mardi 29 novembre 2022

Assurance "catastrophes naturelles et prescriptions (biennale ou décennale)

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 novembre 2022




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 791 F-D


Pourvois n°
M 20-20.606
B 21-17.266 JONCTION



Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de Mme [Z].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 31 mars 2021.




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 NOVEMBRE 2022

M. [P] [H], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° M 20-20.606 contre un arrêt rendu le 23 juillet 2020 par la cour d'appel de Nîmes (2e chambre, section A), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Mutuelle des architectes français (MAF), dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à Mme [K] [Z], domiciliée [Adresse 4], 3°/ à la société Garantie mutuelle des fonctionnaires (GMF) assurances, dont le siège est [Adresse 1],

défenderesses à la cassation.

Mme [K] [Z], a formé le pourvoi n° B 21-17.266 contre le même arrêt rendu, dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Mutuelle des architectes français (MAF),

2°/ à la société GMF assurances, société anonyme,

3°/ à M. [P] [H],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur au pourvoi n° M 20-20.606 invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi n° B 21-17.266 invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation également annexés au présent.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Brun, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boullez, avocat de Mme [Z], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [H], de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société Mutuelle des architectes français, après débats en l'audience publique du 4 octobre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Brun, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° B 21-17.266 et n° M 20-20.606 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 23 juillet 2020), Mme [Z] et M. [H], propriétaires d'une maison d'habitation, se plaignant d'une fissuration généralisée consécutive à une période de sécheresse survenue en 1998 reconnue comme catastrophe naturelle, ont déclaré le sinistre à leur assureur, la société Garantie mutuelle des fonctionnaires (la société GMF).

3. Des travaux confortatifs ont été exécutés en 2000, financés par la société GMF, réceptionnés le 24 novembre 2000.

4. Pour la réalisation de ces travaux, les sociétés Tercelin et Sartiges sont intervenues, toutes deux assurées auprès de la société Mutuelle des architectes français (la société MAF).

5. Après deux nouveaux épisodes de sécheresse courant 2003 puis 2008, de nouvelles fissures généralisées sont apparues donnant lieu à deux déclarations de sinistre faites par M. [H] auprès de la société GMF, laquelle a dénoncé les sinistres à la société MAF.

6. Après l'échec d'une procédure amiable d'indemnisation auprès de la société GMF, Mme [Z] a obtenu, le 15 juin 2011, la désignation d'un expert judiciaire au contradictoire de cet assureur et de M. [H]. La société GMF a mis en cause les sociétés Tercelin, Sartiges et la société MAF par acte du 29 février 2012, de sorte que l'expertise a été déclarée commune et opposable à ceux-ci.

7. A la suite du dépôt du rapport d'expertise, Mme [Z] a assigné, au fond, les sociétés GMF et MAF, ainsi que M. [H] aux fins d'indemnisation par les assureurs.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche, et sur le second moyen du pourvoi de M. [H], sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche, et sur le troisième moyen du pourvoi de Mme [Z], ci-après annexés

8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs, la quatrième branche du troisième moyen de Mme [Z] étant irrecevable et les autres griefs n'étant manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi de M. [H], sur le premier moyen et sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi de Mme [Z], réunis Enoncé des moyens

9. Par son premier moyen, M. [H] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables comme prescrites ses demandes formées contre la société MAF, alors « que les causes d'interruption de l'article L. 114-2 du code des assurances sont applicables à l'action directe de la victime fondée sur le contrat d'assurance ; qu'en l'espèce, M. [H] se prévalait de ce que la société MAF avait diligenté une expertise aux mois de juillet et octobre 2008 à la suite de la réapparition de fissures postérieurement aux travaux de reprise réceptionnés le 24 novembre 2000, et que cette désignation d'un expert par l'assureur constituait une cause interruptive de prescription de l'action ; qu'en décidant, pour déclarer prescrites les demandes de M. [H] contre la société MAF, que les modes d'interruption propres aux actions fondées sur le contrat d'assurance n'étaient pas applicables à l'action directe de la victime fondée sur l'article 1792 du code civil, la cour d'appel a violé l'article L. 114-2 du code des assurances. »

10. Par son deuxième moyen, Mme [Z] fait le même grief à l'arrêt, alors « que les causes d'interruption de l'article L. 114-2 du code des assurances sont applicables à l'action directe de la victime fondée sur le contrat d'assurance ; qu'en l'espèce, Mme [Z] se prévalait de ce que la MAF avait diligenté une expertise aux mois de juillet et octobre 2008 à la suite de la réapparition de fissures postérieurement aux travaux de reprise réceptionnés le 24 novembre 2000, et que cette désignation d'un expert par l'assureur constituait une cause interruptive de prescription de l'action ; qu'en décidant, pour déclarer prescrites les demandes de Mme [Z] contre la MAF, que les modes d'interruption propres aux actions fondées sur le contrat d'assurance n'étaient pas applicables à l'action directe de la victime fondée sur l'article 1792 du code civil, la cour d'appel a violé l'article L. 114-2 du code des assurances. »

11. Par son premier moyen, Mme [Z] fait le même grief à l'arrêt, alors « que si l'interruption du délai décennal par la délivrance d'une assignation en référé-expertise ne profite qu'à celui qui agit en justice, l'effet interruptif est étendu à toutes les parties en litige s'il est apporté une modification quelconque à la mission d'expertise précédemment ordonnée, y compris à celles appelées uniquement à la procédure initiale ; qu'il résulte des constatations auxquelles la juridiction du second degré a procédé que Mme [Z] a fait assigner la GMF et M. [H] devant le juge des référés du tribunal de grande instance d'Avignon aux fins de désignation d'un expert, que la GMF a appelé en garantie la société BET Tercelin, l'entreprise Bertrand de Sartiges et la MAF par assignation du 29 février 2012 et que le juge des référés du tribunal de grande instance d'Avignon, par ordonnance du 21 mars 2012, a déclaré la mesure d'expertise commune et opposable aux nouveaux intervenants ; qu'en décidant que l'assignation délivrée par la GMF n'a pas interrompu le cours du délai imparti à Mme [Z] pour agir en justice, après avoir rappelé que le bénéfice de l'effet interruptif est réservé à celui qui diligente l'action, quand l'expertise initiale avait été déclarée commune à l'égard de toutes les parties, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article 2241 du code civil. »

Réponse de la Cour

12. La cour d'appel a énoncé, à bon droit, que l'action directe de la victime contre l'assureur de responsabilité, trouvant son fondement dans le droit de la victime à réparation de son préjudice, se prescrivait par le même délai que son action contre le responsable, soit dix ans à compter de la réception, et pouvait être exercée contre l'assureur tant que celui-ci restait exposé au recours de son assuré, soit dans les deux ans de l'article L. 114-1 du code des assurances suivant la réclamation au fond de la victime auprès de l'assuré.

13. Ayant également retenu, à bon droit, que ce délai pour agir dont disposait la victime contre l'assureur du responsable était distinct du délai biennal de l'article L. 114-1 du code des assurances régissant les seules actions dérivant du contrat d'assurance, elle en a exactement déduit, d'une part, que M. [H] et Mme [Z] ne pouvaient se prévaloir des causes d'interruption de la prescription prévues à l'article L. 114-2 du code des assurances, et, d'autre part, constatant que l'assignation de Mme [Z] contre la société MAF était postérieure à l'expiration du délai de garantie décennale et que M. [H] ne justifiait d'aucune cause d'interruption de prescription, que leur action directe était prescrite.

14. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Condamne M. [H] et Mme [Z] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

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