Cour de cassation - Chambre commerciale
- N° de pourvoi : 19-26.059
- ECLI:FR:CCASS:2022:CO00055
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du mercredi 26 janvier 2022
Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, du 15 octobre 2019Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
DB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 26 janvier 2022
Cassation partielle
Mme DARBOIS, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 55 F-D
Pourvoi n° T 19-26.059
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 26 JANVIER 2022
La société Aéroports de [Localité 4] (ADP), société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° T 19-26.059 contre l'arrêt rendu le 15 octobre 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 4), dans le litige l'opposant à la société La conciergerie [Localité 4] Airports, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Comte, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Aéroports de [Localité 4], de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société La conciergerie [Localité 4] Airports, après débats en l'audience publique du 30 novembre 2021 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Comte, conseiller référendaire rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris,15 octobre 2019), après une consultation qu'elle avait lancée en vue de l'exercice de l'activité de conciergerie sur les aéroports de [5] et d'[Localité 3], la société Aéroports de [Localité 4] (la société ADP) a signé avec la société La conciergerie [Localité 4] Airports (la société La conciergerie), un premier contrat relatif à cette activité au sein de l'aéroport d'[Localité 3] le 15 novembre 2010 et un second pour l'aéroport de [5] le 14 décembre suivant.
2. Ayant rencontré des difficultés financières qu'elle imputait à l'exercice illégitime du service de conciergerie par d'autres sociétés dans les deux aéroports, la société La conciergerie a mis un terme, par lettre du 2 décembre 2013, aux deux contrats avant d'assigner la société ADP, à titre principal, en paiement de dommages-intérêts et, à titre subsidiaire, en annulation des contrats. Celle-ci a formé une demande reconventionnelle en paiement des sommes qu'elle estimait lui être dues au titre de la convention.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche, et sur le second moyen, pris en ses première, deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième branches, ci-après annexés
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en ses première, deuxième, quatrième et cinquième branches
Enoncé du moyen
4. La société ADP fait grief à l'arrêt de dire qu'elle a manqué à ses obligations contractuelles quant à l'exigence de bonne foi dans l'exécution des conventions, et de la condamner au paiement de différentes sommes à titre de dommages-intérêts, au paiement de la somme de 250 420 euros en remboursement du montant des garanties à première demande actionnée par elle et de rejeter ses demandes, alors :
« 1°/ que la cour d'appel a constaté que tant le dossier de consultation que les baux excluaient que la société ADP concède à la société Conciergerie Aéroports de [Localité 4] l'exclusivité de l'activité de conciergerie sans ses terminaux ; qu'elle a ajouté qu'il était constant que les compagnies aériennes offraient elles-mêmes des prestations de conciergerie à leurs passagers ; qu'en retenant, pour considérer que la société ADP n'avait pas exécuté les baux de bonne foi, que des prestataires des compagnies exerçaient une activité concurrente "illégitime", la cour d'appel, sous couvert de bonne foi, a fait peser sur la société ADP une obligation excédant ses engagements contractuels, et a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable ;
2°/ que la circonstance selon laquelle la société ADP s'était engagée à n'autoriser que la société La Conciergerie [Localité 4] Airports à proposer des services de conciergerie dans ses aéroports ne la rendait pas responsable de l'activité irrégulière des prestataires des compagnies aériennes, qui offraient leurs services à des passagers autres que ceux de leur mandataire ; qu'en retenant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
4°/ que le contrat de concession est celui par lequel un commerçant confie à un autre la commercialisation de ses produits sous la condition qu'il respecte un certain nombre d'obligations ; que par contrats de location des 15 novembre et 14 décembre 2010, la société ADP avait mis à disposition de la société La Conciergerie [Localité 4] Airports des emplacements dans les terminaux aéroportuaires d'[Localité 3] et de [5] afin de lui permettre une activité de conciergerie ; que la société n'avait pas ce faisant confié à la société La Conciergerie [Localité 4] Airports une partie de son activité, mais l'avait autorisée, dans ses locaux, à développer une activité nouvelle ; qu'en disant que les baux litigieux constituaient des concessions relevant de l'article L. 330-3 du code de commerce, la cour d'appel a violé ce texte par fausse application ;
5°/ qu'en tout état de cause, de l'article L. 330-3 du code de commerce fait peser sur le concédant une simple obligation pré-contractuelle d'information ; qu'en retenant, pour dire que la société ADP avait exécuté de mauvaise foi le contrat, qu'elle n'avait pas satisfait aux obligations issues de l'article 330-3 du code de commerce, la cour d'appel qui a retenu une faute dans l'exécution du contrat au regard d'un manquement précontractuel a violé l'article 1134 du code civil ensemble l'article 1247 du même code, dans leur rédaction applicable en la cause. »
Réponse de la Cour
5. En premier lieu, après avoir relevé que les compagnies aériennes ont la possibilité de conclure directement avec le prestataire de leur choix des conventions offrant un service de conciergerie d'aéroport et de service d'accueil, d'accompagnement et d'assistance pour les passagers en attente d'un service personnalisé, l'arrêt retient d'abord que si les contrats conclus entre la société ADP et la société La conciergerie excluaient, en conséquence, que la société ADP concédât l'exclusivité de cette activité de prestation de service, il ressort néanmoins de l'ensemble contractuel, comprenant notamment le dossier de consultation établi par la société ADP, que seule une société prestataire serait habilitée pour exercer cette activité, de sorte que la clause litigieuse ne fait pas obstacle à ce que la société choisie par l'appel d'offres soit la seule à disposer d'une autorisation d'exercer ces activités sur l'ensemble de l'aéroport concerné, sans avoir elle-même un lien avec une compagnie aérienne.
6. Il retient ensuite que la société ADP a reconnu que certains des prestataires des compagnies aériennes exerçaient une activité de conciergerie en excédant les limites de leurs autorisations, prospectant la clientèle sur l'ensemble de l'aéroport, que cette société dispose du pouvoir de contrôler la circulation des personnes dans les diverses zones des aéroports dont elle a la gestion et qu'elle ne démontre pas avoir pris des mesures à l'égard de ces prestataires exerçant, dans ces conditions, l'activité de conciergerie entre 2010 et 2013, malgré les demandes de la société La conciergerie.
7. En l'état de ces constatations et appréciations souveraines relatives à la détermination de la commune intention des parties, c'est sans faire peser sur la société ADP une obligation excédant ses engagements, que la cour d'appel a considéré qu'en ne prenant pas les mesures en son pouvoir permettant à sa cocontractante de fournir ses prestations conformément à l'exclusivité, qu'elle lui avait conférée dans les limites relevées, que cette société avait commis un manquement dans l'exécution de bonne foi des contrats.
8. En second lieu, si c'est à tort que la cour d'appel a retenu l'existence d'une obligation pré-contractuelle d'information fondée sur l'application de l'article L. 330-3 du code de commerce, faute d'exclusivité, au sens de ce texte, consentie par la société ADP à la société La conciergerie, elle n'a, toutefois, réparé le préjudice subi par cette société qu'au regard des manquements de la société ADP dans l'exécution de ses obligations contractuelles, par des motifs vainement critiqués par les deux premières branches du moyen.
9. Par conséquent, le moyen, inopérant en ses quatrième et cinquième branches, n'est pas fondé pour le surplus.
Mais sur le second moyen, pris en sa septième branche
Enoncé du moyen
10. La société ADP fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à titre de dommages-intérêts les sommes de 419 879,45 euros, 51 861,45 euros, 67 560 euros, 100 000 euros et 250 420 euros au titre du remboursement du dépôt de garantie, et de rejeter ses demandes, alors « que pour rejeter la demande de paiement des loyers, la cour d'appel a retenu qu'ADP n'avait pas exécuté de bonne foi le bail ; qu'en ne précisant pas en quoi l'exécution prétendument fautive du contrat était en relation avec la créance de loyer, qui avait pour contrepartie la mise à disposition des lieux et la délivrance des autorisations d'accès nécessaires, dont il n'est pas discuté qu'ils ont été fournis à la société La Conciergerie [Localité 4] Airports, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil dans leur rédaction applicable. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1134, alinéa 3, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :
11. Il résulte de ce texte que, sauf cause étrangère, le débiteur d'une obligation contractuelle est tenu de réparer, le cas échéant par le paiement de dommages-intérêts, le préjudice causé à son cocontractant en raison de l'inexécution fautive, ou réputée fautive, de cette obligation.
12. Pour rejeter les demandes en paiement des sommes que la société ADP estimait lui être dues au titre de la convention, l'arrêt retient, après avoir alloué à la société La conciergerie des dommages-intérêts en réparation de l'exécution de mauvaise foi par la société ADP du contrat les liant, que celle-ci a exécuté de mauvaise foi la convention litigieuse, en faisant croire quelques mois après le début d'exécution de ce contrat que les conditions financières seraient modifiées, en maintenant artificiellement la société La conciergerie dans cette relation contractuelle qui ne pouvait que la conduire à l'échec, en faisant une proposition d'avenant au bout de deux années et en laissant s'accroître délibérément la dette de son cocontractant tout en continuant à bénéficier des services de conciergerie et en s'abstenant d'engager des diligences pour faire respecter les limitations d'exercice des autres sociétés de conciergerie.
13. En se déterminant ainsi, alors que l'allocation de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par la victime d'une exécution de mauvaise foi du contrat ne dispense pas celle-ci de l'exécution de ses propres obligations contractuelles, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes formées par la société Aéroports de [Localité 4] et statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 15 octobre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société La conciergerie [Localité 4] Airports aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société La conciergerie [Localité 4] Airports et la condamne à payer à la société Aéroports de [Localité 4] la somme de 3 000 euros ;
COMM.
DB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 26 janvier 2022
Cassation partielle
Mme DARBOIS, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 55 F-D
Pourvoi n° T 19-26.059
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 26 JANVIER 2022
La société Aéroports de [Localité 4] (ADP), société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° T 19-26.059 contre l'arrêt rendu le 15 octobre 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 4), dans le litige l'opposant à la société La conciergerie [Localité 4] Airports, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Comte, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Aéroports de [Localité 4], de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société La conciergerie [Localité 4] Airports, après débats en l'audience publique du 30 novembre 2021 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Comte, conseiller référendaire rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris,15 octobre 2019), après une consultation qu'elle avait lancée en vue de l'exercice de l'activité de conciergerie sur les aéroports de [5] et d'[Localité 3], la société Aéroports de [Localité 4] (la société ADP) a signé avec la société La conciergerie [Localité 4] Airports (la société La conciergerie), un premier contrat relatif à cette activité au sein de l'aéroport d'[Localité 3] le 15 novembre 2010 et un second pour l'aéroport de [5] le 14 décembre suivant.
2. Ayant rencontré des difficultés financières qu'elle imputait à l'exercice illégitime du service de conciergerie par d'autres sociétés dans les deux aéroports, la société La conciergerie a mis un terme, par lettre du 2 décembre 2013, aux deux contrats avant d'assigner la société ADP, à titre principal, en paiement de dommages-intérêts et, à titre subsidiaire, en annulation des contrats. Celle-ci a formé une demande reconventionnelle en paiement des sommes qu'elle estimait lui être dues au titre de la convention.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche, et sur le second moyen, pris en ses première, deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième branches, ci-après annexés
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en ses première, deuxième, quatrième et cinquième branches
Enoncé du moyen
4. La société ADP fait grief à l'arrêt de dire qu'elle a manqué à ses obligations contractuelles quant à l'exigence de bonne foi dans l'exécution des conventions, et de la condamner au paiement de différentes sommes à titre de dommages-intérêts, au paiement de la somme de 250 420 euros en remboursement du montant des garanties à première demande actionnée par elle et de rejeter ses demandes, alors :
« 1°/ que la cour d'appel a constaté que tant le dossier de consultation que les baux excluaient que la société ADP concède à la société Conciergerie Aéroports de [Localité 4] l'exclusivité de l'activité de conciergerie sans ses terminaux ; qu'elle a ajouté qu'il était constant que les compagnies aériennes offraient elles-mêmes des prestations de conciergerie à leurs passagers ; qu'en retenant, pour considérer que la société ADP n'avait pas exécuté les baux de bonne foi, que des prestataires des compagnies exerçaient une activité concurrente "illégitime", la cour d'appel, sous couvert de bonne foi, a fait peser sur la société ADP une obligation excédant ses engagements contractuels, et a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable ;
2°/ que la circonstance selon laquelle la société ADP s'était engagée à n'autoriser que la société La Conciergerie [Localité 4] Airports à proposer des services de conciergerie dans ses aéroports ne la rendait pas responsable de l'activité irrégulière des prestataires des compagnies aériennes, qui offraient leurs services à des passagers autres que ceux de leur mandataire ; qu'en retenant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
4°/ que le contrat de concession est celui par lequel un commerçant confie à un autre la commercialisation de ses produits sous la condition qu'il respecte un certain nombre d'obligations ; que par contrats de location des 15 novembre et 14 décembre 2010, la société ADP avait mis à disposition de la société La Conciergerie [Localité 4] Airports des emplacements dans les terminaux aéroportuaires d'[Localité 3] et de [5] afin de lui permettre une activité de conciergerie ; que la société n'avait pas ce faisant confié à la société La Conciergerie [Localité 4] Airports une partie de son activité, mais l'avait autorisée, dans ses locaux, à développer une activité nouvelle ; qu'en disant que les baux litigieux constituaient des concessions relevant de l'article L. 330-3 du code de commerce, la cour d'appel a violé ce texte par fausse application ;
5°/ qu'en tout état de cause, de l'article L. 330-3 du code de commerce fait peser sur le concédant une simple obligation pré-contractuelle d'information ; qu'en retenant, pour dire que la société ADP avait exécuté de mauvaise foi le contrat, qu'elle n'avait pas satisfait aux obligations issues de l'article 330-3 du code de commerce, la cour d'appel qui a retenu une faute dans l'exécution du contrat au regard d'un manquement précontractuel a violé l'article 1134 du code civil ensemble l'article 1247 du même code, dans leur rédaction applicable en la cause. »
Réponse de la Cour
5. En premier lieu, après avoir relevé que les compagnies aériennes ont la possibilité de conclure directement avec le prestataire de leur choix des conventions offrant un service de conciergerie d'aéroport et de service d'accueil, d'accompagnement et d'assistance pour les passagers en attente d'un service personnalisé, l'arrêt retient d'abord que si les contrats conclus entre la société ADP et la société La conciergerie excluaient, en conséquence, que la société ADP concédât l'exclusivité de cette activité de prestation de service, il ressort néanmoins de l'ensemble contractuel, comprenant notamment le dossier de consultation établi par la société ADP, que seule une société prestataire serait habilitée pour exercer cette activité, de sorte que la clause litigieuse ne fait pas obstacle à ce que la société choisie par l'appel d'offres soit la seule à disposer d'une autorisation d'exercer ces activités sur l'ensemble de l'aéroport concerné, sans avoir elle-même un lien avec une compagnie aérienne.
6. Il retient ensuite que la société ADP a reconnu que certains des prestataires des compagnies aériennes exerçaient une activité de conciergerie en excédant les limites de leurs autorisations, prospectant la clientèle sur l'ensemble de l'aéroport, que cette société dispose du pouvoir de contrôler la circulation des personnes dans les diverses zones des aéroports dont elle a la gestion et qu'elle ne démontre pas avoir pris des mesures à l'égard de ces prestataires exerçant, dans ces conditions, l'activité de conciergerie entre 2010 et 2013, malgré les demandes de la société La conciergerie.
7. En l'état de ces constatations et appréciations souveraines relatives à la détermination de la commune intention des parties, c'est sans faire peser sur la société ADP une obligation excédant ses engagements, que la cour d'appel a considéré qu'en ne prenant pas les mesures en son pouvoir permettant à sa cocontractante de fournir ses prestations conformément à l'exclusivité, qu'elle lui avait conférée dans les limites relevées, que cette société avait commis un manquement dans l'exécution de bonne foi des contrats.
8. En second lieu, si c'est à tort que la cour d'appel a retenu l'existence d'une obligation pré-contractuelle d'information fondée sur l'application de l'article L. 330-3 du code de commerce, faute d'exclusivité, au sens de ce texte, consentie par la société ADP à la société La conciergerie, elle n'a, toutefois, réparé le préjudice subi par cette société qu'au regard des manquements de la société ADP dans l'exécution de ses obligations contractuelles, par des motifs vainement critiqués par les deux premières branches du moyen.
9. Par conséquent, le moyen, inopérant en ses quatrième et cinquième branches, n'est pas fondé pour le surplus.
Mais sur le second moyen, pris en sa septième branche
Enoncé du moyen
10. La société ADP fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à titre de dommages-intérêts les sommes de 419 879,45 euros, 51 861,45 euros, 67 560 euros, 100 000 euros et 250 420 euros au titre du remboursement du dépôt de garantie, et de rejeter ses demandes, alors « que pour rejeter la demande de paiement des loyers, la cour d'appel a retenu qu'ADP n'avait pas exécuté de bonne foi le bail ; qu'en ne précisant pas en quoi l'exécution prétendument fautive du contrat était en relation avec la créance de loyer, qui avait pour contrepartie la mise à disposition des lieux et la délivrance des autorisations d'accès nécessaires, dont il n'est pas discuté qu'ils ont été fournis à la société La Conciergerie [Localité 4] Airports, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil dans leur rédaction applicable. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1134, alinéa 3, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :
11. Il résulte de ce texte que, sauf cause étrangère, le débiteur d'une obligation contractuelle est tenu de réparer, le cas échéant par le paiement de dommages-intérêts, le préjudice causé à son cocontractant en raison de l'inexécution fautive, ou réputée fautive, de cette obligation.
12. Pour rejeter les demandes en paiement des sommes que la société ADP estimait lui être dues au titre de la convention, l'arrêt retient, après avoir alloué à la société La conciergerie des dommages-intérêts en réparation de l'exécution de mauvaise foi par la société ADP du contrat les liant, que celle-ci a exécuté de mauvaise foi la convention litigieuse, en faisant croire quelques mois après le début d'exécution de ce contrat que les conditions financières seraient modifiées, en maintenant artificiellement la société La conciergerie dans cette relation contractuelle qui ne pouvait que la conduire à l'échec, en faisant une proposition d'avenant au bout de deux années et en laissant s'accroître délibérément la dette de son cocontractant tout en continuant à bénéficier des services de conciergerie et en s'abstenant d'engager des diligences pour faire respecter les limitations d'exercice des autres sociétés de conciergerie.
13. En se déterminant ainsi, alors que l'allocation de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par la victime d'une exécution de mauvaise foi du contrat ne dispense pas celle-ci de l'exécution de ses propres obligations contractuelles, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes formées par la société Aéroports de [Localité 4] et statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 15 octobre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société La conciergerie [Localité 4] Airports aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société La conciergerie [Localité 4] Airports et la condamne à payer à la société Aéroports de [Localité 4] la somme de 3 000 euros ;
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