vendredi 13 décembre 2024

Obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

FD



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 14 novembre 2024




Cassation partielle


Mme MARTINEL, président



Arrêt n° 1072 F-D

Pourvoi n° C 22-20.974




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 14 NOVEMBRE 2024

La caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° C 22-20.974 contre l'arrêt rendu le 5 juillet 2022 par la cour d'appel d'Amiens (2e chambre de la protection sociale), dans le litige l'opposant à Mme [Z] [P], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Pédron, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois, et l'avis de Mme Pieri-Gauthier, avocat général, après débats en l'audience publique du 2 octobre 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Pédron, conseiller rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Sara, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 5 juillet 2022), la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois (la caisse) a réclamé à Mme [P], infirmière exerçant à titre libéral (la professionnelle de santé), le remboursement d'un indu de facturation et de tarification, puis notifié à celle-ci, le 17 mai 2018, deux pénalités financières.

2. La professionnelle de santé a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La caisse fait grief à l'arrêt d'annuler la notification de pénalités financières d'un montant total de 3 609 euros, et de la débouter de sa demande de condamnation de la professionnelle de santé en paiement de cette somme, alors « qu' interdiction est faite au juge de dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'en retenant que la notification de pénalités financières du 17 mai 2018 est insuffisamment motivée, faute de distinguer les faits relevant de la faute des faits relevant de la fraude, quand ladite notification procède à cette distinction, en précisant que relèvent de la fraude, les falsifications d'ordonnances et actes fictifs, tandis que relèvent de la faute, les facturations contraires aux conditions de prises en charge des actes, produits ou prestations, les juges du fond ont dénaturé la notification de pénalités financières du 17 mai 2018. »

Réponse de la Cour

4. Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

5. Pour accueillir le recours de la professionnelle de santé et annuler la notification des pénalités financières, l'arrêt retient que la décision notifiée par la caisse en ce qui concerne ces pénalités ne distingue pas quels faits relèvent de la faute et quels faits relèvent de la fraude. Il en déduit que cette décision n'est pas suffisamment motivée au regard des exigences des articles L. 144-17-1 et R. 147-2 du code de la sécurité sociale.

6. En statuant ainsi, alors que la lettre de notification du 17 mai 2018 distinguait bien, en des termes clairs et précis, les faits relevant de la faute, en précisant leur nature, en l'occurrence des facturations contraires aux conditions de prises en charge des actes produits ou prestations soumis au remboursement, et leur montant, soit 35 580,45 euros, des faits relevant de la fraude, en précisant leur nature, à savoir des falsifications d'ordonnance et actes fictifs, et leur montant, soit 5 042,15 euros, selon un détail figurant dans un tableau joint en annexe, la cour d'appel, qui a dénaturé ce document, a violé le principe susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute la CPAM de l'Artois de son appel, confirme le jugement ayant annulé la notification de pénalités financières du 17 mai 2018 d'un montant total de 3 609 euros et débouté la caisse de sa demande de condamnation de Mme [P] en paiement de cette somme, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 5 juillet 2022, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens, autrement composée ;

Condamne Mme [P] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme [P] à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille vingt-quatre.ECLI:FR:CCASS:2024:C201072

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