Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 11 septembre 2014
N° de pourvoi: 13-21.361
Non publié au bulletin Cassation partielle
Mme Flise (président), président
SCP Ghestin, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Yves et Blaise Capron, avocat(s)
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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., brocanteur-antiquaire, a souscrit le 6 juillet 1999 auprès de la société caisse régionale de Crédit agricole Centre Loire (la banque) un prêt professionnel pour l'EURL Art et Patrimoine qu'il a créée et a adhéré à un contrat d'assurance de groupe souscrit par la banque auprès de la société Caisse nationale de prévoyance assurances (l'assureur) ; que le 18 juillet 2006, M. X... a été victime d'un accident de la circulation ; qu'il a sollicité la garantie de l'assureur, lequel l'a refusée ; qu'il a assigné la banque et l'assureur en responsabilité et indemnisation pour manquement à leur devoir d'information et de conseil ;
Sur le second moyen :
Attendu que M. X... et la société Art et Patrimoine font grief à l'arrêt de débouter M. X... de sa demande de dommages-intérêts à l'encontre de l'assureur, alors, selon le moyen :
1°/ que l'assureur de groupe est tenu envers l'adhérent d'une obligation d'information et de conseil sur le contenu du contrat collectif proposé à l'adhésion ; que l'action en responsabilité fondée sur la méconnaissance de cette obligation, de nature précontractuelle, n'est pas soumise au délai biennal de prescription énoncé à l'article L. 114-1 du code des assurances ; qu'en affirmant que « toute action à l'encontre de l'assureur aurait dû être engagée avant mai 2009 », soit dans un délai de deux ans à compter de la dénonciation de crédits faite par la banque tandis que l'action en responsabilité précontractuelle exercée par M. X... n'était pas soumise à ce délai biennal, la cour d'appel a violé l'article L. 114-1 du code des assurances et l'article 2224 du code civil ;
2°/ que l'assureur de groupe est tenu envers l'adhérent d'une obligation d'information et de conseil sur le contenu du contrat collectif proposé à l'adhésion ; que, lorsque le contrat comporte des clauses obscures ou ambiguës, il appartient à l'assureur d'éclairer l'assuré sur le sens exact du contrat d'assurance ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les documents d'assurance pris séparément pouvaient paraître ambigus ; qu'en rejetant la demande de dommages-intérêts de M. X... sans vérifier si l'assureur avait levé les ambiguïtés qui pouvaient naître à la lecture du contrat d'assurance, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
3°/ que lorsque l'adhérent poursuit la réparation des conséquences dommageables d'une information incomplète sur les caractéristiques du contrat d'assurance auquel il a adhéré, il est indifférent qu'il ait pu bénéficier ou non d'une garantie proposée par l'assureur et à laquelle il n'a pas adhéré en raison du manquement de l'assureur à son obligation d'information ; qu'en écartant la demande de dommages-intérêts de M. X... à l'encontre de l'assureur aux motifs qu'il n'était pas établi qu'il aurait pu bénéficier de la garantie au titre de l'ITT, tandis que cette circonstance était indifférente s'agissant d'une action en réparation du dommage consécutif au manquement de l'assureur à son obligation précontractuelle d'information, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
4°/ que M. X... faisait valoir qu'il aurait bénéficié de la garantie au titre de l'ITT si elle avait été souscrite, dès lors que l'expert judiciaire avait retenu une période d'ITT du 18 juillet 2006 au 30 juin 2008 ; qu'en considérant que M. X... n'avait pas cessé toute activité après son accident, puisqu'il avait embauché un salarié pour la période du 1er décembre 2006 au 14 janvier 2007 et avait délivré un certificat de travail au salarié concerné, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à caractériser une reprise d'activité de la part de M. X..., privant son arrêt de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient que les conditions générales d'assurance qui, seules, valent notice d'assurance, et dont M. X... a attesté avoir pris connaissance, indiquent en caractères gras que la garantie ITT ne s'applique pas aux opérations d'ouvertures de crédit et que M. X... ne s'est pas mépris sur l'étendue de son assurance ;
Qu'en l'état de ces seules constatations et énonciations, procédant de son appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a pu déduire que l'assureur de groupe, qui n'est pas tenu à une obligation de conseil laquelle incombe au souscripteur de l'assurance de groupe, n'avait pas manqué à son obligation d'information précontractuelle ;
D'où il suit que le moyen, qui critique en sa première branche un motif erroné mais surabondant, n'est pas fondé en ses autres branches ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu que le banquier, qui propose à son client auquel il consent un prêt, d'adhérer au contrat d'assurance de groupe qu'il a souscrit à l'effet de garantir, en cas de survenance de divers risques, l'exécution de tout ou partie de ses engagements, est tenu de l'éclairer sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d'emprunteur, la remise de la notice ne suffisant pas à satisfaire à cette obligation ;
Attendu que pour débouter M. X... de sa demande en responsabilité contre la banque, l'arrêt retient qu'il ne s'est pas mépris sur l'étendue de son assurance dont il n'a sollicité la mise en jeu que plusieurs années après son accident, après avoir été avisé du risque de l'engagement d'un recouvrement de créance judiciaire à son encontre, et qu'il ne peut donc pas invoquer un défaut d'information et de conseil de la part de la banque ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la banque l'avait éclairé sur l'adéquation du risque couvert par le contrat avec sa situation personnelle, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième, troisième et quatrième branches du premier moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société caisse régionale de Crédit agricole mutuel Centre Loire, et en ce qu'il a condamné M. X... aux dépens, l'arrêt rendu le 6 mars 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la société caisse régionale de Crédit agricole mutuel Centre Loire aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
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