mardi 26 février 2019

L'achèvement de l'ouvrage n'est pas une condition de la réception tacite

Note A. Pimbert, RGDA 2019-4, p. 15, sur le thème : "catastrophes naturelles : les affres de la cause déterminante".

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 14 février 2019
N° de pourvoi: 17-31.083
Non publié au bulletin Cassation partielle
M. Chauvin (président), président
SCP Delvolvé et Trichet, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Jean-Philippe Caston, avocat(s)


Texte intégral


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :





Constate la reprise de l'instance par Mmes E... et S..., ès qualités d'héritières de P... K... ;



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 7 septembre 2017), que M. M... et Mme D... (les consorts M...) ont acquis un terrain à bâtir, sur lequel ils ont fait édifier une villa ; qu'ils ont souscrit une assurance habitation auprès de la société Assurances Banque populaire ; que, le terrain étant très pentu, les consorts M... ont confié la réalisation de trois murs de soutènement à P... K..., assuré auprès du GAN ; que, le 14 décembre 2008, à la suite de très fortes pluies, ces murs de soutènement se sont effondrés ; que P... K... a déclaré le sinistre à son assureur ; que, par arrêté du 25 juin 2009, l'état de catastrophe naturelle a été reconnu pour les mouvements de terrain survenus du 13 au 17 décembre 2008 ; que, la société Assurances Banque populaire ayant refusé sa garantie, les consorts M... ont, après expertise, assigné P... K..., le GAN et la société Assurances Banque populaire en indemnisation de leurs préjudices ;



Sur le second moyen, ci-après annexé :



Attendu que les consorts M... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes formées contre la société Assurances Banque populaire ;



Mais attendu qu'ayant relevé, procédant à la recherche prétendument omise, que, si les murs de soutènement s'étaient effondrés à l'occasion de pluies importantes, c'était en raison de leurs insuffisances constructives, que ces murs avaient été édifiés sur un terrain en forte pente, sans étude de sol et sans recours à un bureau d'études techniques pour définir leurs caractéristiques, que l'expert avait relevé sur ces ouvrages en béton armé, dont chacun mesurait environ vingt mètres de long sur une hauteur d'environ deux mètres cinquante, un ferraillage dans la partie en élévation mal positionné et insuffisant, que l'épisode pluvieux qui avait donné lieu à la publication d'un arrêté de catastrophe naturelle n'avait été qu'un élément révélateur et déclencheur des insuffisances de la construction de ces murs et que la cause déterminante du sinistre n'était pas la survenance d'un phénomène climatique exceptionnel, pouvant être qualifié de catastrophe naturelle, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef ;



Mais sur le premier moyen :



Vu l'article 1792-6 du code civil ;



Attendu que, pour déclarer P... K... responsable, sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun, de l'effondrement de murs de soutènement et rejeter les demandes des consorts M... contre le GAN, l'arrêt retient que, lors des opérations d'expertise, P... K... a lui-même avoué que le sinistre s'était produit en cours de chantier et que les consorts M... ne prouvent pas qu'au moment du sinistre, le 14 décembre 2008, les travaux de construction des murs étaient achevés et avaient fait l'objet d'une réception ;



Qu'en statuant ainsi, alors que l'achèvement de l'ouvrage n'est pas une condition de la réception tacite, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;



PAR CES MOTIFS :



CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette les demandes formées contre la société Assurances Banque Populaire, l'arrêt rendu le 7 septembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;



Condamne la société GAN Assurances IARD aux dépens ;



Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande du GAN et le condamne à payer aux consorts M... la somme globale de 3 000 euros et à la SCP Garreau Bauer-Violas Feschotte-Desbois la somme de 2 000 euros ;

Aucun commentaire :

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.