vendredi 4 février 2022

Le juge doit statuer sur les dernières conclusions déposées

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 26 janvier 2022




Cassation


Mme DARBOIS, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 69 F-D

Pourvoi n° R 19-21.710








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 26 JANVIER 2022

La société Horizonsat FZ LLC, société de droit dubaiotte, dont le siège est [Adresse 2] (Émirats arabes unis), a formé le pourvoi n° R 19-21.710 contre l'arrêt rendu le 7 juin 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 11), dans le litige l'opposant à la société Eutelsat, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], société de droit français, défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bellino, conseiller référendaire, les observations de la SARL Corlay, avocat de la société Horizonsat FZ LLC, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Eutelsat, après débats en l'audience publique du 30 novembre 2021 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bellino, conseiller référendaire rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 juin 2019), par courriel du 7 février 2014, la société Eutelsat, qui commercialise de la capacité satellitaire aux télédiffuseurs et opérateurs de bouquets de télévision, a proposé à la société Horizonsat, société fournissant des services satellitaires, à sa demande, une offre de capacité satellitaire, au profit de l'Islamic Republic of Iran Broadcasting (l'IRIB), organisme de télédiffusion, pour une durée de 10 ans. La société Horizonsat a fait part de son accord et confirmé à l'IRIB la réservation de capacité auprès de la société Eutelsat.

2. Le 13 février 2014, la société Eutelsat a fait une proposition de capacité satellitaire directement à l'IRIB.

3. Le 28 mars 2014, la société Eutelsat a confirmé à la société Horizonsat avoir transmis directement à l'IRIB une offre de capacité concurrente mais être prête à traiter avec la société Horizonsat comme intermédiaire si celle-ci acceptait ses conditions générales. L'IRIB n'a toutefois pas souhaité donner suite au projet de contrat tripartite et a conclu directement avec la société Eutelsat.

4. La société Horizonsat, estimant que la société Eutelsat n'avait pas respecté ses obligations, l'a assignée en paiement de dommages-intérêts.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. La société Horizonsat fait grief à l'arrêt de constater l'absence de formation d'un contrat avec la société Eutelsat le 7 février 2014 et de rejeter en conséquence une partie de ses demandes de dommages-intérêts, alors « que le juge doit statuer sur les dernières conclusions déposées ; qu'en l'espèce il était fait valoir un moyen nouveau dans les dernières conclusions signifiées par le RPVA en date du 12 mars 2019, aux termes duquel il était demandé "A titre subsidiaire, si la Cour devait estimer qu'aucun contrat de location de capacité satellitaire n'a été conclu le 7 février 2014, à tout le moins : - Constater qu'un contrat de réservation de capacité satellitaire a été valablement conclu entre les sociétés Eutelsat et Horizonsat dès le 7 février 2014 ; - Constater la résiliation unilatérale subséquente et sans droit par la société Eutelsat du contrat conclu entre les sociétés Eutelsat et Horizonsat - Dire que la société Eutelsat a commis une faute contractuelle à l'égard de la société Horizonsat ; En conséquence, - Condamner la société Eutelsat à payer à la société Horizonsat la somme de 10 000 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice subi du fait du manque à gagner occasionné ; - Condamner la société Eutelsat à payer à la société Horizonsat la somme de 10 000 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice d'image" ; qu'en l'espèce, quoique visant formellement ces dernières conclusions, la cour d'appel a repris le dispositif figurant dans les conditions précédentes du 20 novembre 2017 et en conséquence n'a pas rappelé ce moyen et n'y a pas répondu, ce dont il s'infère qu'elle n'a pas statué au regard des dernières conclusions ; que ce faisant, la cour d'appel a violé les articles 455 et 954, alinéa 3, du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 455, alinéa 1er, et 954, alinéa 3, du code de procédure civile :

6. Il résulte de ces textes que .

7. Pour constater l'absence de formation d'un contrat, dire que la société Eutelsat a rompu fautivement les négociations, la condamner à payer à la société Horizonsat la somme de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts et débouter les parties de leurs plus amples prétentions, l'arrêt vise les conclusions signifiées par la société Horizonsat le 12 mars 2019 par lesquelles elle sollicite de la cour « A titre principal : constater la formation du contrat entre les sociétés Eutelsat et Horizonsat dès le 7 février 2014 ; [...]
à titre subsidiaire, si par extraordinaire la Cour devait estimer qu'aucun contrat n'a été conclu entre les parties, constater qu'une promesse synallagmatique de bail a été conclue entre Eutelsat et Horizonsat [...] ; à titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la cour d'appel de Paris devait estimer qu'aucune promesse synallagmatique de bail n'a été consentie, constater que la société Eutelsat a mis fin de matière brutale et abusive aux pourparlers entrepris avec la société Horizonsat ».

8. En statuant ainsi, alors que le dispositif des conclusions reproduit par la cour d'appel ne correspondait pas aux dernières conclusions signifiées par la société Horizonsat le 12 mars 2019, mais à des conclusions antérieures, la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs dont il ne résulte pas qu'elle ait pris en considération ces dernières conclusions, a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Eutelsat aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Eutelsat et la condamne à payer à la société Horizonsat la somme de 3 000 euros ;

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