chambre civile 3
Audience publique du jeudi 16 janvier 2020
N° de pourvoi: 18-24.948
Non publié au bulletin Cassation partielle
M. Chauvin (président), président
SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, SCP Boulloche, SCP L. Poulet-Odent, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, SCP Piwnica et Molinié, avocat(s)
Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
CIV.3
FB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 16 janvier 2020
Cassation partielle
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 10 F-D
Pourvoi n° Q 18-24.948
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 JANVIER 2020
la société Electricité de France (EDF), société anonyme, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° Q 18-24.948 contre l'arrêt rendu le 10 septembre 2018 par la cour d'appel de Versailles (4e chambre), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Lagarde et Meregnani, dont le siège est [...] ,
2°/ à la société DWG, dont le siège est [...] ,
3°/ à la SMABTP, dont le siège est [...] ,
4°/ à la société DEGW France, dont le siège est [...] ,
5°/ à la société Groupe Averia, dont le siège est [...] ,
6°/ à la société Axa France IARD, dont le siège est [...] ,
7°/ à la société Allianz IARD, dont le siège est [...] ,
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Bech, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Electricité de France, de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Allianz IARD, de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de la société Groupe Averia, de la SCP Boulloche, avocat de la société Axa France IARD, de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la société DWG, de la SMABTP, de la société DEGW France, de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Lagarde et Meregnani, après débats en l'audience publique du 3 décembre 2019 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Bech, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 10 septembre 2018), que la société Electricité de France (la société EDF) a entrepris dans un groupe d'immeubles des travaux d'aménagement qu'elle a confiés à un groupement momentané d'entreprises comprenant, entre autres, les sociétés Lagarde et Meregnani, désignée comme mandataire du groupement, et DWG, chargée de l'installation des cloisons amovibles et assurée auprès de la SMATBP ; qu'une mission d'assistance à la maîtrise d'ouvrage a été donnée à la société DEGW France (la société DEGW) ; que les plateaux de verre des cloisons ont été vendus à la société DWG par la société Averia distribution, aux droits de laquelle vient la société Groupe Averia, assurée auprès de la société Axa France IARD (la société Axa), puis de la société Allianz IARD (la société Allianz) ; que la réception des travaux est intervenue sans réserve le 1er décembre 2010 ; qu'ayant constaté le bris spontané des vitrages de plusieurs cloisons, la société EDF a, après expertise, assigné les sociétés Lagarde et Meregnani, DEGW, DWG, Averia distribution, SMATBP, Axa et Allianz en indemnisation de ses préjudices ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article 1792 du code civil ;
Attendu que, pour rejeter les demandes de la société EDF fondées sur la garantie décennale des constructeurs, l'arrêt retient que les opérations de pose des cloisons étaient des travaux d'aménagement intérieur simples et réversibles qui ne caractérisaient pas la réalisation d'un ouvrage de construction immobilière ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les travaux ayant fait l'objet du marché conclu avec le groupement d'entreprises constituaient dans leur ensemble un ouvrage, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Sur le deuxième moyen :
Vu l'article 1641 du code civil ;
Attendu que, pour rejeter les demandes de la société EDF formées contre les sociétés Groupe Averia, Axa et Allianz sur le fondement de la garantie des vices cachés, l'arrêt retient, d'une part, que le verre utilisé dans le bâtiment est élaboré suivant un procédé dit du « float », qu'au cours de ce mode de fabrication apparaissent des inclusions de sulfure de nickel qui se répartissent de façon aléatoire dans la masse du verre et que le traitement de trempe de celui-ci provoque une expansion du volume des inclusions entraînant des contraintes internes susceptibles de provoquer la casse spontanée du vitrage et, d'autre part, que la présence des inclusions de sulfure de nickel est inhérente au processus de fabrication, que le risque qui en résulte d'un phénomène aléatoire et imprévisible de cassure spontanée du verre, connu de la profession, ne peut constituer un défaut du verre et que, au regard du petit nombre de cassures, n'atteignant pas 1 % de la surface totale des vitrages, le verre fourni à la société EDF ne révèle pas une proportion anormalement élevée d'inclusions de sulfure de nickel par rapport à celle qui est communément admise ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les verres vendus étaient affectés d'une défectuosité intrinsèque tenant à l'incorporation de sulfure de nickel qui, entraînant leur casse spontanée, les rendait impropres à l'usage auquel ils étaient destinés, la cour d'appel, qui s'est fondée sur des motifs inopérants tirés de la connaissance du risque de cassure spontanée du verre et de la proportion d'inclusions de sulfure de nickel inférieure à celle qui est communément admise, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé le texte susvisé ;
Et sur le troisième moyen :
Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Attendu que, pour rejeter la demande de la société EDF formée contre la société Lagarde et Meregnani sur le fondement de la responsabilité contractuelle, l'arrêt retient que la clause de l'annexe 4 des conditions particulières d'achat, selon laquelle les entreprises ayant constitué un groupement momentané d'entreprises solidaires déclarent que chacune d'elles est responsable de l'exécution de son propre lot, s'il en est défini un, mais aussi de l'exécution du marché, ne permet pas de rendre la société Lagarde et Meregnani responsable, solidairement avec une autre entreprise du groupement, du manquement à une obligation d'information et de conseil dont celle-ci serait reconnue responsable à l'égard du maître de l'ouvrage ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les dispositions combinées de l'annexe 4 des conditions particulières d'achat et de l'article 10.1 des conditions générales d'achat ne permettaient pas d'engager la responsabilité contractuelle de la société Lagarde et Meregnani en raison d'un manquement d'une autre entreprise du groupement à son obligation d'information et de conseil, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et attendu qu'en raison de l'indivisibilité existant entre les dispositions de l'arrêt attaquées par les trois premiers moyens et les autres, à l'exception de celle qui déclare que les sociétés DWG et DEGW ont manqué à leur obligation d'information et de conseil, il y a lieu à cassation de l'arrêt en toutes ses dispositions à l'exception de cette dernière ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le quatrième moyen :
Dit n'y avoir lieu de mettre les sociétés Lagarde et Meregnani, Allianz IARD, Axa France IARD et Groupe Averia hors de cause ;
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit que les sociétés DEGW France et DWG ont manqué à leur obligation d'information et de conseil à l'égard de la société Electricité de France, l'arrêt rendu le 10 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet en conséquence, sur le surplus, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;
Condamne les sociétés Lagarde et Meregnani, Groupe Averia, Axa France IARD, DWG, DEGW France, SMABTP et Allianz IARD aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Aucun commentaire :
Enregistrer un commentaire
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.