mercredi 17 novembre 2021

L’obligation de résultat du sous-traitant et ses contours, parfois inattendus…

 

L’obligation de résultat du sous-traitant

et ses contours, parfois inattendus…

Le 10 novembre 2021, la Cour de cassation vient de nous rappeler[1] que le sous-traitant est tenu d’une obligation de résultat envers l’entrepreneur principal, obligation dont il ne peut s’exonérer que par la preuve d’une cause étrangère. Elle ajoute qu’il est débiteur d’une obligation de conseil, dans sa spécialité. Elle l’avait déjà fortement souligné le 4 mars 2021[2].

La mise en œuvre de cette obligation de résultat suppose un intérêt à agir, né :

·       soit du fait d’une action du maître d'ouvrage contre le titulaire du marché,

·       soit d’une indemnisation déjà consentie par l’entrepreneur principal au bénéfice du maître d'ouvrage.

Or, ce dernier n’est pas démuni d’actions puisque, s’il ne peut invoquer la garantie décennale à l’encontre du sous-traitant[3], il lui est loisible d’agir directement à l’encontre de ce dernier, mais seulement sur un fondement délictuel[4], car il ne peut « invoquer un manquement aux règles régissant la responsabilité contractuelle »[5]. Cette dernière affirmation doit cependant être rapprochée du parti retenu par l’assemblée plénière,  proclamant, le 13 janvier 2020[6], qu’une telle faute délictuelle pouvant résulter d’un manquement contractuel[7], lui-même susceptible de procéder du non-respect d’une… obligation de résultat, qui devient ainsi quasi-délictuelle…

Cela étant, le principe de cette obligation de résultat du sous-traitant connait des limites, correspondant à cette « cause étrangère » régulièrement rappelée par la Cour suprême et qui peut émaner :

·       d’une faute du maître d'ouvrage en lien avec la survenance du dommage[8],

·       de « dégâts causés par un tiers »[9],

·       de ce que la preuve n’est pas apportée de ce que « les prestations du sous-traitant ne correspondaient pas aux dispositions contractuelles[10].

Il avait été auparavant réaffirmé que chaque sous-traitant est tenu « d’une obligation de résultat à l’égard de son donneur d’ordre »[11], mais non le fournisseur destinataire d’un bon de commande ne mentionnant pas la destination de son produit et dont il a alors été considéré qu’il n’avait pas manqué à son devoir de conseil[12].

                                                                                        

                                                                                         Albert Caston



[1] Cass. civ. 3ème, 10 novembre 2021, n° 20-18.510.

[2] Cass. civ. 3ème, 4 mars 201, n° 19-15.036.

[3] Cass. civ. 3ème, 14 janvier 2021, n° 19-23.874.

[4] Même arrêt, 14 janvier 2021, n° 19-23.874

[5] Même arrêt, 14 janvier 2021, n° 19-23.874

[6] N° 17-19.963, commenté par A. Caston, Gaz. Pal. 2020, n° 7, p. 59 : « Bois rouge conforte Boot shop par extension des droits du tiers victime d’un manquement contractuel ».

[7] Selon le principe antérieurement proclamé par l’assemblée plénière le 6 octobre 2006 : n° 05-13.255.

[8] Cass. civ. 3ème, 4 mars 2021, n° 19-23.502, note A. Caston, Gaz. Pal. 2021, n° 19, p. 73 : «  Faute du maître d'ouvrage en lien avec la survenance du dommage » ; cass. civ. 3ème, 25 juin 2020, n° 19-15.920, arrêt rappelant aussi que  « la faute du sous-traitant engage la responsabilité contractuelle de l’entrepreneur principal à l’égard du maître d'ouvrage.

[9] Cass. civ. 3ème, 13 juillet 2017, n° 16-18.136.

[10] Cass. civ. 3ème, 5 mars 2020, n° 18-26.584 ; dans le même sens, sur la faute résultant d’une méconnaissance « du cahier des clauses techniques particulières et aussi de la notice du fournisseur », cass. civ. 3ème, 10 novembre 2021, n° 20-19.020.

[11] Cass. civ. 3ème, 25 janvier 2018, n° 16-24.738.

[12] Même arrêt.

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