Cour de cassation - Chambre civile 2
- N° de pourvoi : 23-15.841
- ECLI:FR:CCASS:2024:C201142
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du jeudi 28 novembre 2024
Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, du 25 janvier 2023- Président
- Mme Martinel
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 28 novembre 2024
Cassation partielle
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 1142 F-B
Pourvoi n° U 23-15.841
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 NOVEMBRE 2024
1°/ Mme [W] [U], veuve [H], domiciliée [Adresse 3],
2°/ Mme [O] [H], domiciliée [Adresse 4],
toutes deux agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité d'ayants droit de [I] [H],
3°/ M. [R] [Y], domicilié [Adresse 4],
4°/ M. [D] [Y], domicilié [Adresse 6],
ont formé le pourvoi n° U 23-15.841 contre l'arrêt rendu le 25 janvier 2023 par la cour d'appel de Rouen (1re chambre civile), dans le litige les opposant :
1°/ à la société Pacifica, société anonyme, dont le siège est [Adresse 7],
2°/ à la caisse de mutualité sociale agricole Haute-Normandie, dont le siège est [Adresse 5],
3°/ à la société Groupama Centre Manche, dont le siège est [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Riuné, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme [W] [U] veuve [H], Mme [O] [H], agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité d'héritières de [I] [H], M. [R] [Y] et M. [D] [Y], de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société Pacifica, et l'avis de M. Brun, avocat général, après débats en l'audience publique du 16 octobre 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Riuné, conseiller référendaire rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 25 janvier 2023), le 25 février 2016, [I] [H], piéton âgé de 87 ans, a été victime d'un accident de la circulation, impliquant un véhicule assuré par la société Pacifica (l'assureur).
2. À la suite d'une expertise judiciaire, et après le décès de celui-ci le [Date décès 2] 2018, Mme [W] [U], épouse [H], veuve du défunt, Mme [O] [H], fille du défunt, agissant en leur qualité d'héritières de ce dernier et en leur nom personnel, M. [R] [Y], compagnon de Mme [O] [H], et M. [D] [Y], fils de ces derniers (les consorts [H] [Y]), ont assigné l'assureur devant un tribunal judiciaire en indemnisation de leurs préjudices, en présence de la caisse de mutualité sociale agricole Haute-Normandie et de la société Groupama Centre Manche, tiers payeurs.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le second moyen
Enoncé du moyen
4. Les consorts [H] [Y] font grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné l'assureur à payer à Mmes [W] et [O] [H], en leur qualité d'ayants droit de [I] [H], une indemnité de 305,02 euros au titre des dépenses de santé futures, et, statuant à nouveau, de condamner l'assureur à leur payer, ès qualités, la seule somme de 112 235,62 euros, au titre de l'ensemble des chefs infirmés, alors « que l'indemnisation du préjudice subi par la victime ne saurait être subordonnée à la production de justifications des dépenses effectives, à la production de factures, ni, de façon générale, être limitée au simple remboursement des sommes dont elle justifierait avoir fait l'avance ; qu'en jugeant que « les dépenses d'acquisition » des deux prothèses définitives prévues par l'expert judiciaire, « ainsi que de leur revêtement esthétique », outre « une batterie de vélo électrique », « n'ont pas été effectivement exposées avant le décès de [I] [H] le [Date décès 2] 2018 » et que « les réclamations présentées à ce titre seront rejetées », cependant que, lorsqu'il survient en cours d'instance, le décès de la victime directe ne prive pas ses héritiers de la faculté de réclamer au responsable l'indemnisation du préjudice subi par leur auteur entre l'accident et le décès, préjudice le cas échéant caractérisé par le besoin présenté lors de cette période, la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit. »
Réponse de la Cour
Vu le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime :
5. Le principe susvisé exclut le contrôle de l'utilisation des fonds alloués à la victime, qui en conserve la libre disposition.
6. Pour rejeter la demande d'indemnisation au titre des deux prothèses, de leur revêtement esthétique et d'une batterie de vélo électrique, après avoir relevé que, selon l'expert, la victime avait besoin de ces équipements, l'arrêt retient que les dépenses d'acquisition de ces appareillages n'ont pas été effectivement exposées avant le décès de [I] [H] le [Date décès 2] 2018, la consolidation étant fixée au 7 avril 2017.
7. En statuant ainsi, alors que l'indemnisation au titre de ces appareillages doit être évaluée en fonction des besoins de la victime, déterminés à la date de consolidation, et ne peut être subordonnée à la justification des dépenses correspondantes, peu important son décès ultérieur, la cour d'appel a violé le principe susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
8. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt infirmant le jugement en tant qu'il a condamné l'assureur à payer à Mmes [W] et [O] [H], en leur qualité d'ayants droit de [I] [H], une indemnité de 305,02 euros au titre des dépenses de santé futures et condamnant l'assureur à leur payer la somme totale de 112 235,62 euros entraîne la cassation du chef condamnant l'assureur à leur payer les intérêts au double du taux légal, à compter du 25 octobre 2016 jusqu'au jour où la décision sera devenue définitive, sur l'indemnité de 368 276,52 euros, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
9. En revanche, la cassation de ces chefs de dispositif n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'assureur aux dépens d'appel ainsi qu'au paiement de sommes en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il infirme le jugement en tant qu'il a condamné la société Pacifica à payer à Mmes [W] et [O] [H], en leur qualité d'ayants droit de [I] [H], une indemnité de 305,02 euros au titre des dépenses de santé futures, condamne la société Pacifica à leur payer la somme totale de 112 235,62 euros et condamne la société Pacifica à leur payer les intérêts au double du taux légal, à compter du 25 octobre 2016 jusqu'au jour où la décision sera devenue définitive, sur l'indemnité de 368 276,52 euros, l'arrêt rendu le 25 janvier 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne la société Pacifica aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par Mme [W] [U] veuve [H], Mme [O] [H], agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité d'héritières de [I] [H], M. [R] [Y] et M. [D] [Y] à l'encontre de la caisse de mutualité sociale agricole Haute-Normandie et de la société Groupama Centre Manche et par la société Pacifica et condamne cette dernière à payer à Mme [W] [U] veuve [H], Mme [O] [H], agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité d'héritières de [I] [H], M. [R] [Y] et M. [D] [Y] la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé par le président en l'audience publique du vingt-huit novembre deux mille vingt-quatre et signé par Mme Cathala, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.ECLI:FR:CCASS:2024:C201142
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 28 novembre 2024
Cassation partielle
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 1142 F-B
Pourvoi n° U 23-15.841
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 NOVEMBRE 2024
1°/ Mme [W] [U], veuve [H], domiciliée [Adresse 3],
2°/ Mme [O] [H], domiciliée [Adresse 4],
toutes deux agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité d'ayants droit de [I] [H],
3°/ M. [R] [Y], domicilié [Adresse 4],
4°/ M. [D] [Y], domicilié [Adresse 6],
ont formé le pourvoi n° U 23-15.841 contre l'arrêt rendu le 25 janvier 2023 par la cour d'appel de Rouen (1re chambre civile), dans le litige les opposant :
1°/ à la société Pacifica, société anonyme, dont le siège est [Adresse 7],
2°/ à la caisse de mutualité sociale agricole Haute-Normandie, dont le siège est [Adresse 5],
3°/ à la société Groupama Centre Manche, dont le siège est [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Riuné, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme [W] [U] veuve [H], Mme [O] [H], agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité d'héritières de [I] [H], M. [R] [Y] et M. [D] [Y], de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société Pacifica, et l'avis de M. Brun, avocat général, après débats en l'audience publique du 16 octobre 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Riuné, conseiller référendaire rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 25 janvier 2023), le 25 février 2016, [I] [H], piéton âgé de 87 ans, a été victime d'un accident de la circulation, impliquant un véhicule assuré par la société Pacifica (l'assureur).
2. À la suite d'une expertise judiciaire, et après le décès de celui-ci le [Date décès 2] 2018, Mme [W] [U], épouse [H], veuve du défunt, Mme [O] [H], fille du défunt, agissant en leur qualité d'héritières de ce dernier et en leur nom personnel, M. [R] [Y], compagnon de Mme [O] [H], et M. [D] [Y], fils de ces derniers (les consorts [H] [Y]), ont assigné l'assureur devant un tribunal judiciaire en indemnisation de leurs préjudices, en présence de la caisse de mutualité sociale agricole Haute-Normandie et de la société Groupama Centre Manche, tiers payeurs.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le second moyen
Enoncé du moyen
4. Les consorts [H] [Y] font grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné l'assureur à payer à Mmes [W] et [O] [H], en leur qualité d'ayants droit de [I] [H], une indemnité de 305,02 euros au titre des dépenses de santé futures, et, statuant à nouveau, de condamner l'assureur à leur payer, ès qualités, la seule somme de 112 235,62 euros, au titre de l'ensemble des chefs infirmés, alors « que l'indemnisation du préjudice subi par la victime ne saurait être subordonnée à la production de justifications des dépenses effectives, à la production de factures, ni, de façon générale, être limitée au simple remboursement des sommes dont elle justifierait avoir fait l'avance ; qu'en jugeant que « les dépenses d'acquisition » des deux prothèses définitives prévues par l'expert judiciaire, « ainsi que de leur revêtement esthétique », outre « une batterie de vélo électrique », « n'ont pas été effectivement exposées avant le décès de [I] [H] le [Date décès 2] 2018 » et que « les réclamations présentées à ce titre seront rejetées », cependant que, lorsqu'il survient en cours d'instance, le décès de la victime directe ne prive pas ses héritiers de la faculté de réclamer au responsable l'indemnisation du préjudice subi par leur auteur entre l'accident et le décès, préjudice le cas échéant caractérisé par le besoin présenté lors de cette période, la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit. »
Réponse de la Cour
Vu le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime :
5. Le principe susvisé exclut le contrôle de l'utilisation des fonds alloués à la victime, qui en conserve la libre disposition.
6. Pour rejeter la demande d'indemnisation au titre des deux prothèses, de leur revêtement esthétique et d'une batterie de vélo électrique, après avoir relevé que, selon l'expert, la victime avait besoin de ces équipements, l'arrêt retient que les dépenses d'acquisition de ces appareillages n'ont pas été effectivement exposées avant le décès de [I] [H] le [Date décès 2] 2018, la consolidation étant fixée au 7 avril 2017.
7. En statuant ainsi, alors que l'indemnisation au titre de ces appareillages doit être évaluée en fonction des besoins de la victime, déterminés à la date de consolidation, et ne peut être subordonnée à la justification des dépenses correspondantes, peu important son décès ultérieur, la cour d'appel a violé le principe susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
8. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt infirmant le jugement en tant qu'il a condamné l'assureur à payer à Mmes [W] et [O] [H], en leur qualité d'ayants droit de [I] [H], une indemnité de 305,02 euros au titre des dépenses de santé futures et condamnant l'assureur à leur payer la somme totale de 112 235,62 euros entraîne la cassation du chef condamnant l'assureur à leur payer les intérêts au double du taux légal, à compter du 25 octobre 2016 jusqu'au jour où la décision sera devenue définitive, sur l'indemnité de 368 276,52 euros, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
9. En revanche, la cassation de ces chefs de dispositif n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'assureur aux dépens d'appel ainsi qu'au paiement de sommes en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il infirme le jugement en tant qu'il a condamné la société Pacifica à payer à Mmes [W] et [O] [H], en leur qualité d'ayants droit de [I] [H], une indemnité de 305,02 euros au titre des dépenses de santé futures, condamne la société Pacifica à leur payer la somme totale de 112 235,62 euros et condamne la société Pacifica à leur payer les intérêts au double du taux légal, à compter du 25 octobre 2016 jusqu'au jour où la décision sera devenue définitive, sur l'indemnité de 368 276,52 euros, l'arrêt rendu le 25 janvier 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne la société Pacifica aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par Mme [W] [U] veuve [H], Mme [O] [H], agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité d'héritières de [I] [H], M. [R] [Y] et M. [D] [Y] à l'encontre de la caisse de mutualité sociale agricole Haute-Normandie et de la société Groupama Centre Manche et par la société Pacifica et condamne cette dernière à payer à Mme [W] [U] veuve [H], Mme [O] [H], agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité d'héritières de [I] [H], M. [R] [Y] et M. [D] [Y] la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé par le président en l'audience publique du vingt-huit novembre deux mille vingt-quatre et signé par Mme Cathala, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.
Aucun commentaire :
Enregistrer un commentaire
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.