Cour de cassation - Chambre civile 1
- N° de pourvoi : 21-11.846
- ECLI:FR:CCASS:2022:C100698
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du mercredi 28 septembre 2022
Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia, du 09 décembre 2020Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 28 septembre 2022
Cassation partielle
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 698 F-D
Pourvoi n° K 21-11.846
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 28 SEPTEMBRE 2022
La société Jarmenil H.E, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 6], a formé le pourvoi n° K 21-11.846 contre l'arrêt rendu le 9 décembre 2020 par la cour d'appel de Bastia (chambre civile, section 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société [W] [U] [Z] et [C] [R], notaires associés, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à Mme [V] [A], domiciliée [Adresse 7],
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Kloda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Jarmenil H.E, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société [W] [U] [Z] et [C] [R], de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme [A], après débats en l'audience publique du 5 juillet 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Kloda, conseiller référendaire rapporteur, M. Vigneau, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 9 décembre 2020), par acte du 19 novembre 2014, reçu par M. [U] [Z], notaire, associé de la société civile professionnelle [W] [U] [Z] et [C] [R] (la SCP), Mme [A] a vendu à la société Jarmenil H.E (la société) un bien immobilier.
2. Soutenant qu'alors que Mme [A] s'était contractuellement engagée à lui vendre également trois autres parcelles contiguës, elle les avait vendues en fraude de ses droits à un tiers, M. [D], entraînant l'enclavement de son fonds, la société a sollicité la condamnation de celle-ci à prendre en charge les coûts inhérents à l'établissement d'une servitude de passage sur la propriété de ce tiers.
Examen des moyens
Sur les premier et deuxième moyens, ci-après annexés
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le troisième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. La société fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de condamnation de Mme [A] à prendre en charge l'ensemble des frais et coûts inhérents à l'établissement d'une servitude de passage sur la propriété [D] au profit de la parcelle n° [Cadastre 2], alors « que le débiteur, qui s'abstient d'exécuter l'obligation à laquelle il s'est engagé, est tenu de réparer le préjudice que cette inexécution a causé à son cocontractant ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions, la société faisait valoir que si, selon compromis de vente du 28 mai 2014, Mme [A] s'était engagée à lui céder la propriété des parcelles n° [Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 5], elle n'avait pas hésité à violer les termes de ce compromis, dont la validité n'avait pourtant jamais été remise en cause, en cédant lesdites parcelles à un tiers, M. [D] ; que la société ajoutait que cette inexécution contractuelle lui causait préjudice puisqu'elle la privait d'une partie de la propriété qu'elle convoitait et que la parcelle n° [Cadastre 2], dont elle était propriétaire par ailleurs, se trouvait désormais enclavée dans la propriété de M. [D], l'empêchant d'y accéder ; qu'en réparation de son préjudice, la société demandait que Mme [A] soit condamnée à prendre en charge l'ensemble des frais et coûts inhérents à l'établissement d'une servitude de passage sur la propriété de M. [D] au profit de sa parcelle n° [Cadastre 2] ; qu'en refusant de faire droit à cette demande, aux motifs en réalité inopérants que Mme [A] était dépourvue de tous droits sur les fonds concernés, la cour d'appel, qui a méconnu la force obligatoire du compromis du 28 mai 2014, a violé l'article 1134, devenu 1103 du code civil, ensemble l'article 1147, devenu 1231-1 du code civil ;
Réponse de la Cour
Vu les articles 1134 et 1147, devenus 1103 et 1231-1, du code civil :
5. Il résulte de ces textes que le débiteur, qui s'abstient d'exécuter l'obligation à laquelle il s'est engagé, est tenu de réparer le préjudice que cette inexécution a causé à son cocontractant.
6. Pour rejeter la demande de condamnation de Mme [A] à prendre en charge l'ensemble des frais et coûts inhérents à l'établissement d'une servitude de passage sur la propriété de M. [D], l'arrêt retient que Mme [A] est dépourvue de tous droits sur les fonds dominants.
7. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à exclure le droit de la société à obtenir la réparation du préjudice causé par le manquement de Mme [A] à ses obligations contractuelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé.
Demande de mise hors de cause
8. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il y a lieu de mettre hors de cause la SCP, dont la présence n'est pas nécessaire devant la cour d'appel de renvoi.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du troisième moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de la société Jarmenil H.E de condamnation de Mme [A] à prendre en charge l'ensemble des frais et coûts inhérents à l'établissement d'une servitude de passage sur la propriété [D] au profit de la parcelle n° [Cadastre 2], l'arrêt rendu le 9 décembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ;
Met hors de cause la SCP [W] [U] [Z] et [C] [R] ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Condamne Mme [A] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de Mme [A] et de la société civile professionnelle [W] [U] [Z] et [C] [R], et condamne Mme [A] à payer à la société Jarmenil H.E la somme de 3 000 euros ;
CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 28 septembre 2022
Cassation partielle
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 698 F-D
Pourvoi n° K 21-11.846
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 28 SEPTEMBRE 2022
La société Jarmenil H.E, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 6], a formé le pourvoi n° K 21-11.846 contre l'arrêt rendu le 9 décembre 2020 par la cour d'appel de Bastia (chambre civile, section 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société [W] [U] [Z] et [C] [R], notaires associés, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à Mme [V] [A], domiciliée [Adresse 7],
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Kloda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Jarmenil H.E, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société [W] [U] [Z] et [C] [R], de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme [A], après débats en l'audience publique du 5 juillet 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Kloda, conseiller référendaire rapporteur, M. Vigneau, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 9 décembre 2020), par acte du 19 novembre 2014, reçu par M. [U] [Z], notaire, associé de la société civile professionnelle [W] [U] [Z] et [C] [R] (la SCP), Mme [A] a vendu à la société Jarmenil H.E (la société) un bien immobilier.
2. Soutenant qu'alors que Mme [A] s'était contractuellement engagée à lui vendre également trois autres parcelles contiguës, elle les avait vendues en fraude de ses droits à un tiers, M. [D], entraînant l'enclavement de son fonds, la société a sollicité la condamnation de celle-ci à prendre en charge les coûts inhérents à l'établissement d'une servitude de passage sur la propriété de ce tiers.
Examen des moyens
Sur les premier et deuxième moyens, ci-après annexés
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le troisième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. La société fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de condamnation de Mme [A] à prendre en charge l'ensemble des frais et coûts inhérents à l'établissement d'une servitude de passage sur la propriété [D] au profit de la parcelle n° [Cadastre 2], alors « que le débiteur, qui s'abstient d'exécuter l'obligation à laquelle il s'est engagé, est tenu de réparer le préjudice que cette inexécution a causé à son cocontractant ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions, la société faisait valoir que si, selon compromis de vente du 28 mai 2014, Mme [A] s'était engagée à lui céder la propriété des parcelles n° [Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 5], elle n'avait pas hésité à violer les termes de ce compromis, dont la validité n'avait pourtant jamais été remise en cause, en cédant lesdites parcelles à un tiers, M. [D] ; que la société ajoutait que cette inexécution contractuelle lui causait préjudice puisqu'elle la privait d'une partie de la propriété qu'elle convoitait et que la parcelle n° [Cadastre 2], dont elle était propriétaire par ailleurs, se trouvait désormais enclavée dans la propriété de M. [D], l'empêchant d'y accéder ; qu'en réparation de son préjudice, la société demandait que Mme [A] soit condamnée à prendre en charge l'ensemble des frais et coûts inhérents à l'établissement d'une servitude de passage sur la propriété de M. [D] au profit de sa parcelle n° [Cadastre 2] ; qu'en refusant de faire droit à cette demande, aux motifs en réalité inopérants que Mme [A] était dépourvue de tous droits sur les fonds concernés, la cour d'appel, qui a méconnu la force obligatoire du compromis du 28 mai 2014, a violé l'article 1134, devenu 1103 du code civil, ensemble l'article 1147, devenu 1231-1 du code civil ;
Réponse de la Cour
Vu les articles 1134 et 1147, devenus 1103 et 1231-1, du code civil :
5. Il résulte de ces textes que le débiteur, qui s'abstient d'exécuter l'obligation à laquelle il s'est engagé, est tenu de réparer le préjudice que cette inexécution a causé à son cocontractant.
6. Pour rejeter la demande de condamnation de Mme [A] à prendre en charge l'ensemble des frais et coûts inhérents à l'établissement d'une servitude de passage sur la propriété de M. [D], l'arrêt retient que Mme [A] est dépourvue de tous droits sur les fonds dominants.
7. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à exclure le droit de la société à obtenir la réparation du préjudice causé par le manquement de Mme [A] à ses obligations contractuelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé.
Demande de mise hors de cause
8. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il y a lieu de mettre hors de cause la SCP, dont la présence n'est pas nécessaire devant la cour d'appel de renvoi.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du troisième moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de la société Jarmenil H.E de condamnation de Mme [A] à prendre en charge l'ensemble des frais et coûts inhérents à l'établissement d'une servitude de passage sur la propriété [D] au profit de la parcelle n° [Cadastre 2], l'arrêt rendu le 9 décembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ;
Met hors de cause la SCP [W] [U] [Z] et [C] [R] ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Condamne Mme [A] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de Mme [A] et de la société civile professionnelle [W] [U] [Z] et [C] [R], et condamne Mme [A] à payer à la société Jarmenil H.E la somme de 3 000 euros ;
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