dimanche 23 octobre 2022

Responsabilité délictuelle de l'expert judiciaire

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 5 octobre 2022




Rejet


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 706 FS-B

Pourvoi n° S 21-12.542







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 5 OCTOBRE 2022

M. [T] [S], domicilié centre hospitalier d'[Localité 4], [Adresse 3], a formé le pourvoi n° S 21-12.542 contre l'arrêt rendu le 3 décembre 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-6), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [R] [D], domicilié [Adresse 2],

2°/ à Mme [N] [D], domiciliée [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de M. [S], de la SCP Richard, avocat de M. [R] [D] et de Mme [N] [D], et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 12 juillet 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, M. Chevalier, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes Gargoullaud, Dazzan, Le Gall, Feydeau-Thieffry, M. Serrier, conseillers référendaires, Mme Mallet-Bricout, avocat général, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 3 décembre 2020), M. [R] [D], agissant en son nom personnel et en qualité de représentant légal de sa fille, Mme [N] [D], qui a présenté, lors de sa naissance, le 10 avril 1992, une dystocie des épaules et conservé des lésions d'un plexus brachial, a saisi la juridiction administrative pour voir reconnaître la responsabilité de l'établissement de santé public où avait eu lieu l'accouchement.

2. M. [S] (l'expert) a été désigné en qualité de médecin expert par la juridiction administrative et a déposé son rapport.

3. Après avoir vainement sollicité la restitution des pièces qu'ils avaient communiquées à l'expert lors des opérations d'expertise, M. [R] [D] et Mme [N] [D] l'ont assigné en responsabilité et indemnisation de leur préjudice moral.

Examen des moyens

Sur le second moyen, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. L'expert fait grief à l'arrêt de dire qu'il a commis une faute et de le condamner à payer des dommages-intérêts à M. [R] [D] et à Mme [N] [D], alors « que l'expert judiciaire auquel ont été remis des copies de pièces composant le dossier médical d'un patient, n'est pas tenu de les conserver et de les restituer ; que, pour retenir la responsabilité de M. [S], médecin, en sa qualité d'expert désigné par la cour administrative d'appel de Marseille, la cour d'appel a énoncé qu'il ne conteste pas avoir reçu des consorts [D], pour l'exécution de sa mission, des documents médicaux afférents au suivi de [N] [D], victime d'une lésion du plexus brachial droit à sa naissance ni ne pas être en mesure de démontrer qu'il leur a restitués, à l'issue de sa mission, de sorte que le fait de s'en être dessaisi, sans s'assurer de l'accord des consorts [D] consacre une négligence fautive ; qu'en statuant ainsi, tout en relevant que « les textes qui réglementent la mission de l'expert sont muets quant au devenir des documents que les justiciables confient à l'expert pour l'exécution de sa mission » et tout en constatant que seules des copies avaient été remises à l'expert judiciaire, ce dont il résultait qu'il n'avait pu commettre de faute en ne les conservant pas, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil. »

Réponse de la Cour

6. Il résulte des articles 1382 et 1383, devenus 1240 et 1241, du code civil, et 243 du code de procédure civile que l'expert se fait communiquer par les parties les pièces nécessaires à l'accomplissement de sa mission et qu'au terme de ses opérations, il lui incombe, sauf dispense des parties, de leur restituer les pièces non dématérialisées.

7. Après avoir relevé que l'expert ne contestait pas avoir reçu les pièces nécessaires à la réalisation de la mesure, et ne pas avoir été en mesure de les restituer, la cour d'appel en a déduit à bon droit qu'en se dessaisissant des pièces médicales remises par M. [R] [D] et Mme [N] [D] sans s'assurer de leur accord, l'expert avait commis une faute.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [S] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [S] et le condamne à payer à M. [R] [D] et à Mme [N] [D] la somme globale de 3 000 euros ;

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