Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 21-10.205
- ECLI:FR:CCASS:2022:C300129
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du mercredi 02 février 2022
Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, du 29 septembre 2020Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 2 février 2022
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 129 FS-D
Pourvoi n° B 21-10.205
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 FÉVRIER 2022
La société Lagrange patrimoine conseil, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° B 21-10.205 contre l'arrêt rendu le 29 septembre 2020 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [P] [U],
2°/ à Mme [N] [Z], épouse [U],
domiciliés tous deux [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Maunand, conseiller doyen, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société Lagrange patrimoine conseil, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. et Mme [U], et l'avis de M. Brun, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 décembre 2021 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Maunand, conseiller doyen rapporteur, M. Nivôse, Mme Greff-Bohnert, MM. Jacques, Bech, Boyer, Mme Abgrall, conseillers, Mme Djikpa, M. Zedda, Mme Brun, conseillers référendaires, M. Brun, avocat général, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 29 septembre 2020), M. et Mme [U] ont acquis, par l'intermédiaire de la société Lagrange patrimoine conseil (la société Lagrange), selon un contrat de réservation du 31 octobre 2006 suivi d'un acte authentique du 28 juin 2007, un appartement en l'état futur d'achèvement dans un immeuble à vocation de résidence de tourisme, à titre d'investissement immobilier locatif défiscalisé et avec l'aide d'un prêt.
2. Ils ont conclu avec la société Soderev tour résidences, chargée de l'exploitation de la résidence, un bail commercial pour une durée de neuf ans moyennant un loyer annuel de 7 636 euros hors taxes.
3. A la suite de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde au profit de cette société, un avenant au bail a été conclu à effet du 1er avril 2013, avec un loyer annuel ramené à 4 052 euros.
4. M. et Mme [U] ont assigné la société Lagrange, pour manquement à son obligation d'information et de conseil, en paiement de la différence entre le montant du bail initial et celui de l'avenant pour la période allant du 1er avril 2013 à la fin du bail commercial.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa seconde branche, ci-après annexé
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen
6. La société Lagrange fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande de M. et Mme [U], alors « que les conséquences d'un manquement à un devoir d'information et de conseil s'analysent en une perte de chance dès lors qu'il n'est pas certain que mieux informé, le créancier de l'obligation d'information se serait trouvé dans une situation plus avantageuse ; que de plus, tout placement financier comporte une part d'aléa ; qu'ainsi, à un double titre, les conséquences d'un manquement de l'intermédiaire proposant une opération d'investissement locatif dans le cadre d'un régime de défiscalisation à une obligation précontractuelle d'information s'analysent en une perte de chance ; que le préjudice subi est constitué par la perte de la chance de ne pas contracter ou de contracter à des conditions plus avantageuses et non par celle d'obtenir les gains attendus ; qu'en affirmant qu'exactement informés sur les risques de l'opération, les investisseurs n'y auraient pas souscrit, pour en déduire que le préjudice matériel que leur avait causé la faute de la société Lagrange Patrimoine Conseil, intermédiaire ayant manqué à son obligation d'information et de conseil, était égal à la différence entre les sommes qu'ils auraient perçues durant neuf ans si le loyer initialement prévu avait été maintenu et les loyers qu'ils ont effectivement perçus après la déconfiture de l'exploitant de la résidence de tourisme, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil. »
Réponse de la Cour
7. La cour d'appel, par motifs propres et adoptés, a relevé que les informations fournies aux futurs acquéreurs présentaient le projet comme dénué de tout risque, avec la sécurité de loyers garantis pendant une durée irrévocable de neuf ans, sans comporter la moindre réserve sur les risques liés à l'éventuelle défaillance du preneur à bail.
8. Elle en a souverainement déduit que la sécurité de l'opération avait été déterminante de leur consentement et que, s'ils avaient été informés du risque de non-perception des loyers en cas de déconfiture du preneur à bail, ils auraient refusé de souscrire à l'investissement, ce dont il résultait une absence d'aléa.
9. Ayant ainsi exclu toute incertitude sur la décision des acquéreurs s'ils avaient été dûment informés des aléas et risques éventuels de l'opération d'investissement immobilier proposée, elle en a exactement déduit que le préjudice causé par le manquement de la société Lagrange à son devoir d'information et de conseil ne pouvait consister en une perte de chance de ne pas contracter ou de contracter à des conditions plus avantageuses et correspondait à l'intégralité de la perte de loyers subie.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Lagrange patrimoine conseil aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Lagrange patrimoine conseil et la condamne à payer à M. et Mme [U] la somme globale de 300 euros ;
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 2 février 2022
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 129 FS-D
Pourvoi n° B 21-10.205
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 FÉVRIER 2022
La société Lagrange patrimoine conseil, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° B 21-10.205 contre l'arrêt rendu le 29 septembre 2020 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [P] [U],
2°/ à Mme [N] [Z], épouse [U],
domiciliés tous deux [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Maunand, conseiller doyen, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société Lagrange patrimoine conseil, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. et Mme [U], et l'avis de M. Brun, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 décembre 2021 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Maunand, conseiller doyen rapporteur, M. Nivôse, Mme Greff-Bohnert, MM. Jacques, Bech, Boyer, Mme Abgrall, conseillers, Mme Djikpa, M. Zedda, Mme Brun, conseillers référendaires, M. Brun, avocat général, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 29 septembre 2020), M. et Mme [U] ont acquis, par l'intermédiaire de la société Lagrange patrimoine conseil (la société Lagrange), selon un contrat de réservation du 31 octobre 2006 suivi d'un acte authentique du 28 juin 2007, un appartement en l'état futur d'achèvement dans un immeuble à vocation de résidence de tourisme, à titre d'investissement immobilier locatif défiscalisé et avec l'aide d'un prêt.
2. Ils ont conclu avec la société Soderev tour résidences, chargée de l'exploitation de la résidence, un bail commercial pour une durée de neuf ans moyennant un loyer annuel de 7 636 euros hors taxes.
3. A la suite de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde au profit de cette société, un avenant au bail a été conclu à effet du 1er avril 2013, avec un loyer annuel ramené à 4 052 euros.
4. M. et Mme [U] ont assigné la société Lagrange, pour manquement à son obligation d'information et de conseil, en paiement de la différence entre le montant du bail initial et celui de l'avenant pour la période allant du 1er avril 2013 à la fin du bail commercial.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa seconde branche, ci-après annexé
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen
6. La société Lagrange fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande de M. et Mme [U], alors « que les conséquences d'un manquement à un devoir d'information et de conseil s'analysent en une perte de chance dès lors qu'il n'est pas certain que mieux informé, le créancier de l'obligation d'information se serait trouvé dans une situation plus avantageuse ; que de plus, tout placement financier comporte une part d'aléa ; qu'ainsi, à un double titre, les conséquences d'un manquement de l'intermédiaire proposant une opération d'investissement locatif dans le cadre d'un régime de défiscalisation à une obligation précontractuelle d'information s'analysent en une perte de chance ; que le préjudice subi est constitué par la perte de la chance de ne pas contracter ou de contracter à des conditions plus avantageuses et non par celle d'obtenir les gains attendus ; qu'en affirmant qu'exactement informés sur les risques de l'opération, les investisseurs n'y auraient pas souscrit, pour en déduire que le préjudice matériel que leur avait causé la faute de la société Lagrange Patrimoine Conseil, intermédiaire ayant manqué à son obligation d'information et de conseil, était égal à la différence entre les sommes qu'ils auraient perçues durant neuf ans si le loyer initialement prévu avait été maintenu et les loyers qu'ils ont effectivement perçus après la déconfiture de l'exploitant de la résidence de tourisme, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil. »
Réponse de la Cour
7. La cour d'appel, par motifs propres et adoptés, a relevé que les informations fournies aux futurs acquéreurs présentaient le projet comme dénué de tout risque, avec la sécurité de loyers garantis pendant une durée irrévocable de neuf ans, sans comporter la moindre réserve sur les risques liés à l'éventuelle défaillance du preneur à bail.
8. Elle en a souverainement déduit que la sécurité de l'opération avait été déterminante de leur consentement et que, s'ils avaient été informés du risque de non-perception des loyers en cas de déconfiture du preneur à bail, ils auraient refusé de souscrire à l'investissement, ce dont il résultait une absence d'aléa.
9. Ayant ainsi exclu toute incertitude sur la décision des acquéreurs s'ils avaient été dûment informés des aléas et risques éventuels de l'opération d'investissement immobilier proposée, elle en a exactement déduit que le préjudice causé par le manquement de la société Lagrange à son devoir d'information et de conseil ne pouvait consister en une perte de chance de ne pas contracter ou de contracter à des conditions plus avantageuses et correspondait à l'intégralité de la perte de loyers subie.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Lagrange patrimoine conseil aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Lagrange patrimoine conseil et la condamne à payer à M. et Mme [U] la somme globale de 300 euros ;
Aucun commentaire :
Enregistrer un commentaire
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.