Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mercredi 10 septembre 2014
N° de pourvoi: 13-19.015
Non publié au bulletin Rejet
M. Gridel (conseiller doyen faisant fonction de président), président
SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Gatineau et Fattaccini, avocat(s)
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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 4 mars 2013), que, le 28 juin 1974, le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jardins du bourg (le syndicat des copropriétaires) a conclu avec la société Schindler cinq contrats d'entretien portant sur les ascenseurs de la résidence ; que ces contrats ont été conclus pour une durée initiale de dix ans, renouvelable par tacite reconduction par périodes successives de cinq ans, sauf avis contraire donné par l'une des parties, six mois au moins avant l'expiration d'une de ces périodes ; qu'après tacites reconductions, l'expiration des contrats devait intervenir le 30 avril ou le 30 décembre 2009 selon les ascenseurs considérés ; qu'invoquant le remplacement de ceux-ci par un autre fabricant, le syndicat des copropriétaires a résilié les contrats d'entretien en cours par lettre du 7 septembre 2007 ; que, le 18 janvier 2010, la société Schindler a assigné le syndicat des copropriétaires en paiement d'une certaine somme correspondant au montant restant dû en application des contrats jusqu'à leur terme conventionnel ;
Attendu que le syndicat des copropriétaires fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande, alors, selon le moyen :
1°/ que dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ; qu'est abusive la clause par laquelle l'une des parties impose à l'autre une clause qui prévoit la prorogation ou la reconduction tacite d'un contrat à durée déterminée pour une période excessivement longue ; qu'en l'espèce, le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jardins du bourg faisait valoir que les contrats d'entretien en cause, à durée déterminée, comportaient une clause de reconduction pour une durée de cinq ans, et que cette durée était excessive ; que, pour considérer que la clause de reconduction tacite n'était pas abusive, la cour d'appel s'est bornée à énoncer qu'il n'était pas établi que la durée de cinq ans soit excessive, s'agissant d'un contrat portant sur l'entretien d'appareils importants, ayant une grande spécificité technique ; qu'en se prononçant ainsi, par un motif inopérant, tandis que la reconduction tacite pour une durée de cinq ans était en elle-même excessive, la cour d'appel a violé l'article L. 132-1 du code de la consommation ;
2°/ qu'est abusive la clause par laquelle le professionnel interdit au non-professionnel ou au consommateur la résiliation anticipée du contrat pour motifs légitimes ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les contrats d'entretien avaient été conclus « pour une durée de dix ans, renouvelable par tacite reconduction, pour des périodes successives de cinq ans sauf avis contraire donné par l'une ou l'autre des parties, par lettre recommandée, six mois au moins avant l'expiration d'une de ces périodes » ; qu'en considérant que la clause de reconduction tacite du contrat n'était pas abusive, tout en ayant constaté qu'elle ne comportait pas la possibilité d'une résiliation pour motif légitime, tel que celui invoqué par le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jardins du bourg résultant de la dépose des ascenseurs installés par la société Schindler pour satisfaire à la nouvelle réglementation, la cour d'appel a violé l'article L. 132-1 du code de la consommation ;
3°/ que la disparition de l'objet ou de la cause du contrat rend ce dernier caduc ; qu'en l'espèce, le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jardins du bourg faisait valoir que les contrats avaient été conclus pour l'entretien des ascenseurs installés en 1974 et 1975 par la société Schindler et qu'en raison du remplacement intégral des ascenseurs de la résidence par suite de la nouvelle réglementation, l'objet du contrat avait disparu ; que la cour d'appel a pourtant condamné le syndicat des copropriétaires à payer la somme de 40 354,49 euros à la société Schindler au titre des sommes dues jusqu'à l'échéance du contrat, pourtant désormais sans objet, et a ainsi retenu que le contrat devait s'appliquer ; qu'en se prononçant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les contrats d'entretien avaient été conclus pour l'entretien spécifique des ascenseurs installés par la société Schindler et si le remplacement complet de ces ascenseurs en raison de la nouvelle réglementation, par un fabricant concurrent, avait fait disparaître l'objet et la cause des contrats d'entretien et les avait, en conséquence, frappés de caducité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1131 et 1302 du code civil ;
4°/ que le dommage doit être intégralement réparé, sans qu'il en résulte pour la victime ni perte ni profit ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a alloué à la société Schindler, à titre de dommages-intérêts, la somme de 40 354,49 euros, correspondant à la totalité des sommes dont le versement était prévu jusqu'à l'échéance des contrats d'entretien litigieux, tout en relevant que la société Schindler ne pouvait prétendre qu'à « l'indemnisation du préjudice financier et matériel effectivement subi » ; qu'en allouant une somme équivalant au prix de prestations qui n'ont pas été exécutées par la société Schindler, au lieu de limiter la réparation au bénéfice effectivement perdu par la société Schindler, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil et le principe de la réparation intégrale ;
Mais attendu qu'après avoir exactement considéré, compte tenu des spécificités du matériel entretenu et des sujétions imposées au prestataire, que la clause de tacite reconduction par périodes successives de cinq ans ne créait aucun déséquilibre significatif au détriment du syndicat des copropriétaires, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a souverainement apprécié le montant du préjudice subi dont elle a justifié l'existence par l'évaluation qu'elle en a faite ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa deuxième branche, ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jardins du bourg aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande du syndicat des copropriétaires de la résidence Les Jardins du bourg, condamne celui-ci à payer la somme de 3 000 euros à la société Schindler ;
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