jeudi 3 décembre 2015

Ne pas prendre de maître d'oeuvre ne constitue pas une faute du maître de l'ouvrage

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 26 novembre 2015
N° de pourvoi: 14-25.502
Non publié au bulletin Cassation

M. Chauvin (président), président
SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Rousseau et Tapie, avocat(s)


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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 11 août 2014), que M. X... a acquis un lot d'un lotissement dont le bornage a été réalisé par M. Y..., géomètre-expert, à la demande de la société d'aménagement, puis a entrepris l'édification d'une maison ; qu'un arrêté interruptif des travaux lui a été notifié au motif que la construction ne respectait pas la hauteur prévue par le plan d'occupation des sols et le permis de construire ; qu'une expertise a mis en évidence une erreur d'altimétrie concernant une des bornes de la parcelle prise comme point de référence par l'entreprise de gros oeuvre ; qu'un permis de construire modificatif a été accordé ; qu'après expertise, M. X... a assigné M. Y... et la société Bureau et réalisations électriques (la société BRE), chargée du lot chauffage, depuis lors en liquidation judiciaire, en réparation de ses préjudices ;

Sur le premier moyen :

Vu les articles 1147 et 1382 du code civil ;

Attendu que, pour dire que M. X... a partiellement concouru aux dommages, l'arrêt retient qu'en ne s'adjoignant pas le concours d'un maître d'oeuvre pour la planification et le suivi des travaux, celui-ci a pris le risque, d'une part, que les travaux soient exécutés sans plan d'exécution et, par conséquent, sur la base des seuls plans du permis de construire, qui ne sont pas suffisamment renseignés pour l'exécution des travaux, d'où l'absence de correction de l'erreur altimétrique, d'autre part, que l'ordonnancement des travaux ne soit pas conforme aux règles de l'art et que les équipements posés avant l'achèvement du clos et du couvert soient endommagés ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs qui ne suffisent pas à établir la faute du maître de l'ouvrage, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et sur le second moyen :

Vu les articles 1147 et 1382 du code civil ;

Attendu que, pour rejeter la demande d'indemnisation au titre du préjudice de jouissance, l'arrêt retient que M. X... expose qu'il souffre d'un préjudice du fait de ne pas avoir pu occuper l'ouvrage qu'il destinait à son habitation mais qu'il ne caractérise pas ce préjudice qui ne se confond pas avec le préjudice moral ayant donné lieu à réparation en première instance ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté une interruption des travaux pendant près de deux ans, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 août 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans, autrement composée ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de M. Y... ;


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