituriers, tant par terre que par eau, qui se chargent du transport des
personnes ou des marchandises ; 3° Celui des
architectes, entrepreneurs d'ouvrages et techniciens par suite d'études, devis
ou marchés. »
Ainsi peuvent être sous-traités,
dans le domaine de la construction, les prestations des marchés publics de
travaux et de services relatifs aux prestations d’ingénierie et d’études :
architecte, maître d’œuvre, bureau
d’études …
Les marchés
publics de transport peuvent être aussi sous-traités, l’article L. 1432-13 du
code des transports, applicable à l’ensemble des contrats de transports de marchandises, prévoyant également que « les dispositions de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la
sous-traitance sont applicables aux opérations de transport ».
En revanche un
marché de fournitures ne saurait être sous-traité, sauf si des travaux de pose
ou d’installation ou des études de conception sont prévus en accompagnement de
la fourniture des matériels ou matériaux, et équipements …
La sous-traitance
est à distinguer du mandat (un contrat de maîtrise d’ouvrage délégué ne peut
donc en principe être sous-traité, car il s’agit d’un mandat de représentation
du maître d’ouvrage).
Elle est aussi à
différencier du contrat de travail, qui suppose un lien de subordination, mais
aussi du contrat de vente et du louage de chose (baux et location ou mise
disposition), qui ne peuvent faire l’objet de sous-traitance.
Le contrat de sous-traitance pour être autorisé doit également,
lui-même, être un contrat d’entreprise.
Ainsi en pratique, seuls les marchés publics de travaux, de services ou
de fournitures comportant des services ou des travaux de pose ou d’installation
peuvent être sous- traités (Guide de bonnes
pratiques en matière de marchés publics 26 sept, 2014, art, 21,1 ; Code de la
commande publique : article L, 2193-1),
Et le juge administratif applique strictement ce
principe :
Est ainsi considéré comme un fournisseur, et non comme un sous-traitant,
l’opérateur économique qui conclut avec le titulaire d’un marché public un
contrat qui ne contient pas d’obligations de faire mais comporte uniquement une
obligation de vendre. Tel est le cas
de l’entreprise qui fournit à un chantier du béton prêt à l’emploi (CE, 26 septembre 2007, Département du Gard, n°255993), des canalisations et des pièces de
canalisations et de pièces de raccord de fabrication courante (CAA Nantes, 30
décembre 1999, société Biwater, n°96NT02356), des pavés
ordinaires (CAA Lyon,
3 juillet 2003, Société d’exploitation de grès de Molière, n°97LY02986).
Ainsi, le contrat par lequel le
titulaire du marché commande à un fournisseur des pavés, dalles et bordures de
granit ne peut être regardé comme lui confiant l'exécution en sous-traitance
d'une partie du marché dès lors que les éléments sont importés de Chine et que
sa seule intervention consiste à les mettre aux bonnes dimensions ce qui ne
nécessite aucune spécificité technique particulière (CAA Bordeaux, 2e ch., 30 juill.
2019, n° 17BX02501). Idem pour le contrat confiant à une
société la fourniture d'ossatures et de
charpentes en bois aux mesures de longueur, épaisseur et largeur demandées (CAA Douai, 1re ch., 26 janv. 2021, n° 19DA00948).
Cette question est importante car
une entreprise dont le contrat conclu avec un entrepreneur principal revêt la
qualification de contrat de fournitures n’aura pas le droit au paiement direct
de ses prestations par le maître d’ouvrage et ce, quand bien même celui-ci l’aurait
été accepté en qualité de sous-traitant et aurait agréé ses conditions de paiement (CAA de Bordeaux, 8 mars 2018, n° 16BX02206, CE 26 septembre 2007, n°255993, CAA Bordeaux, 30 juillet 2019, n°17BX02501).
Est en revanche qualifié de contrat de sous-traitance, le contrat dans
lequel l’entreprise fournit, pose et déplace un échafaudage nécessitant un
travail spécifique réalisé pour les besoins particuliers du maître de l’ouvrage
(CAA Lyon, 11 mai 2006, Société Qualia, n°01LY00279).
C'est encore le cas lorsqu'il fabrique
sur mesure des éléments de ventilation pour répondre aux spécificités imposées
par le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) du marché (CAA Nantes, 4e ch., 7 oct.
2011, n° 10NT02052). Idem pour l'entreprise qui fournit au
titulaire du lot charpente d'un marché public un ensemble de poutres en bois
répondant à des spécifications techniques précises en termes de longueur,
d'épaisseur, de largeur et d'inclinaisons, fabriqué sur mesure ainsi que la
métallerie et la quincaillerie nécessaires à leurs assemblages (CAA Bordeaux, 3e ch., 8 mars
2018, n°
16BX02206).
CAA Versailles 5e 19 mai 2022, n°19VE01184 : Le fait d’intervenir sur le
chantier pour assister le poseur et assurer sur place les derniers réglages
contribue à établir la participation de l’entreprise à la réalisation des
travaux, et est donc un sous-traitant,
2, La sous-traitance est un droit du titulaire du
marché, qui peut être cependant limité par l’acheteur public :
L’article L. 2193-3 du code de la commande publique consacre, sous
réserve du respect des conditions fixées par la loi du 31 décembre 1975, le
droit, pour le titulaire d’un marché public, de sous-traiter l’exécution de
certaines des prestations faisant l’objet dudit marché.
L’acheteur ne peut donc imposer au titulaire d’un
marché public d’exécuter lui-même l’intégralité des prestations du contrat.
Cependant, le titulaire ne peut
sous-traiter l’intégralité des prestations faisant l’objet du marché public. L’article 1er de la loi du 31 décembre 1975 dispose en effet, tout
comme le code de la commande publique, que le titulaire est autorisé à
sous-traiter uniquement « l’exécution de certaines parties de son marché public », mais sans que ces textes ne précisent la
part minimale de prestations que le titulaire doit exécuter en propre. Un
architecte, sous peine de sanctions disciplinaires, ne peut sous-traiter le
projet architectural défini à l’article 3 de la loi n°77-2 du 03 janvier 1977 sur l’architecture (Code
déontologie de l’architecte, article 37),
L’article 6 de
la loi MURCEF du 11 décembre 2001 (n°2001-116)
interdit la sous-traitance totale dans les marchés publics,
A cet égard, l’acheteur peut demander aux candidats, sur le fondement de
l’article R. 2151-13 du code de la commande publique, via l’avis d’appel à la
concurrence ou dans un autre document de la consultation, d’indiquer dans leur
offre la part du marché public qu’ils ont l’intention de sous-traiter à des tiers.
Cependant, l’acheteur peut
néanmoins contraindre le titulaire à exécuter lui-même certaines « tâches essentielles » du marché public, comme le
prévoient les articles L. 2193-3 du code de la commande publique (marchés
publics classiques) et L. 2393-7 du même code (marchés publics de défense ou de
sécurité) qui autorisent l’acheteur à restreindre le recours à la
sous-traitance des marchés publics en exigeant que certaines tâches essentielles soient effectuées
directement par le titulaire. Ainsi, sur
le fondement de ces dispositions, l’acheteur peut légitimement invoquer le
caractère essentiel de certaines prestations pour refuser au titulaire le
recours à un sous-traitant.
Dans le cadre des marchés de
défense ou de sécurité, l’acheteur peut imposer au titulaire le recours à la
sous-traitance, ainsi que les modalités de recours, à la sous- traitance. L’article
L. 2393-3 du code de la commande publique autorise l’acheteur public à imposer
au titulaire d’un tel marché le recours à la sous-traitance et la mise en place
d’une procédure de mise en concurrence du choix des sous-traitants, parmi
notamment certains sous-traitants librement choisis pour y participer par
l’acheteur. Si, l’acheteur souhaite recourir à ces dispositions, il devra
l’indiquer dans l’avis d’appel public à la concurrence, tout en précisant le
pourcentage minimum et maximum que le titulaire sera tenu de sous-traiter,
sachant que le pourcentage maximum est plafonné à 30% du montant du marché
(article R. 2393-8 du code de la commande publique).
3, Le recours à la sous-traitance s’opère sous
certaines conditions et sous le contrôle de l’acheteur public :
Le
recours à la sous-traitance est subordonné à la mise en œuvre de diverses
formalités prévues par la loi du 31 décembre 1975 et par les articles R. 2193-1 à R. 2193-22 du code de la
commande publique (marchés publics classiques) et R. 2393-1 à R. 2393-40 du
code de la commande publique (marchés publics de défense ou de
sécurité). L’acheteur, le titulaire du
marché public ainsi que le sous-traitant sont concernés par le respect de ces
formalités.
Aux
termes de l’article 3 de la loi du 31 décembre 1975 et de l’article L. 2193-10
du code (marchés publics classiques) le
titulaire n’est autorisé à sous-traiter l’exécution de certaines prestations du
marché public qu’à la double condition cumulative d’avoir obtenu de
l’acheteur l’acceptation des sous-traitants et l’agrément de leur condition de
paiement.
En effet, la
seule acceptation du sous-traitant ne suffit pas (CE,
13 juin 1986, n°56350 ; CAA Lyon, 22 mai 2003, n°98LY00249),
S’agissant des marchés publics de défense ou de sécurité, l’article R.
2393-24 du code de la commande publique impose à l’acheteur d’indiquer, dans
l’avis de marché, que chaque sous-traitant doit être soumis à son acceptation
et de préciser les conditions de rejet des sous-traitants. En revanche,
l’agrément, par l’acheteur, des conditions de paiement du sous-traitant n’est
pas une condition de recours à la sous-traitance par le titulaire du marché
public. L’absence d’agrément des conditions de paiement du sous- traitant par
l’acheteur aura par contre pour conséquence de priver le sous-traitant du droit
au paiement direct, conformément à l’article L. 2393-13 du code de la commande
publique.
L’obligation d’acceptation et d’agrément des
conditions de paiement s’applique à l’ensemble des sous-traitants, quel que
soit leur rang.
A cet égard, le CCAG-TRAVAUX 2021 distingue la sous-traitance directe
(article 3.6.1) de la sous-traitance indirecte (en chaîne ; article 3.6.2).
-
Le contenu de la déclaration
préalable :
Aux termes de l’article L. 2193-5 du code de la commande publique,
l’opérateur économique qui soumissionne à un marché public indique à l’acheteur
les sous-traitants auquel il envisage de faire appel ainsi que la nature et le
montant des prestations qu’il entend sous-traiter. Cette déclaration préalable
avant l’attribution du marché public n’empêche pas le titulaire du marché public
de faire appel à de nouveaux sous-traitants en cours d’exécution du marché
public, à condition que leur intervention respecte les formalités de
déclaration préalables. Les articles R. 2193-1 et R. 2193-3 du code de la
commande publique (marchés publics classiques) ainsi que R. 2393-25 et R.
2393-27 du même code (marchés publics de défense ou de sécurité) listent les
éléments qui doivent obligatoirement figurer dans la déclaration de
sous-traitance.
La demande d’acceptation et
d’agrément envers la personne publique doit émaner (pour être valable) du
titulaire du marché (et ce même pour la sous-traitance indirecte).
Un formulaire DC4 de
déclaration de sous-traitance et différents modèles sont proposés par la DAJ
sur leur site.
· Lorsque la demande de sous-traitance est effectuée concomitamment au
dépôt de l’offre par le candidat au marché public, celle-ci doit contenir :
-
la nature des prestations sous-traitées ;
-
le nom, la raison ou la dénomination sociale et l’adresse du
sous-traitant ;
-
s’agissant des marchés publics de défense ou de sécurité, le lieu
d’exécution des prestations sous-traitées ;
-
le montant maximum des sommes à verser au sous-traitant ;
-
les conditions de paiement prévues par le projet de contrat de
sous-traitance et, le cas échéant, les modalités de variation des prix ;
-
les capacités du sous-traitant sur lesquelles l’opérateur économique
s’appuie ;
-
une déclaration attestant que le sous-traitant n’est
pas placé dans un des cas d’exclusion de la procédure de passation mentionné au
chapitre Ier du titre IV du code de la commande publique.
· Lorsque
la demande de sous-traitance est effectuée après la notification du marché
public, celle-ci doit contenir :
- l’ensemble des éléments susmentionnés,
-
ainsi que l’exemplaire unique ou le certificat de
cessibilité ou une attestation ou une main levée du bénéficiaire de la cession
ou du nantissement de créance afin d’établir qu’aucune cession ni aucun
nantissement de créance résultant du marché public ne font obstacle au paiement
direct du sous-traitant.
A cet égard :
Ø Le soumissionnaire ou le titulaire doit préciser la
nature des prestations sous-traitées et le montant maximum des sommes de son
marché qui seront sous- traités (et qui engageront le paiement
direct du maître d’ouvrage). S’agissant de travaux de construction, un
dispositif d’auto-liquidation de TVA est
prévu par l’article 283-2 nonies du code général des impôts, de sorte que seul
le montant HT sous-traité est pris en compte.
Par ailleurs, s’agissant du
montant de la sous-traitance, les dispositions de l’article R. 2193-9 du code
(marchés publics classiques) imposent à l’acheteur d’opérer un
contrôle sur celui-ci afin de s’assurer, au regard des prestations
sous-traitées annoncées, que celui-ci n’est pas anormalement bas.
Si le caractère
anormalement bas de la sous-traitance est détecté au moment du dépôt de
l’offre, l’acheteur doit rejeter l’intégralité de l’offre du soumissionnaire
qui a présenté le sous-traitant. En revanche, si ce caractère anormalement bas
est détecté après le dépôt de l’offre, l’acheteur refusera uniquement d’agréer
le sous-traitant.
Ø S’agissant des capacités du sous-traitant sur
lesquelles le soumissionnaire ou le titulaire entend s’appuyer, c’est la même liste
de renseignements et de documents pouvant être demandés aux candidats aux
marchés publics pour vérifier que ceux-ci remplissent les conditions de
participation exigées.
Ø S’agissant de la justification que le sous-traitant ne
se trouve pas dans un cas d’exclusion de la procédure de passation mentionné à
l’article L. 2141-1 du code et aux 1° et 3° de l’article L. 2141-4 du code (marchés publics
classiques) ou à l’article L. 2341-1 du code (marchés de défense ou de
sécurité) la loi relative à la transparence,
à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique,
dite « Sapin II », a autorisé à ce
que cette justification ne procède que d’une simple déclaration sur l’honneur
du sous-traitant.
Ø L’acheteur doit vérifier qu’aucune cession ni aucun nantissement
de créance résultant du marché public ne font obstacle au paiement direct du
sous- traitant et exiger ainsi la production de l’exemplaire unique
ou du certificat de cessibilité ou une attestation ou une main levée du
bénéficiaire de la cession ou du nantissement de créances.
L’acheteur ne doit ainsi pas
accepter le sous-traitant si l’un de ces documents ne lui est pas remis. En
effet, la circonstance que l’entreprise titulaire ait omis de communiquer à
l’acheteur l’exemplaire unique du marché ou l’attestation de la cession de
créance n’est pas de nature à exonérer
l’acheteur de son obligation à l’égard de la banque (CE, 6 décembre 1999, Ville
de Marseille, n° 189407), et il sera
tenu de payer deux fois, à la banque la créance cédée ainsi que les prestations
correspondantes effectuées par le sous-traitant.
Ø Par
ailleurs, en application de l’article 28.2 du RGPD, l’acheteur doit donner son
autorisation écrite préalable spécifique lorsque le titulaire du marché public
souhaite sous-traiter des prestations impliquant la sous-traitance de
traitement de données à caractère personnel.
- La décision d’acceptation et d’agrément des conditions
de paiement du sous-traitant par l’acheteur peut être expresse ou implicite :
Dans l’hypothèse d’une déclaration de sous-traitance lors du dépôt de
l’offre, la notification du marché au titulaire emporte implicitement
acceptation du sous-traitant et agrément de ses conditions de paiement. Il
n’est donc pas formellement nécessaire que l’acheteur signe la déclaration de
sous-traitance. Pour autant, il est néanmoins toujours préférable que ce
document soit signé par l’acheteur pour la bonne information du sous-traitant et
du comptable.
Dans l’hypothèse d’une déclaration de sous-traitance effectuée après la
notification du marché public, l’acte spécial de sous-traitance doit être
expressément signé par l’acheteur et le titulaire du marché public.
L’acceptation et l’agrément du sous-traitant délivré par l’acheteur par la
signature de l’acte spécial de sous-traitance ne fait pas naître de relation
contractuelle entre eux : (CE, 27 janvier 1989,
Société SOPREMA, n° 80975), et le
sous-traitant n’a pas l’obligation de signer l’acte spécial, même si cela est
conseillé pour apporter la preuve de son consentement sur la nature des
prestations sous-traitées et des conditions du paiement direct. Une fois signé,
l’acte spécial de sous-traitance est notifié par l’acheteur au titulaire du
marché public.
Lorsque le sous-traitant est présenté en cours d’exécution du marché
public, le silence de l’acheteur gardé pendant 21 jours à compter de la
réception de la déclaration de sous-traitance comportant, de manière
exhaustive, l’ensemble des éléments exigés, vaut acceptation tacite et agrément
des conditions de paiement du sous-traitant présenté en cours d’exécution du
marché public.
Cependant, en cas de déclaration de sous-traitance incomplète transmise
par le titulaire à l’acheteur, le délai de 21 ne court pas (CAA Bordeaux, 9 février 1993, Sté revêtement Technique
Sud-Ouest, n°91BX00249).
Aucune disposition n’oblige l’acheteur à informer le titulaire du marché
que son dossier est incomplet, mais il y a tout lieu de le faire pour éviter
que ce dernier ne pense que son sous-traitant a été tacitement accepté.
Ø La décision
d’acceptation du sous-traitant et l’agrément de ses conditions de paiement ne
vaut, en principe, que pour la durée initiale du marché public. Dans le
cas d’un marché reconductible, et en l’absence de clause expresse du formulaire
de déclaration indiquant que, en cas de reconduction du marché la déclaration
de sous-traitance est également reconduite dans les mêmes conditions, le
titulaire doit rédiger un nouvel acte spécial de sous-traitance indiquant les
prestations confiées au titulaire au titre de l’exécution du marché reconduit.
Il peut être dérogé à cette règle, en prévoyant, avec l’accord du titulaire,
dans la déclaration préalable ou l’acte spécial qu’ils seront reconduits dans
les mêmes conditions.
Ø L’acheteur doit justifier du refus ou du retrait d’acceptation et
d’agrément du sous-traitant, sous peine d’engager sa
responsabilité quasi-délictuelle pour faute envers celui-ci (CE, 21 mai 2008, Société Bernard Travaux Polynésie, n°205449).
Ce refus ou retrait ne peut être justifié que si les conditions
légalement prévues (et ci-avant rappelées) ne sont pas remplies, et ce refus ou
retrait doit être motivé, eu égard notamment aux dispositions des articles L. 211-1 à L. 211-8 du code des relations entre le public et l’administration.
Ainsi par exemple, les motifs permettant de justifier le rejet du
sous-traitant sont notamment : montant de la sous-traitance anormalement bas,
capacités insuffisantes du sous-traitant qui sont susceptibles de nuire à la
bonne exécution du marché public (CE, 29 mai 1981,
Roussey, n°12315, mentionné au Lebon), sous-traitant qui
tombe sous le coup d’une interdiction de soumissionner, existence d’un
nantissement ou d’une cession de créance qui ferait obstacle au paiement direct
du sous- traitant (CE, 2 juin 1989, Société
Phinelec, n°67152, mentionné au Lebon), En revanche,
l’acheteur public ne peut pas retire l’acceptation ou l’agrément au motif que
le sous-traitant aurait manqué à ses obligations contractuelles (CAA Lyon, 4e 14
janvier 2019 n°16LY04384),
Ø L’acte spécial de sous-traitance peut être modifié en cours
d’exécution du marché public par un acte spécial modificatif pour tenir
compte des modifications apportées au marché public, ou pour augmenter ou
diminuer la part qui a été sous-traitée, si les relations contractuelles du
titulaire et du sous-traitant sont également modifiées sur ce point.
En revanche, l’acte spécial de
sous-traitance ne peut être modifié en cours d’exécution pour tenir compte de
la manière dont les prestations sous-traitées ont effectivement été exécutées. L’acheteur et le titulaire ne peuvent pas
en particulier modifier l’acte spécial de sous-traitance pour tenir compte de
la défaillance du sous-traitant
à exécuter les prestations prévues
au contrat (CE,
27 janvier 2017,
Société Baudin Châteauneuf
Dervaux, n°397311 ; CAA Bordeaux,
1re ch., 29 novembre 2018, n° 16BX02297).
Un changement de sous-traitant est également possible en cours
d’exécution du marché public, mais l’acheteur devra s’assurer auprès du
titulaire de l’acte qui met fin au contrat de sous-traitance initial ainsi
qu’un état des paiements effectués au sous-traitant et de l’avancement des
travaux ou prestations confiés au sous-traitant jusqu’au terme du contrat.
L’acheteur devra également s’assurer que le
changement de sous-traitance n’a pas pour effet de bouleverser l’équilibre du
marché public. En effet, la jurisprudence européenne considère qu’un « changement de sous-traitant, même lorsque la
possibilité en est prévue dans le contrat, peut, dans des cas exceptionnels, constituer une telle modification de
l’un des éléments essentielles du contrat (…) lorsque le recours à un
sous-traitant plutôt qu’à un autre a été, compte tenu des caractéristiques propres à la prestation en cause, un élément déterminant de la conclusion du
contrat, notamment en raison du fait que la modification d’un contrat en
cours de validité peut être considérée comme substantielle lorsqu’elle
introduit des conditions qui, si elles avaient figuré dans la procédure
d’attribution initiale, auraient permis l’admission de soumissionnaires autres que ceux initialement admis ou auraient
permis de retenir une offre autre que celle initialement retenue »
4, Le droit à paiement direct du sous-traitant
par le maître d’ouvrage :
Le
paiement direct du sous-traitant est un
droit d’ordre public que les parties, mêmes d’un commun accord, ne peuvent
remettre en cause (CE, avis du 18 juin 1991, n°349740). Ainsi,
une clause insérée dans le contrat de sous-traitance ayant pour effet de faire
échec au paiement direct est réputée non écrite (article 15 de la loi du 31
décembre 1975 et article L. 2193-11 du code de la commande publique). Le droit au paiement direct du sous-traitant
est subordonné à la condition que le montant de la sous-traitance soit égal ou
supérieur à 600 euros TTC.
Seul le sous-traitant de premier
rang accepté par l’acheteur et dont les conditions de paiement ont été agréées
par celui-ci, peut bénéficier du droit au paiement direct des prestations qu’il
a exécutées (articles L. 2193-11 et L. 2393-13 du code de la commande
publique). Ainsi, un sous-traitant ne peut prétendre au paiement direct des
prestations exécutées antérieurement à la décision d’acceptation et d’agrément
de l’acheteur (CAA Nancy, 20 février 2018, Société
HSOLS, n°16NC01473
; CE, 3 avril 1991, n°90552).
Les sous-traitants de second rang
ne bénéficient pas du droit au paiement direct. Cependant afin de protéger
les sous-traitants faisant l’objet d’une sous-traitance en chaine, l’article L.
2193-14 du code de la commande publique dispose que le sous-traitant direct
doit délivrer au sous-traitant de second rang une caution ou une délégation de
paiement dans les conditions définies à l’article 14 de la loi du 31 décembre
1975.
Cette délégation de paiement est une forme contractuelle de paiement
direct qui permet à l’acheteur, sur instruction du sous-traitant de premier
rang, de régler directement le sous-traitant de second rang en déduction des
sommes dues à ce dernier.
En l’absence de délégation de paiement, le sous-traitant direct est tenu
de fournir une caution personnelle et solidaire et ce, préalablement à toute
acceptation de sous- traitance indirecte.
L’acheteur est tenu de veiller à ce que le
sous-traitant de premier rang, entrepreneur principal à l’égard du
sous-traitant indirect, ait effectivement respecté ses obligations en matière de garantie de paiement. Ainsi, dès lors que l’acheteur a
connaissance d’un sous-traitant de second rang, il doit mettre en demeure le
sous-traitant direct afin que celui-ci délivre au sous-traitant de second rang
une délégation de paiement ou une caution. Si l’acheteur omet de mettre en
demeure le sous-traitant de premier rang, tel que cela est prévu par l’article
14-1 de la loi du 31 décembre 1975, il commet une faute de nature à engager sa
responsabilité quasi-délictuelle envers le sous-traitant (CAA de Versailles, 1er juin
2011, Société JCI, n°09VE01379).
D’une manière générale, l’article
14-1 de la loi du 31 décembre 1975 fait obligation au maître d’ouvrage
qui « a connaissance de la présence sur
le chantier d’un sous-traitant » de mettre en demeure l’entrepreneur de
faire accepter le sous-traitant et d’agréer les conditions de paiement, et ce, afin d’éviter toute sous-traitance occulte.
Le
Conseil d’Etat retient que le maître
d’ouvrage qui s’abstient de « provoquer
la régularisation » d’un sous-traitant non déclaré, en mettant en demeure
l’entrepreneur principal, commet une faute de nature à engager sa
responsabilité quasi-délictuelle à l’égard du sous-traitant occulte (CE, 28 mai 2001, n°205449 ; CE, 7 novembre 1980, n°12060).
CAA Lyon, 2 septembre 2019, n°17LY02724 : : « le maître d’ouvrage qui ayant eu connaissance d’une sous-traitance
irrégulière, s’abstient de toute mesure propre à y mettre fin, commet une faute
de nature à engager sa responsabilité »,
Pour le juge administratif, la faute du maître d’ouvrage est uniquement
constituée par sa carence à mettre en demeure l’entrepreneur principal, en
dépit de la connaissance qu’il avait de
la présence d’un sous-traitant sur le chantier.
Le juge administratif subordonne
cependant l’indemnisation du sous-traitant à la démonstration d’un lien de
causalité directe et le préjudice allégué par le sous-traitant occulte.
Au regard des jurisprudences existantes, ce lien de causalité est
rapporté et se limite strictement au cas
d’espèce où l’entrepreneur principal a perçu des sommes du maître d’ouvrage
qu’il aurait dû reverser au sous-traitant pour son exécution personnelle, et
est devenu insolvable ou impécunieux à pouvoir le faire.
Le sous-traitant occulte ne sera pas tenu pour responsable de son absence
de déclaration ou d’acceptation. Cependant il lui appartient d’apporter la
preuve que le maître d’ouvrage avait « connaissance
de sa présence sur le chantier » en qualité de sous-traitant.
Dans un arrêt du 20 octobre 2020 (req. n°18LY04737), la CAA de Lyon a rejeté la mise en
cause du maître d’ouvrage en l’absence de toute preuve apportée par le
sous-traitant, de ce que le premier avait connaissance de la présence du second
sur le chantier.
Généralement, le juge se fonde sur un faisceau d’indices, plutôt que sur
un seul élément. Dans deux arrêts (7 décembre 2010,
req. n°09BX01024 et 17 décembre 2018, req. n°16BX01315), la CAA de Bordeaux a considéré cette
preuve apportée, en se basant sur un faisceau d’indices liés à la mention de
l’intervention du sous-traitant : dans un avenant passé entre l’entrepreneur et
le maître d’ouvrage, sur une facture adressée par l’entrepreneur et dans le
projet de décompte général.
La preuve de cette connaissance
peut également résulter de la mention du sous-traitant dans les comptes-rendus
de chantier (CAA Versailles, 12 avril 2005, req. n°02VE01958).
Le maître
d’ouvrage qui s’est abstenu de mettre en demeure l’entrepreneur principal de
régulariser la situation d’un sous-traitant non déclaré, peut s’en exonérer
partiellement, en invoquant la faute commise par l’entrepreneur principal, qui
n’a pas soumis le sous-traitant à l’acceptation du maître d’ouvrage (CE, 7 novembre 1980, req. n°12060).
Par ailleurs, le CCAG-Travaux, en son article
32.1 prévoit que constitue un motif de résiliation pour faute, la circonstance que le titulaire ait « sous-traité en contrevenant aux
dispositions législatives et
réglementaires relatives à la sous-traitance, ou s’il ne respecte pas les
obligations relatives aux sous-traitants mentionnées à l’article 3.6 ». Egalement ces
Ø La
procédure de paiement direct :
C’est
le sous-traitant qui adresse sa demande de paiement direct au titulaire, ce qui conditionne son droit à paiement
direct (CE, 19 avril 2017, Société Angles et
fils, n°396174
; CE 28 déc. 1988, Sté Prometal, req. no 69850 , Lebon 476 – CAA Nantes, 20 déc. 2003, Sté Parlalu,
req. no 00NT00682.).
A
compter de l’accomplissement de cette formalité, le titulaire dispose d’un délai de 15 jours pour
accepter ou refuser la demande de paiement direct. Pour ce faire, il
examine la demande et vérifie si elle correspond aux prestations qui ont
effectivement été exécutées par le sous-traitant.
En cas d’acceptation expresse, il joint au projet de décompte adressé à
l’acheteur ou son représentant une attestation et indique le montant des sommes
à prélever au profit du sous-traitant. Dans l’hypothèse où le titulaire oppose
un refus de paiement direct au sous-traitant, il doit motiver sa décision
auprès du sous-traitant et de l’acheteur. L’acheteur n’a pas à apprécier la
légalité du motif invoqué par le titulaire à l’appui de son refus. A l’issue du
délai de 15 jours, le titulaire qui ne s’est pas manifesté est réputé avoir
accepté la demande de paiement direct adressée par le sous-traitant, comme le
prévoit l’article 8 de la loi du 31 décembre 1975 .
En parallèle de la demande adressée
au titulaire, le sous-traitant doit impérativement adresser sa demande à
l’acheteur, qu’il accompagne des copies des factures adressées au
titulaire et de l’accusé de réception ou du récépissé attestant que le
titulaire a bien reçu la demande. A la réception de cette demande, l’acheteur
adresse alors à son tour, et sans délai, au titulaire du marché une copie des
factures produites par le sous-traitant.
Cette demande parallèle est
importante à respecter pour le sous-traitant, car dans l’hypothèse où le
titulaire du marché public n’a ni opposé un refus motivé à la demande de
paiement du sous-traitant dans le délai de 15 jours imparti suivant sa
réception, ni transmis celle-ci à l’acheteur, le sous-traitant qui n’a pas transmis en parallèle sa demande de
paiement à l’acheteur ne pourra prétendre au paiement direct et aucun intérêt
moratoire ne pourra être réclamé (CAA
Versailles, 1er juin 2011, Société JCI, n°09VE01379). Pour obtenir le paiement direct par
l'acheteur public de toute ou partie des prestations qu'il a exécutées, le
sous-traitant régulier doit adresser sa demande avant la notification du décompte général du marché à
l'entrepreneur (CE, 2 déc. 2019, n° 425204 CAA Marseille, 6e ch., 15 juin 2020, n° 18MA02292).
Pour autant, l’acceptation du
paiement direct par le titulaire du marché public ne lie pas de manière
irrévocable l’acheteur qui conserve un droit de contrôle sur la demande de
paiement direct du sous-traitant.
Ainsi, le Conseil d’Etat considère que le droit au paiement direct ne
fait pas obstacle au contrôle, par l’acheteur, de l’exécution effective des
travaux sous-traités et du montant de la
créance du sous-traitant (CE, 28 avril 2000,
Société Peinture Normandie, n° 181604 ; CE, 27 janvier
2017, Société Baudin Châteauneuf Dervaux, n° 397311).
Au titre de ce contrôle de l’exécution effective des prestations,
l’acheteur peut s’assurer que la consistance des travaux réalisés par le
sous-traitant correspond effectivement à ce qui était prévu par les
stipulations du marché public (CE, 9 juin 2017, Société
Keller Fondations Spéciales contre Commune de Montereau-Fault-Yonne, n° 396358).
Si tel n’est pas le cas, il peut refuser au sous-traitant le droit au
paiement direct. L’acheteur peut également refuser le paiement direct des
prestations, non conformes aux spécifications du marché public, qui n’étaient
pas indispensables à l’exécution des travaux et qui n’ont fait l’objet ni d’un
avenant ni d’un ordre de service (CAA Bordeaux, 9
décembre 2010, Société Dirickx Espace Protect SAS, n° 10BX00725).
L’acheteur peut également refuser le paiement direct des travaux qui ne
font pas partie de ceux pour lesquels la sous-traitance a été acceptée et les
conditions de paiement ont été agréées (CE, 17
décembre 2003, Sté Laser, n° 250494).
En revanche, l’acheteur ne saurait,
dans le cadre de son droit de contrôle, vérifier la qualité des prestations
réalisées (règles de l’art) ou bien encore faire application des stipulations
contractuelles relatives aux pénalités de retard relevant du marché public
conclu avec le titulaire ni des stipulations contractuelles relatives aux
pénalités de retard relevant du sous-traité, ni au titre de réserves formulées
lors de la réception, pour s’opposer au paiement direct (CAA Lyon, 4e ch., 15 mai
2014, n° 12LY22756).
Ø L’étendue du droit au paiement direct dont
bénéficie le sous-traitant :
Le sous-traitant régulièrement accepté et dont les conditions de paiement
ont été agréées par l’acheteur a le droit au bénéfice du paiement direct à
hauteur des prestations du marché public qu’il est chargé d’exécuter et qui ont
effectivement été constatées (CAA Bordeaux, 6
juillet 2004, Sté Rosique Construction métallique, n° 00BX010112).
Il découle de ce principe que l’acheteur ne peut, en principe, faire
bénéficier le sous-traitant d’une rémunération plus importante que celle prévue
dans l’acte spécial de sous- traitance (CAA Lyon, 6 juin 2013, EHPAD d’Effiat, n°12LY01935). Le sous-traitant ne peut concernant ses
modalités de paiement se prévaloir auprès du maître de l’ouvrage du contrat qui
le lie à l’entrepreneur principal auquel le maître d’ouvrage n’est pas partie (CE 17 décembre 1999, n°177806
; CAA Paris 6e 14 mai 2019 n°18PA00240),
Cependant, le sous-traitant
accepté et agréé qui bénéficie du paiement direct a également le droit au
paiement direct des travaux supplémentaires, qui ont été convenus avec le maître d’ouvrage et le
titulaire du marché. Ces prestations supplémentaires doivent faire l’objet d’un
avenant au contrat de sous-traitance et donner lieu à la modification de l’acte
spécial de sous-traitance. A défaut d’avoir soumis le sous-traitant à une
nouvelle acceptation par l’acheteur et à l’agrément de ses conditions de paiement pour ces prestations
supplémentaires, le sous-traitant ne pourra prétendre de l’acheteur un droit au
paiement direct de celles-ci (CE, 28 mai 2001, SA
Bernard Travaux Polynésie, 205449).
Sans accord exprès, le
sous-traitant accepté et agréé peut toutefois bénéficier du paiement direct du
maître d’ouvrage pour des travaux indispensables à la réalisation de l’ouvrage
ainsi que des dépenses résultant pour lui de sujétions techniques imprévues qui
ont bouleversé l’économie générale du marché, et ce sur les mêmes fondements et
conditions que pour le titulaire du marché public (CE, 1er juillet 2015, Régie
des eaux du canal de Belletrud, n° 383613 ; CE, 13 février 1987, Société Ponticelli Frères, n° 67314 ; CE, 24 juin
2002, Département de la Seine-Maritime, n° 240271 ; CE, 3 mars 2010, Société PRESSPALI, n° 304604 ; CE, 24 juin 2002, Département de la Seine-Maritime, n° 240271).
Aujourd’hui ces conditions d’indemnisation du titulaire d’un marché de
travaux pour ces travaux ou dépenses supplémentaires non acceptés sont fixées
par l’arrêt du Conseil
d’Etat du 05 juin 2013 « Région Haute-Normandie » (n°352917) l’indemnisation de tels coûts supplémentaires
est subordonnée à la preuve par le requérant de l’existence de difficultés
d’exécution subis qui soit trouvent leur origine dans des sujétions imprévues
ayant eu pour effet de bouleverser l’économie du contrat, soit que ces difficultés
d’exécution sont imputables à une faute personnelle de la personne publique,
maître d’ouvrage. Il s’agit d’une jurisprudence établie, qui est maintenant
constante, et voir par exemple s’agissant de la Cour administrative d’appel de DOUAI dans
un arrêt du 02 avril 2020 (n°18DA00736).
S’agissant du cas particulier du
sous-traitant, le Conseil d’Etat considère que le bouleversement de
l’économie générale du marché public s’apprécie en confrontant « le montant des dépenses résultant de ces
sujétions au montant total du marché et
non au montant de la partie sous-traitée » (CE,
1er juillet 2015, Régie des eaux du canal
de Belletrud, n° 383613).
Le refus du titulaire de bénéficier de l’avance
n’empêche pas le sous-traitant d’en obtenir le versement. Les conditions de
versement et de remboursement de
l’avance sont identiques à celles prévues pour l’avance versée au
titulaire du marché public.
Le
sous-traitant éligible au paiement direct bénéficie de ce droit, dès la
notification du marché public ou à la notification de l’acte spécial de
sous-traitance.
Les montants qui conditionnent le versement de l’avance et qui sont
prévus aux articles R. 2191-3 du code de la commande publique (marchés publics
classiques) et R.2391-1 du code de la commande publique (marchés publics de
défense ou de sécurité), s’apprécient par rapport au montant global du marché
public et non par rapport au montant des prestations sous-traitées.
Ainsi, pour les marchés publics «
classiques », l’avance est de droit si le montant total du marché public,
et non le seul montant des prestations sous-traitées, est supérieur à 50 000
euros HT et si le délai d’exécution du marché public est supérieur à 2 mois. Pour les marchés publics de défense ou de
sécurité, l’avance est de droit si le montant total du marché public est
supérieur à 250 000 euros HT et si le délai d’exécution est supérieur à 3 mois.
► Lorsque
le sous-traitant bénéficie du paiement direct et que l’acheteur est un pouvoir adjudicateur, y compris s’il agit en
qualité d’entité adjudicatrice, son paiement doit être effectué dans le respect
des délais des dispositions des articles L. 3133-10 et suivants du code de la
commande publique et des dispositions des articles R. 3133-10 et suivants du
code de la commande publique.
En vertu de l’article 6 du décret n°
2013-269 du 29 mars 2013, le délai de paiement qui engage le pouvoir
adjudicateur à l’égard du titulaire dans le cadre d’un marché public engage
également celui-ci à l’égard des sous-traitants du titulaire.
Le délai de
paiement du sous-traitant court à compter de la plus tardive des formalités
suivantes :
-
la réception par le pouvoir adjudicateur de l’accord
exprès du titulaire concernant la demande de paiement du sous-traitant ou de
son accord tacite, si dans le délai de 15 jours qui lui est imparti, il n’a pas
formellement opposé son refus au paiement direct ;
-
la réception par l’acheteur de la copie de la facture
adressée au titulaire et de l’accusé de réception attestant que le titulaire a
bien reçu la demande de paiement du sous- traitant.
Enfin, en cas de retard de paiement par le pouvoir adjudicateur, le
sous-traitant perçoit des intérêts moratoires et une indemnité forfaitaire pour
frais de recouvrement dans les conditions prévues par les articles 39 et 40 de
la loi n° 2013-100102 du
28 janvier 2013.
S’il constate que la demande de paiement ne comporte pas l’ensemble des
pièces justificatives requises, le pouvoir adjudicateur peut suspendre le délai
de paiement du sous-traitant. Cette suspension ne peut avoir lieu qu’une seule
fois pour chaque demande de paiement.
Afin que cette suspension soit régulière, le pouvoir adjudicateur doit
notifier au titulaire et au sous-traitant, par tout moyen attestant d’une date
certaine de réception, la suspension du délai de paiement, les motifs d’une
telle décision ainsi que les pièces justificatives exigées aux fins de la
régularisation de la demande. Le délai sera suspendu jusqu’à la date de
réception par le pouvoir adjudicateur des pièces et justificatifs manquants.
Dès la réception de l’ensemble des éléments exigés, un nouveau délai de
paiement commencera à courir (article R. 3133-23 du code de la commande
publique).
5, La responsabilité du sous-traitant au titre de
son exécution personnelle envers le maître d’ouvrage :
Le sous-traitant, même s’il a signé le procès-verbal de réception des
travaux, n’est pas tenu à l’égard du maître d’ouvrage, ni de la garantie de
parfait achèvement, ni de la garantie biennale de bon fonctionnement, ni encore
de la garantie décennale, car ces garanties exigent un lien contractuel entre
le maître d’ouvrage et le débiteur de ces garanties.
Seul l’entrepreneur principal, lié contractuellement au maître d’ouvrage
est responsable des éventuelles fautes commises par ses sous-traitants.
L’article L. 2193-3 du code de la commande publique rappelle d’ailleurs que le
titulaire sous-traite sous sa propre responsabilité.
Ainsi le maître d’ouvrage recherchera, au titre de désordres affectant
l’ouvrage, en premier lieu la responsabilité du titulaire qui ne saurait
pouvoir s’exonérer en invoquant des fautes du sous-traitant, puisqu’il en
répond à l’égard du maître d’ouvrage.
Toutefois, le Conseil d’Etat a admis dans son
arrêt « Commune de Bihorel » du 7 décembre 2015 (n°380419) que le maître d’ouvrage pouvait rechercher
directement la responsabilité quasi-délictuelle du sous-traitant, mais d’une
façon subsidiaire et limitée :
- La
responsabilité des cocontractants, locateurs d’ouvrages du maître d’ouvrage, ne
doit plus pouvoir être utilement recherchée (voir pour confirmation CE, 27 janvier 2017, Sté Baudin Châteauneuf Dervaux,
req. n°397311).
En pratique, les hypothèses sont limitées : liquidation judiciaire des
locateurs d’ouvrage, clause limitative de responsabilité au bénéfice de
l’entrepreneur principal.
Si le maître d’ouvrage a pu utilement rechercher la responsabilité
contractuelle du titulaire du marché et a obtenu sa condamnation ainsi que
celle du maître d’œuvre, il ne peut pas rechercher la responsabilité du
sous-traitant sur le fondement quasi-délictuel (CAA
Nantes, 20 octobre 2020, req. n°19NT02903).
Le maître d’ouvrage ne doit pas s’être placé lui-même dans
l’impossibilité de rechercher utilement la responsabilité de ses cocontractants
(CAA Douai, 14 janvier 2020, req. n°18DA02297). Dans cette espèce, un incendie du fait
d’un sous-traitant s’était déclaré sur une toiture-terrasse avant la réception
des travaux. Le maître d’ouvrage avait réceptionné et établit le décompte
général définitif sans émettre de réserves à ce sujet vis-à-vis de l’entrepreneur.
Et ayant ainsi renoncé à agir contre le titulaire, son action contre le
sous-traitant a été par conséquent rejetée.
Et notamment le
retard dans l’exécution des prestations ne suffit pas à caractériser une
violation des règles de l’art ou une méconnaissance des dispositions législatives et réglementaires (CE, 27 janvier 2017, Sté Baudin Châteauneuf Dervaux, req.
n°397311, CAA Douai, 29 septembre 2020, req. n°18DA01593).
-
Enfin, les désordres doivent être apparus après
réception et doivent être de nature décennale, soit de nature à compromettre la
solidité de l’ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination. En effet, la
responsabilité du sous-traitant ne peut être recherchée pour des désordres
mineurs, mais seulement pour ceux de nature décennale (CE,
6 novembre 2020, n°428457).
Les actions dirigées contre les
sous-traitants sur le fondement du droit commun se prescrivent par dix ans à
compter de la réception des travaux lorsqu’elles sont initiées par le maître
d’ouvrage (article 1792-4-3 du code civil). Cette question est
aujourd’hui clairement tranchée par un arrêt du Conseil d’Etat : CE 12 avril 2022 n°448946) pour lequel les actions prévues
aux articles 1792 et 1792-1 du code civil ont vocation à s’appliquer aux actions
en responsabilité dirigées par le maître d’ouvrage contre les constructeurs ou
leurs sous-traitants.
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