Note Ajaccio, bull. ass. 07-22, p. 3.
Note C. Charbonneau, RDI 2022, p. 411.
Note JM Do Carmo Silva, SJ G 2022, p. 1616.
Note C. Cerveau-Colliard, GP 2022-38, p. 58.
Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 21-18.518
- ECLI:FR:CCASS:2022:C300423
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du mercredi 25 mai 2022
Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, du 04 décembre 2020Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 25 mai 2022
Cassation partielle
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 423 FS-B
Pourvoi n° N 21-18.518
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 25 MAI 2022
La société Mutuelle des architectes français (MAF), dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 21-18.518 contre l'arrêt rendu le 4 décembre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 6), dans le litige l'opposant à Mme [E] [V], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société Mutuelle des architectes français, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de Mme [V], et l'avis de Mme Vassallo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 12 avril 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, M. Nivôse, Mmes Farrenq-Nési, Greff-Bohnert, MM. Jacques, Bech, Boyer, Mme Abgrall, conseillers, Mmes Djikpa, Brun, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 décembre 2020), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 11 juillet 2019, pourvoi n° 18-17.433), Mme [V] a souscrit auprès de la Mutuelle des architectes français (la MAF) un contrat d'assurance dommages-ouvrage portant sur la construction d'une maison individuelle.
2. La réception de l'ouvrage est intervenue le 8 février 2004.
3. Mme [V] a déclaré un sinistre à la MAF le 10 janvier 2012.
4. Par lettre du 12 mars 2012, la MAF a notifié à l'assurée un refus de garantie.
5. Mme [V] a assigné la MAF en référé-expertise, par acte du 11 mars 2014, puis au fond, après le dépôt du rapport de l'expert.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
6. La MAF fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à Mme [V] diverses sommes au titre des travaux de reprise et des frais de maîtrise d'oeuvre, alors « que l'assureur dommages-ouvrage qui dénie sa garantie et n'indemnise pas l'assuré ne peut être subrogé dans les droits du maître d'ouvrage et exercer un recours contre les constructeurs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu, pour écarter l'exception de subrogation opposée par la Maf aux demandes de Mme [V], que cette dernière avait déclaré le sinistre le 10 janvier 2012 alors qu'il subsistait, avant l'expiration de la garantie décennale le 8 février 2014, un délai permettant à l'assureur de respecter à son égard les obligations résultant des dispositions de l'article L. 242-1 du code des assurances et ainsi de prendre une position de garantie ou de non garantie en toute connaissance de cause, puis d'exercer son recours subrogatoire contre les constructeurs, de sorte que c'était l'inaction de la Maf qui avait empêché la subrogation de s'opérer ; qu'en statuant ainsi, quand l'assureur dommages-ouvrage qui dénie sa garantie et n'indemnise par l'assuré n'est pas subrogé dans ses droits et ne peut agir contre les constructeurs sur le fondement de la garantie décennale, de sorte qu'il ne pouvait être reproché à la Maf de n'avoir exercé de recours contre les constructeurs avant l'expiration de la garantie décennale, la cour d'appel a violé l'article L. 121-12 du code des assurances, ensemble l'article 126 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 121-12, alinéas 1er et 2, du code des assurances et l'article 334 du code de procédure civile :
7. Il résulte du premier et du dernier de ces textes que l'assureur qui n'a pas indemnisé son assuré ne peut agir par subrogation mais est en droit d'appeler le responsable en garantie s'il est lui-même poursuivi.
8. Selon le deuxième, l'assureur peut être déchargé, en tout ou en partie, de sa responsabilité envers l'assuré, quand la subrogation ne peut plus, par le fait de l'assuré, s'opérer en faveur de l'assureur.
9. Pour rejeter l'exception de subrogation opposée par l'assureur, l'arrêt retient que l'assurée a déclaré le sinistre à l'assureur dans un délai lui permettant de prendre une position de garantie ou de non-garantie en toute connaissance de cause, puis d'exercer son recours subrogatoire contre les constructeurs et que c'est l'inaction de l'assureur, et non la délivrance de l'assignation en référé aux fins d'expertise postérieurement à l'expiration du délai décennal qui a empêché la subrogation de s'opérer.
10. Il ajoute que l'assureur avait des éléments lui permettant d'anticiper cette assignation puisque l'assurée avait maintenu ses réclamations et avait fait organiser une expertise amiable à laquelle la MAF avait été convoquée.
11. Il énonce, enfin, que l'assureur dommages-ouvrage, même non encore subrogé, est en droit d'assigner en responsabilité les constructeurs dans le délai de la garantie décennale s'il indemnise l'assuré avant que le juge ne statue.
12. En statuant ainsi, alors que l'assureur qui refuse sa garantie ne peut agir contre les responsables à titre subrogatoire ou les appeler en garantie avant d'avoir été lui-même poursuivi, de sorte que la MAF n'était pas privée de ses recours par son inaction mais par le fait de l'assurée, à laquelle il appartenait d'assigner l'assureur dans un délai lui permettant d'appeler les responsables en garantie ou, à défaut, d'assigner elle-même ces responsables pour préserver les recours de l'assureur, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ses dispositions relatives aux demandes formées au titre du préjudice de jouissance et de la résistance abusive, l'arrêt rendu le 4 décembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne Mme [V] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 25 mai 2022
Cassation partielle
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 423 FS-B
Pourvoi n° N 21-18.518
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 25 MAI 2022
La société Mutuelle des architectes français (MAF), dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 21-18.518 contre l'arrêt rendu le 4 décembre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 6), dans le litige l'opposant à Mme [E] [V], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société Mutuelle des architectes français, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de Mme [V], et l'avis de Mme Vassallo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 12 avril 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, M. Nivôse, Mmes Farrenq-Nési, Greff-Bohnert, MM. Jacques, Bech, Boyer, Mme Abgrall, conseillers, Mmes Djikpa, Brun, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 décembre 2020), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 11 juillet 2019, pourvoi n° 18-17.433), Mme [V] a souscrit auprès de la Mutuelle des architectes français (la MAF) un contrat d'assurance dommages-ouvrage portant sur la construction d'une maison individuelle.
2. La réception de l'ouvrage est intervenue le 8 février 2004.
3. Mme [V] a déclaré un sinistre à la MAF le 10 janvier 2012.
4. Par lettre du 12 mars 2012, la MAF a notifié à l'assurée un refus de garantie.
5. Mme [V] a assigné la MAF en référé-expertise, par acte du 11 mars 2014, puis au fond, après le dépôt du rapport de l'expert.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
6. La MAF fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à Mme [V] diverses sommes au titre des travaux de reprise et des frais de maîtrise d'oeuvre, alors « que l'assureur dommages-ouvrage qui dénie sa garantie et n'indemnise pas l'assuré ne peut être subrogé dans les droits du maître d'ouvrage et exercer un recours contre les constructeurs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu, pour écarter l'exception de subrogation opposée par la Maf aux demandes de Mme [V], que cette dernière avait déclaré le sinistre le 10 janvier 2012 alors qu'il subsistait, avant l'expiration de la garantie décennale le 8 février 2014, un délai permettant à l'assureur de respecter à son égard les obligations résultant des dispositions de l'article L. 242-1 du code des assurances et ainsi de prendre une position de garantie ou de non garantie en toute connaissance de cause, puis d'exercer son recours subrogatoire contre les constructeurs, de sorte que c'était l'inaction de la Maf qui avait empêché la subrogation de s'opérer ; qu'en statuant ainsi, quand l'assureur dommages-ouvrage qui dénie sa garantie et n'indemnise par l'assuré n'est pas subrogé dans ses droits et ne peut agir contre les constructeurs sur le fondement de la garantie décennale, de sorte qu'il ne pouvait être reproché à la Maf de n'avoir exercé de recours contre les constructeurs avant l'expiration de la garantie décennale, la cour d'appel a violé l'article L. 121-12 du code des assurances, ensemble l'article 126 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 121-12, alinéas 1er et 2, du code des assurances et l'article 334 du code de procédure civile :
7. Il résulte du premier et du dernier de ces textes que l'assureur qui n'a pas indemnisé son assuré ne peut agir par subrogation mais est en droit d'appeler le responsable en garantie s'il est lui-même poursuivi.
8. Selon le deuxième, l'assureur peut être déchargé, en tout ou en partie, de sa responsabilité envers l'assuré, quand la subrogation ne peut plus, par le fait de l'assuré, s'opérer en faveur de l'assureur.
9. Pour rejeter l'exception de subrogation opposée par l'assureur, l'arrêt retient que l'assurée a déclaré le sinistre à l'assureur dans un délai lui permettant de prendre une position de garantie ou de non-garantie en toute connaissance de cause, puis d'exercer son recours subrogatoire contre les constructeurs et que c'est l'inaction de l'assureur, et non la délivrance de l'assignation en référé aux fins d'expertise postérieurement à l'expiration du délai décennal qui a empêché la subrogation de s'opérer.
10. Il ajoute que l'assureur avait des éléments lui permettant d'anticiper cette assignation puisque l'assurée avait maintenu ses réclamations et avait fait organiser une expertise amiable à laquelle la MAF avait été convoquée.
11. Il énonce, enfin, que l'assureur dommages-ouvrage, même non encore subrogé, est en droit d'assigner en responsabilité les constructeurs dans le délai de la garantie décennale s'il indemnise l'assuré avant que le juge ne statue.
12. En statuant ainsi, alors que l'assureur qui refuse sa garantie ne peut agir contre les responsables à titre subrogatoire ou les appeler en garantie avant d'avoir été lui-même poursuivi, de sorte que la MAF n'était pas privée de ses recours par son inaction mais par le fait de l'assurée, à laquelle il appartenait d'assigner l'assureur dans un délai lui permettant d'appeler les responsables en garantie ou, à défaut, d'assigner elle-même ces responsables pour préserver les recours de l'assureur, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ses dispositions relatives aux demandes formées au titre du préjudice de jouissance et de la résistance abusive, l'arrêt rendu le 4 décembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne Mme [V] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Aucun commentaire :
Enregistrer un commentaire
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.