mardi 29 novembre 2022

Conditions de "rabat" d'un arrêt de la Cour de cassation

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

SG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 novembre 2022




Rejet de la requête en rabat d'arrêt


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 795 F-D

Pourvoi n° U 20-22.315






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 NOVEMBRE 2022

La troisième chambre civile de la Cour de cassation se saisit d'office en vue du rabat de son arrêt n° 304 F-D rendu le 6 avril 2022 sur le pourvoi n° U 20-22.315 en cassation d'un arrêt rendu le 29 octobre 2020 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile A).

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Jacques, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme [R], MM. [Z], [C], [E], [V] et la SCI Alpine, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Tholos de Costebelle, après débats en l'audience publique du 4 octobre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Jacques, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

La troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Vu la requête en rabat d'arrêt du 18 mai 2022 ;

Vu l'avis de l'avocat général ;

Vu les observations en défense à requête en rabat d'arrêt du 8 juin 2022 ;

1. Par arrêt du 6 avril 2022 (3e Civ., 6 avril 2022, pourvoi n° 20-22.315), la troisième chambre civile a cassé sans renvoi l'arrêt rendu le 29 octobre 2020 par la cour d'appel de Lyon dans un litige opposant MM. [Z], [C], [E], [V], Mme [R] et la société Alpine à la société civile immobilière Tholos de Costebelle (la SCI).

2. Par requête du 18 mai 2022, la SCI a sollicité le rabat de l'arrêt.

3. La SCI soutient, en premier lieu, que la Cour de cassation n'aurait pas motivé sa décision et n'aurait répondu ni à son mémoire en défense déposé le 28 mai 2021, ni à ses observations, non visées par l'arrêt, formulées le 7 janvier 2022 puis le 15 février suivant lorsqu'elle a été rendue destinataire de l'avis indiquant qu'il était envisagé de statuer au fond sans renvoi. Selon la SCI, la Cour de cassation aurait dû ainsi indiquer en quoi la provision pour grosses réparations et la cession des parts sociales du 27 décembre 2006 auraient été entachées de fraude et répondre, s'agissant des sommes susceptibles d'être dues aux cédants, à ses observations dans lesquelles elle faisait notamment valoir que l'expert avait fait état de plusieurs possibilités, dont une exclusion seulement partielle de la provision, que la prétendue plus-value dégagée était temporaire, que les travaux objet de la provision avaient été acceptés par les candidats acquéreurs, qu'ils étaient justifiés par l'état du bâtiment et les termes du bail, que les précédents associés avaient refusé de les entreprendre, que les travaux qui avaient dû être effectués en 2013 correspondaient pour partie au devis justifiant la provision et avaient été facturés à la SCI et que le constat de la société AFC ingénierie venait corroborer l'ampleur des travaux à réaliser et le bien-fondé de la provision.

4. Cependant, les observations prétendument ignorées, déposées antérieurement à l'audience qui s'est tenue le 1er mars 2022, ont nécessairement été examinées par la formation de jugement.

5. En outre, la requête, en ce qu'elle tend à remettre en cause la décision de la Cour de cassation en critiquant sa motivation, sans invoquer d'erreur de procédure, ne donne pas ouverture à rabat d'arrêt. En toute hypothèse, la Cour de cassation a motivé sa décision en adoptant les conclusions principales de l'expert judiciaire quant à l'absence de justification de la provision pour grosses réparations et en retenant son caractère frauduleux et a ainsi nécessairement répondu, en les écartant, aux observations prétendument délaissées.




6. La SCI, invoque, en second lieu, une erreur d'analyse relativement aux intérêts puisque les sommes dues en principal ont été payées le 27 avril 2017, à la suite du premier arrêt la condamnant, rendu par la cour d'appel de Grenoble le 4 avril 2007, et lui ont été restituées en 2020/2021, à la suite du premier arrêt de la Cour de cassation, rendu le 7 novembre 2019, de sorte que les sommes en cause étaient en possession des cédants entre 2017 et 2020/2021, ce dont il se déduit que le paiement ainsi intervenu a interrompu le cours des intérêts. Les intérêts courus durant cette période ayant été mis à la charge de la SCI, l'arrêt de la Cour de cassation serait ainsi entaché d'une erreur matérielle ayant affecté la solution qui a été mise en oeuvre et justifiant de le rabattre au moins en ce qu'il condamne la SCI au paiement des sommes précitées « avec intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2011 ».

7. Toutefois, le rabat de la décision ne peut intervenir que dans l'hypothèse où une erreur imputable à la Cour de cassation a conduit celle-ci à rendre un arrêt dans l'ignorance d'un élément de procédure de nature à influer substantiellement sur sa décision. MM. [Z], [C], [E], [V], Mme [R] et la société Alpine ayant, dans leurs observations du 11 janvier 2022, demandé à la Cour de cassation de fixer le point de départ des intérêts moratoires et d'ordonner leur capitalisation, la SCI qui, alors qu'elle avait la possibilité d'y répondre dans ses observations complémentaires, n'a pas soutenu que les intérêts ne pouvaient être mis à sa charge entre 2017 et 2020/2021, ne peut se prévaloir d'une erreur imputable à la Cour de cassation.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE la requête ;

DIT n'y avoir lieu à rabat de l'arrêt n° 304 F-D du 6 avril 2022 ;

Condamne la société civile immobilière Tholos de Costebelle aux dépens ;

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