L’obligation
de résultat du sous-traitant
et
ses contours, parfois inattendus…
Le 10 novembre 2021, la
Cour de cassation vient de nous rappeler[1] que le sous-traitant est
tenu d’une obligation de résultat envers l’entrepreneur principal, obligation dont
il ne peut s’exonérer que par la preuve d’une cause étrangère. Elle ajoute qu’il
est débiteur d’une obligation de conseil, dans sa spécialité. Elle l’avait déjà
fortement souligné le 4 mars 2021[2].
La mise en œuvre de cette
obligation de résultat suppose un intérêt à agir, né :
·
soit du fait d’une action du maître
d'ouvrage contre le titulaire du marché,
·
soit d’une indemnisation déjà consentie par
l’entrepreneur principal au bénéfice du maître d'ouvrage.
Or, ce dernier n’est pas
démuni d’actions puisque, s’il ne peut invoquer la garantie décennale à
l’encontre du sous-traitant[3], il lui est loisible
d’agir directement à l’encontre de ce dernier, mais seulement sur un fondement
délictuel[4], car il ne peut
« invoquer un manquement aux règles régissant la responsabilité
contractuelle »[5]. Cette dernière
affirmation doit cependant être rapprochée du parti retenu par l’assemblée
plénière, proclamant, le 13 janvier 2020[6], qu’une telle faute
délictuelle pouvant résulter d’un manquement contractuel[7], lui-même susceptible de
procéder du non-respect d’une… obligation de résultat, qui devient ainsi quasi-délictuelle…
Cela étant, le principe
de cette obligation de résultat du sous-traitant connait des limites,
correspondant à cette « cause étrangère » régulièrement rappelée par
la Cour suprême et qui peut émaner :
· d’une
faute du maître d'ouvrage en lien avec la survenance du dommage[8],
· de
« dégâts causés par un tiers »[9],
· de
ce que la preuve n’est pas apportée de ce que « les prestations du
sous-traitant ne correspondaient pas aux dispositions contractuelles[10].
Il avait été auparavant
réaffirmé que chaque sous-traitant est tenu « d’une obligation de résultat
à l’égard de son donneur d’ordre »[11], mais non le fournisseur
destinataire d’un bon de commande ne mentionnant pas la destination de son
produit et dont il a alors été considéré qu’il n’avait pas manqué à son devoir
de conseil[12].
Albert
Caston
[1] Cass.
civ. 3ème, 10 novembre 2021, n° 20-18.510.
[2] Cass.
civ. 3ème, 4 mars 201, n° 19-15.036.
[3] Cass.
civ. 3ème, 14 janvier 2021, n° 19-23.874.
[4] Même
arrêt, 14 janvier 2021, n° 19-23.874
[5] Même
arrêt, 14 janvier 2021, n° 19-23.874
[6] N°
17-19.963, commenté par A. Caston, Gaz. Pal. 2020, n° 7, p. 59 :
« Bois rouge conforte Boot shop par extension des droits du tiers victime
d’un manquement contractuel ».
[7] Selon le
principe antérieurement proclamé par l’assemblée plénière le 6 octobre
2006 : n° 05-13.255.
[8] Cass.
civ. 3ème, 4 mars 2021, n° 19-23.502, note A. Caston, Gaz. Pal. 2021, n° 19, p.
73 : « Faute du maître d'ouvrage en lien avec la survenance du
dommage » ; cass. civ. 3ème, 25 juin 2020, n° 19-15.920, arrêt
rappelant aussi que « la faute du
sous-traitant engage la responsabilité contractuelle de l’entrepreneur
principal à l’égard du maître d'ouvrage.
[9] Cass.
civ. 3ème, 13 juillet 2017, n° 16-18.136.
[10] Cass.
civ. 3ème, 5 mars 2020, n° 18-26.584 ; dans le même sens, sur la faute
résultant d’une méconnaissance « du cahier des clauses techniques
particulières et aussi de la notice du fournisseur », cass. civ. 3ème, 10
novembre 2021, n° 20-19.020.
[11] Cass.
civ. 3ème, 25 janvier 2018, n° 16-24.738.
[12] Même
arrêt.
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