chambre civile 3
Audience publique du jeudi 20 décembre 2018
N° de pourvoi: 17-28.216 Non publié au bulletin Rejet
M. Chauvin (président), président
SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat(s)
Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 6 juillet 2017), que la société Eiffage construction Nord-Pas-de-Calais, venant aux droits de la société Eiffage construction Artois-Hainaut (la société Eiffage), qui avait réalisé des travaux pour le compte de l'Association pour l'animation, l'aide sociale et professionnelle des personnes inadaptées (l'Association) a établi son décompte définitif le 23 octobre 2007 et assigné l'Association en paiement d'une somme de 784 009,28 euros et des intérêts au taux légal ; que l'arrêt du 21 septembre 2010, ayant condamné l'Association à payer à la société Eiffage la somme de 784 009,28 euros, avec intérêts moratoires depuis le 23 octobre 2007, jour du mémoire définitif, a été cassé partiellement (3e Civ., 11 juillet 2012, pourvoi n° 10-26.891) en ce qu'il avait fixé au 23 octobre 2007 le point de départ des intérêts moratoires et, la cour de renvoi n'ayant pas été saisie, l'instance s'est périmée ; que l'Association, estimant avoir réglé indûment la somme de 238 592,88 euros au titre des intérêts moratoires, a assigné la société Eiffage en restitution ;
Attendu que la société Eiffage fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à l'Association la somme de 238 592,88 euros avec intérêts et capitalisation et de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que, la portée d'un arrêt de cassation est déterminée par son dispositif qui peut, même si la décision attaquée ne comporte pas de chef spécifique à la question annulée, limiter sa censure à celle-ci ; qu'une cassation qui ne porte que sur le point de départ des intérêts est une cassation partielle qui n'affecte pas le principe même des intérêts de la créance ; qu'en l'espèce, l'arrêt de la Cour de cassation du 11 juillet 2012 a cassé et annulé l'arrêt de la cour d'appel de Douai du 21 septembre 2010 « seulement en ce qu'il a fixé au 23 octobre 2007 le point de départ des intérêts moratoires », ce dont il résultait que la cassation ne portait que sur le point de départ des intérêts moratoires et n'affectait ni la condamnation à la somme de 784 009,28 euros en principal, ni le principe même de ces intérêts ; que, partant, en condamnant la société Eiffage à restituer à l'AAASPPI la somme de 238 592,88 euros correspondant aux intérêts moratoires sur la période du 23 octobre 2007 au 9 mai 2011, la cour d'appel a violé les articles 623 et 624 du code de procédure civile, ensemble, les articles 1153 et 1235 (devenus 1231-6 et 1302) du code civil ;
2°/ que, subsidiairement, il n'y a pas de paiement indu sujet à répétition lorsque le paiement est effectué en exécution d'une obligation légale ; que les intérêts moratoires sur une créance contractuelle sont dus de plein droit, par le seul effet de la loi, à compter de tout acte valant mise en demeure de payer, même si le jugement constatant la créance en principal ne le précise pas ; qu'ainsi, en l'espèce, à supposer même que la cassation prononcée par l'arrêt du 11 juillet 2012 ait porté non seulement sur le point de départ mais également sur le principe même des intérêts moratoires au paiement desquels l'AAASPPI avait été condamnée par l'arrêt de la cour d'appel de Douai du 21 septembre 2010, dès lors qu'il est constant qu'une mise en demeure de payer a été délivrée le 29 janvier 2008 les intérêts moratoires sur la créance contractuelle de 784 009,28 euros – constatée par l'arrêt du 21 septembre 2010, définitif sur ce point – étaient dus de plein droit, par le seul effet de la loi, à compter de cette mise en demeure de payer, de sorte que le paiement par l'AAASPPI des intérêts moratoires sur la période postérieure n'était pas indu ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1153 et 1235 (devenus 1231-6 et 1302) du code civil ;
3°/ que la charge de la preuve du paiement indu pèse sur le demandeur en restitution ; qu'en condamnant la société Eiffage à restitution de la somme de 238 592,88 euros, au motif qu' « il apparaît aujourd'hui impossible de calculer le montant des intérêts moratoires et, ainsi, de fonder la condamnation de l'AAASPPI à les acquitter », quand il incombait à l'AAASPPI de prouver le caractère prétendument indu du paiement de sa condamnation aux intérêts moratoires afin de pouvoir en obtenir la répétition, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé les articles 1235 et 1315 (devenus 1302 et 1353) du code civil ;
4°/ que, le juge ne peut refuser d'exercer pleinement son office ni se borner à accueillir intégralement la demande dont il est saisi au prétexte d'une prétendue impossibilité de déterminer le montant d'une somme sur lequel les parties sont en désaccord ; qu'ainsi, la cour d'appel ne pouvait accueillir la demande de l'AAASPPI en répétition du paiement des intérêts moratoires d'un montant de 238 992,88 euros – contestée par la société Eiffage pour le montant excédant 21 570,36 euros – au prétexte qu' « il apparaît aujourd'hui impossible de calculer le montant des intérêts moratoires », sans commettre un déni de justice, ainsi qu'un excès de pouvoir négatif, et violer l'article 4 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la Cour de cassation avait prononcé la cassation de l'arrêt du 21 septembre 2010, seulement en ce qu'il avait fixé au 23 octobre 2007 le point de départ des intérêts moratoires et renvoyé l'affaire pour qu'elle fût jugée au fond sur la question des intérêts moratoires réclamés par la société Eiffage, la cour d'appel a exactement retenu, sans inverser la charge de la preuve, qu'en s'abstenant de saisir la cour d'appel de renvoi, la société Eiffage avait renoncé à faire trancher la seule question restant à juger du point de départ des intérêts moratoires et que la demande en restitution de l'Association devait être accueillie ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Eiffage construction Nord-Pas de Calais aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
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