mardi 15 février 2022

L'obligation faite au juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 9 février 2022




Cassation


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 151 F-D

Pourvoi n° W 20-12.473




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 FÉVRIER 2022

1°/ la société Lotus, société civile immobilière,

2°/ la société Marina Lotus, société civile immobilière,

ayant toutes deux leur siège [Adresse 3],

ont formé le pourvoi n° W 20-12.473 contre l'arrêt rendu le 7 novembre 2019 par la cour d'appel de Papeete (chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à l'association syndicale libre Le Lotus, dont le siège est [Adresse 5],

2°/ à M. [Z] [T], domicilié [Adresse 4], pris en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Le Lotus,

défendeurs à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Echappé, conseiller doyen, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat des sociétés Lotus et Marina Lotus, de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de M. [T], ès qualités, après débats en l'audience publique du 4 janvier 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Echappé, conseiller doyen rapporteur, Mme Andrich, conseiller, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Papeete, 7 novembre 2019), par acte du 1er octobre 1975, la société civile particulière de promotion immobilière Le Lotus (la société Le Lotus) a fait l'objet d'une dissolution-partage décidée par ses associées, les sociétés civiles immobilières Marina lotus (la SCI Marina lotus), Lotus (la SCI Lotus) et Les Hauts de Papearia (la SCI Les Hauts).

2. En 1996, un bail a été consenti à la société Télévision de France (la société TDF) ayant pour objet une parcelle dépendant de l'ensemble immobilier dont était titulaire la société Le Lotus.

3. Par actes des 2 et 18 février 2016, les SCI Lotus et Marina Lotus ont assigné M. [T], désigné en qualité de liquidateur de la société Le Lotus, en remboursement des loyers que la société TDF lui avait versés directement.

4. M. [T], ès qualités, a demandé reconventionnellement la restitution des loyers versés par la société TDF à la SCI Marina lotus de 2002 à 2010 et a appelé en intervention forcée l'association syndicale Libre Le Lotus. Celle-ci a demandé l'attribution de la voirie, des réseaux et des espaces communs.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. Les SCI Lotus et Marina lotus font grief à l'arrêt de rejeter leur demande de remboursement des loyers versés par la société TDF à M. [T], ès qualités, de condamner la SCI Marina lotus à rembourser à M. [T], ès qualités, les sommes perçues de 2002 à 2010 au titre des loyers dus par la société TDF et de s'être déclaré incompétent pour connaître de la demande de transfert à l'association syndicale libre du Lotus, l'intégralité de la voirie, des réseaux et des espaces communs détenus par la société en liquidation « SCI Le Lotus », y compris, mais non exclusivement la parcelle donnée à bail, alors « que le juge a l'interdiction de dénaturer l'acte qui lui est soumis ; que l'acte du 1er octobre 1975 intitulé « dissolution et partage de la société Le Lotus »stipulait que les parties avaient décidé de « dissoudre la société Le Lotus à compter de ce jour » « et d'en partager immédiatement entre les associées tout l'actif et le passif » et organisait sur 21 pages ce partage et cette dissolution ; qu'en retenant, pour débouter les sociétés Lotus et Marina Lotus de leurs demandes, « qu'il ressort[ait] de l'acte authentique du 1er octobre 1975 que les actionnaires de la société anonyme, entreprise de promotion immobilière dénommée « société Lotus » avaient décidé la transformation de la société anonyme en société civile, la nouvelle société conservant la dénomination de société Le Lotus (SCS Le Lotus) et le même siège social, et ont procédé le 1er octobre 1975 à la radiation de l'entreprise au registre du commerce » , tandis que cet acte se bornait à prévoir la dissolution, et en aucun cas la transformation, de la société Le Lotus, la cour d'appel a dénaturé l'acte du 1er octobre 1975. »

Réponse de la Cour

Vu l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

6. Pour écarter l'élément de preuve produit par les SCI Lotus et Marina lotus au soutien de leur revendication de propriété de la parcelle donnée à bail à la société TDF, l'arrêt retient qu'il ressort de l'acte authentique du 1eroctobre 1975 que les actionnaires de la société anonyme, entreprise de promotion immobilière dénommée « société Lotus », à savoir les SCI Marina lotus, Lotus et Les Hauts, ont décidé la transformation de la société anonyme en société civile, la nouvelle société conservant la dénomination de « Société Le Lotus » (SCS Le Lotus), et le même siège social, et ont procédé, le 1er octobre 1975, à la radiation de l'entreprise au registre du commerce et des sociétés.

7. En statuant ainsi, alors que cet acte, régulièrement publié sur les registres du service chargé de la publicité foncière, se bornait à décider la dissolution de la société Le Lotus et le partage de l'actif immobilier de cette société au profit de ses associées, dont les SCI Lotus et Marina lotus, bénéficiaires à ce titre des attributions déterminées à concurrence de leurs participations respectives au capital social, la cour d'appel a violé le principe susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 novembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Papeete ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Papeete autrement composée ;

Condamne M. [T], pris en sa qualité de liquidateur judiciaire, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [T], pris en sa qualité de liquidateur judiciaire, et le condamne à payer aux sociétés civiles immobilières Lotus et Marina lotus la somme globale de 3 000 euros.

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