mercredi 29 mars 2023

Responsabilité du maître d'ouvrage pour prise de risque délibérée

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

SG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 mars 2023




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 196 F-D

Pourvoi n° R 18-24.581




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 MARS 2023

M. [J] [S], domicilié [Adresse 4], a formé le pourvoi n° R 18-24.581 contre l'arrêt rendu le 19 septembre 2018 par la cour d'appel de Bastia (chambre civile, section 2), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [B] [M], épouse [T], domiciliée [Adresse 1],

2°/ à M. [Y] [E] [G], domicilié [Adresse 7],

3°/ à la Mutuelle des architectes français (MAF), dont le siège est [Adresse 6],

4°/ au syndicat des copropriétaires du [Adresse 3], dont le siège est [Adresse 4], représenté par son syndic la société Organigram, dont le siège est [Adresse 2],

5°/ à la société Gan assurances IARD, dont le siège est [Adresse 5],

6°/ à la société Etanchéité insulaire, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 8],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Boyer, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [S], de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la Mutuelle des architectes français, de la SCP Marc Lévis, avocat de la société Gan assurances IARD, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de Mme [M], après débats en l'audience publique du 31 janvier 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Boyer, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à M. [S] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Etanchéité insulaire.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 19 septembre 2018), M. [S] a confié des travaux de réhabilitation de combles, situés au troisième étage d'un immeuble en copropriété, à M. [E] [G], assuré auprès de la société Gan assurances, sous la maîtrise d'oeuvre de la société BEEC, assurée auprès de la Mutuelle des architectes français (la MAF).

3. Invoquant notamment le risque d'effondrement du plancher séparant les deuxième et troisième niveaux du bâtiment, Mme [M], propriétaire d'un appartement situé au deuxième étage, a, après expertise, assigné M. [S], le syndicat des copropriétaires [Adresse 3], les constructeurs et leurs assureurs en réparation sur le fondement, notamment, du trouble anormal du voisinage.

4. M. [S] a sollicité la complète garantie des locateurs d'ouvrage et de leurs assureurs sur le fondement de l'article 1792 du code civil.

Examen des moyens

Sur le premier moyen et sur le second moyen, pris en sa première branche, ci-après annexés

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

6. M. [S] fait grief à l'arrêt de fixer, sur son recours à l'encontre des locateurs d'ouvrage au titre du préjudice matériel, un partage laissant 20 % de responsabilité à sa charge, soit la somme de 39 320 euros, alors « que seule l'immixtion fautive du maître de l'ouvrage notoirement compétent est susceptible d'exonérer le constructeur de sa garantie décennale ; qu'en jugeant que M. [S] avait contribué à son propre dommage à hauteur de 20% des préjudices matériels sans caractériser une immixtion fautive de sa part ni rechercher s'il était compétent en matière de construction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du code civil. »

Réponse de la Cour

7. La cour d'appel a relevé que M. [S], avait, bien que n'y ayant pas été autorisé par une assemblée générale, fait procéder à la surélévation de la toiture et modifier les combles pour en faire un logement en accroissant la charge sur un plancher très ancien par changement de destination, après avoir refusé un devis du maître d'oeuvre préconisant une réhabilitation complète qu'il se refusait toujours à entreprendre, y privilégiant un simple confortement, en dépit des conclusions et préconisations du rapport de l'expert.

8. Ayant pu déduire de ces constatations la prise délibérée de risques que M. [S] ne pouvait ignorer, tant au regard de l'ancienneté du bâtiment que de son refus persistant d'une réhabilitation complète et conforme aux règles de l'art, la cour d'appel, qui ne s'est pas fondée sur l'immixtion fautive du maître de l'ouvrage, a légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [S] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

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