jeudi 8 juin 2023

Acte d'appel et effet dévolutif

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 17 mai 2023




Rejet


Mme MARTINEL, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 469 F-D

Pourvoi n° N 21-17.621




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 17 MAI 2023

M. [R] [J], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 21-17.621 contre l'arrêt rendu le 8 décembre 2020 par la cour d'appel de Fort-de-France (chambre civile), dans le litige l'opposant à la Société immobilière de la Martinique (Simar), dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Vendryes, conseiller, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de M. [J], de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la Société immobilière de la Martinique (Simar), et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 mars 2023 où étaient présentes Mme Martinel, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Vendryes, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. M. [J] a interjeté appel le 8 juin 2018 du jugement d'un tribunal de grande instance, rendu dans un litige l'opposant à la Société immobilière de la Martinique (la société Simar).

2. La société Simar a soulevé l'absence d'effet dévolutif, faute pour la déclaration d'appel qui lui a été adressée de mentionner les chefs critiqués du jugement.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. M. [J] fait grief à l'arrêt de déclarer son appel dépourvu d'effet dévolutif et, en conséquence, de constater que la cour d'appel n'était saisie d'aucune demande, alors :

« 1°/ qu'aucun texte ni aucun principe n'exclut la faculté, pour l'appelant, d'introduire son appel par une déclaration d'appel à laquelle est jointe une annexe comportant l'énoncé des chefs du jugement critiqués auxquels l'appel est limité ; qu'en jugeant cependant que seul l'acte d'appel opérait la dévolution des chefs critiqués du jugement et qu'à défaut d'établir que la déclaration d'appel avait dépassé sa taille maximale de 4 080 caractères, les chefs de jugement critiqués devaient obligatoirement figurer sur la déclaration d'appel et non sur une annexe qui n'était pas la déclaration d'appel, en sorte que cette annexe était dépourvue de tout effet dévolutif, quand l'annexe de la déclaration d'appel listant les chefs de jugement critiqués faisait corps avec la déclaration elle-même, la cour d'appel a violé les articles 562 et 901 du code de procédure civile ;

2°/ que les droits à un procès équitable et à un recours effectif ne peuvent connaître d'autres restrictions que celles prévues par le législateur, tenu de ménager un juste équilibre entre les intérêts d'une bonne administration de la justice et ceux des justiciables, et uniquement dans la mesure où ils ne sont pas atteints dans leur substance même par des dispositions dont la clarté et la cohérence seraient insuffisantes ; qu'en jugeant cependant que seul l'acte d'appel opérait la dévolution des chefs critiqués du jugement et qu'à défaut d'établir que la déclaration d'appel avait dépassé sa taille maximale de 4 080 caractères, les chefs de jugement critiqués devaient obligatoirement figurer sur la déclaration d'appel et non sur une annexe qui n'était pas la déclaration d'appel, en sorte que cette annexe était dépourvue de tout effet dévolutif, quand l'annexe de la déclaration d'appel énumérant les chefs de jugement critiqués faisait corps avec la déclaration elle-même, la cour d'appel, qui a privé l'appelant de son droit à un recours effectif et méconnu les exigences du procès équitable, a violé les articles 562 et 901 du code de procédure civile, ensemble les articles 6, §. 1er et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

4. Selon l'article 901, 4°, du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, alors applicable, la déclaration d'appel est faite, à peine de nullité, par acte contenant notamment les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. En application des articles 748-1 et 930-1 du même code, cet acte est accompli et transmis par voie électronique.

5. En application de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, seul l'acte d'appel emporte dévolution des chefs critiqués du jugement.

6. Il en résulte que les mentions prévues par l'article 901, 4°, du code de procédure civile doivent figurer dans la déclaration d'appel, laquelle est un acte de procédure se suffisant à lui seul.

7. Cependant, en cas d'empêchement d'ordre technique, l'appelant peut compléter la déclaration d'appel par un document faisant corps avec elle et auquel elle doit renvoyer.

8. Ayant constaté que M. [J] avait adressé à la cour d'appel une déclaration d'appel indiquant, au titre de la portée de l'appel, : « Ci-joint document », et que les chefs de jugement contestés étaient explicités dans une annexe, laquelle n'était pas jointe à l'avis du greffe adressé à l'intimé, la cour d'appel devant laquelle l'appelant n'établissait pas d'empêchement technique, en a exactement déduit, sans méconnaître l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que ce document, qui ne faisait pas corps avec elle, ne valait pas déclaration d'appel.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [J] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [J] et le condamne à payer à la Société immobilière de la Martinique la somme de 3 000 euros ;

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