Note Charbonneau, RDI 2021, p. 106
Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 19-10.724
- ECLI:FR:CCASS:2020:C300793
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du jeudi 05 novembre 2020
Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, du 11 décembre 2018Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 5 novembre 2020
Cassation partielle
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 793 F-D
Pourvoi n° Z 19-10.724
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 NOVEMBRE 2020
1°/ M. S... I...,
2°/ Mme W... V..., épouse I...,
domiciliés [...] ,
ont formé le pourvoi n° Z 19-10.724 contre l'arrêt rendu le 11 décembre 2018 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section), dans le litige les opposant :
1°/ à la société d'Assurances Areas dommages, dont le siège est [...] ,
2°/ à la société [...], entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
défenderesses à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Bech, conseiller, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. et Mme I..., de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de la société [...], de Me Le Prado, avocat de la société d'Assurances Areas dommages, après débats en l'audience publique du 15 septembre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Bech, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Reims, 11 décembre 2018), M. et Mme I... ont confié à la société [...] (la société [...]), assurée auprès de la société Areas dommages (la société Areas), la réalisation de la couverture et de la charpente de l'immeuble qu'ils faisaient construire.
2. Se plaignant de malfaçons, M. et Mme I... ont, après expertise, assigné la société [...] en indemnisation de leurs préjudices. La société [...] a appelé en garantie la société Areas.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches
Enoncé du moyen
3. M. et Mme I... font grief à l'arrêt de dire qu'il n'y a pas eu réception des travaux, alors :
« 2°/ que le principe d'unicité de la réception n'est pas d'ordre public et que les parties peuvent y déroger, expressément ou tacitement ; qu'en retenant, pour exclure toute réception partielle des travaux de charpente, que « rien n'établit que les parties avaient convenu d'une réception par tranches de travaux par dérogation à ce principe d'unicité » ce dont il ressort que la dérogation au principe de l'unicité de la réception ne peut être que d'origine conventionnelle et non tacite, la cour a violé l'article 1792-6 du code civil ;
3°/ que la réception partielle n'est pas prohibée par la loi ; qu'en retenant, pour exclure toute réception partielle des travaux de charpente, qu'il «
ne saurait y avoir de réception par lots en l'espèce dans la mesure où les travaux ont fait l'objet d'un seul et même marché », la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et a violé l'article 1792-6 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1792-6 du code civil :
4. Selon ce texte, la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves.
5. Pour dire qu'il n'y a pas eu réception des travaux effectués par la société [...], l'arrêt retient, d'une part, que rien n'établit que les parties étaient convenues d'une réception par tranche de travaux, par dérogation au principe d'unicité de réception, et qu'il n'y a donc pas lieu d'opérer une distinction entre les travaux de charpente et ceux de la couverture, d'autre part, qu'il ne saurait y avoir de réception par lots en l'espèce, dans la mesure où les travaux ont fait l'objet d'un seul et même marché et que c'est donc le même entrepreneur qui a réalisé à la fois la charpente et la couverture en vertu du même devis, la première n'étant d'ailleurs que le support de la seconde.
6. En statuant ainsi, alors que les parties peuvent déroger expressément ou tacitement au principe d'unicité de réception et que la réception partielle par lots n'est pas exclue lorsque plusieurs lots font l'objet d'un seul marché, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Portée et conséquence de la cassation
Vu l'article 624 du code de procédure civile :
7. Selon ce texte, la censure qui s'attache à un arrêt de cassation est limitée à la portée du moyen qui constitue la base de la cassation, sauf le cas d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.
8. La cassation prononcée sur le premier moyen s'étend, par voie de conséquence, aux dispositions ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance, à savoir celles condamnant la société [...] à payer à M. et Mme I... la somme de 2 516 euros au titre des travaux de reprise de la charpente, condamnant M. et Mme I... à rembourser à la société [...] la provision à valoir sur le préjudice de jouissance et disant que la garantie de la société Areas n'est pas mobilisable.
Demande de mise hors de cause
9. La cassation à intervenir sur le chef de l'arrêt disant qu'il n'y a pas eu réception des travaux entraînant celle de la disposition disant que la garantie de la société Areas n'est pas mobilisable, il est nécessaire que cette société soit présente devant la cour d'appel de renvoi.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit qu'il n'y pas eu de réception des travaux, condamne la société [...] à payer à M. et Mme I... la somme de 2 516 euros au titre des travaux de reprise de la charpente, condamne M. et Mme I... à rembourser à la société [...] la provision à valoir sur le préjudice de jouissance et dit que la garantie de la société Areas dommages n'est pas mobilisable, l'arrêt rendu le 11 décembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ;
Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause la société Areas dommages ;
Remet en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne les sociétés Areas dommages et [...] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par les sociétés Areas dommages et [...] et les condamne à payer à M. et Mme I... la somme globale de 3 000 euros ;
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 5 novembre 2020
Cassation partielle
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 793 F-D
Pourvoi n° Z 19-10.724
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 NOVEMBRE 2020
1°/ M. S... I...,
2°/ Mme W... V..., épouse I...,
domiciliés [...] ,
ont formé le pourvoi n° Z 19-10.724 contre l'arrêt rendu le 11 décembre 2018 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section), dans le litige les opposant :
1°/ à la société d'Assurances Areas dommages, dont le siège est [...] ,
2°/ à la société [...], entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
défenderesses à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Bech, conseiller, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. et Mme I..., de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de la société [...], de Me Le Prado, avocat de la société d'Assurances Areas dommages, après débats en l'audience publique du 15 septembre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Bech, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Reims, 11 décembre 2018), M. et Mme I... ont confié à la société [...] (la société [...]), assurée auprès de la société Areas dommages (la société Areas), la réalisation de la couverture et de la charpente de l'immeuble qu'ils faisaient construire.
2. Se plaignant de malfaçons, M. et Mme I... ont, après expertise, assigné la société [...] en indemnisation de leurs préjudices. La société [...] a appelé en garantie la société Areas.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches
Enoncé du moyen
3. M. et Mme I... font grief à l'arrêt de dire qu'il n'y a pas eu réception des travaux, alors :
« 2°/ que le principe d'unicité de la réception n'est pas d'ordre public et que les parties peuvent y déroger, expressément ou tacitement ; qu'en retenant, pour exclure toute réception partielle des travaux de charpente, que « rien n'établit que les parties avaient convenu d'une réception par tranches de travaux par dérogation à ce principe d'unicité » ce dont il ressort que la dérogation au principe de l'unicité de la réception ne peut être que d'origine conventionnelle et non tacite, la cour a violé l'article 1792-6 du code civil ;
3°/ que la réception partielle n'est pas prohibée par la loi ; qu'en retenant, pour exclure toute réception partielle des travaux de charpente, qu'il «
ne saurait y avoir de réception par lots en l'espèce dans la mesure où les travaux ont fait l'objet d'un seul et même marché », la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et a violé l'article 1792-6 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1792-6 du code civil :
4. Selon ce texte, la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves.
5. Pour dire qu'il n'y a pas eu réception des travaux effectués par la société [...], l'arrêt retient, d'une part, que rien n'établit que les parties étaient convenues d'une réception par tranche de travaux, par dérogation au principe d'unicité de réception, et qu'il n'y a donc pas lieu d'opérer une distinction entre les travaux de charpente et ceux de la couverture, d'autre part, qu'il ne saurait y avoir de réception par lots en l'espèce, dans la mesure où les travaux ont fait l'objet d'un seul et même marché et que c'est donc le même entrepreneur qui a réalisé à la fois la charpente et la couverture en vertu du même devis, la première n'étant d'ailleurs que le support de la seconde.
6. En statuant ainsi, alors que les parties peuvent déroger expressément ou tacitement au principe d'unicité de réception et que la réception partielle par lots n'est pas exclue lorsque plusieurs lots font l'objet d'un seul marché, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Portée et conséquence de la cassation
Vu l'article 624 du code de procédure civile :
7. Selon ce texte, la censure qui s'attache à un arrêt de cassation est limitée à la portée du moyen qui constitue la base de la cassation, sauf le cas d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.
8. La cassation prononcée sur le premier moyen s'étend, par voie de conséquence, aux dispositions ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance, à savoir celles condamnant la société [...] à payer à M. et Mme I... la somme de 2 516 euros au titre des travaux de reprise de la charpente, condamnant M. et Mme I... à rembourser à la société [...] la provision à valoir sur le préjudice de jouissance et disant que la garantie de la société Areas n'est pas mobilisable.
Demande de mise hors de cause
9. La cassation à intervenir sur le chef de l'arrêt disant qu'il n'y a pas eu réception des travaux entraînant celle de la disposition disant que la garantie de la société Areas n'est pas mobilisable, il est nécessaire que cette société soit présente devant la cour d'appel de renvoi.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit qu'il n'y pas eu de réception des travaux, condamne la société [...] à payer à M. et Mme I... la somme de 2 516 euros au titre des travaux de reprise de la charpente, condamne M. et Mme I... à rembourser à la société [...] la provision à valoir sur le préjudice de jouissance et dit que la garantie de la société Areas dommages n'est pas mobilisable, l'arrêt rendu le 11 décembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ;
Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause la société Areas dommages ;
Remet en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne les sociétés Areas dommages et [...] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par les sociétés Areas dommages et [...] et les condamne à payer à M. et Mme I... la somme globale de 3 000 euros ;
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