Voir note Heuzé, RGDA 2015, p. 499.
Cour de cassation
chambre sociale
Audience publique du mercredi 4 décembre 2013
N° de pourvoi: 12-22.793 12-22.794 12-22.795 12-22.796 12-22.797 12-22.798 12-22.799 12-22.800 12-22.801 12-22.802 12-22.803 12-22.804 12-22.805 12-23.302 12-23.303 12-23.304 12-23.305 12-23.307 12-23.308 12-23.309 12-23.310 12-23.311 12-23.312 12-23.313
Non publié au bulletin Rejet
M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président
SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat(s)
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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joints les pourvois n° Y 12-22.793 à M 12-22.805, B 12-23.302 à E 12-23.305 et H 12-23.307 à P 12-23.313 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués (Douai, 31 mai 2012) que M. X... et douze autres salariés, engagés par les entreprises de travail temporaire Adia, Crit ou Randstad, ont été mis à disposition de la société Plastic Omnium auto extérieur, équipementier automobile, entre 1997 et décembre 2007, en raison d'accroissements temporaires d'activité ou pour remplacer des salariés absents ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale pour faire valoir auprès de la société Plastic Omnium auto extérieur les droits correspondant à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet au premier jour de leur mission et obtenir la condamnation in solidum des entreprises de travail temporaire et de l'entreprise utilisatrice au paiement de diverses sommes ;
Sur le premier moyen de la société Plastic Omnium auto extérieur :
Attendu que cette société fait grief aux arrêts de la condamner à payer à plusieurs salariés une somme à titre de rappel de salaires avec congés payés afférents pour les périodes non travaillées entre les missions, alors, selon le moyen :
1°/ que le travailleur temporaire engagé par plusieurs contrats de mission et dont le contrat de travail est requalifié en contrat à durée indéterminée le liant à l'entreprise utilisatrice ne peut prétendre à rappel de salaire au titre des périodes non travaillées entre plusieurs missions que s'il établit qu'il s'est tenu à la disposition de l'entreprise pendant ces périodes pour effectuer un travail ; que pour la condamner à verser des rappels de salaire au titre des périodes d'inactivité séparant les divers contrats de mission, la cour d'appel s'est fondée sur la constatation selon laquelle le salarié consacrait de manière exclusive son activité professionnelle à la société Plastic Omnium auto extérieur ; qu'en se déterminant de la sorte, sans établir que le salarié s'était tenu durant lesdites périodes à la disposition de la demanderesse pour effectuer un travail, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
2°/ qu'en se fondant sur le fait qu'elle ne démontrait pas que le salarié avait travaillé pour d'autres employeurs dans des proportions telles qu'elles l'auraient rendu indisponible pour elle durant les périodes d'inactivité, cependant qu'il appartenait au salarié, demandeur, de prouver qu'il s'était tenu à la disposition de la société Plastic Omnium auto extérieur s'il entendait percevoir une somme au titre de rappel de salaire pour lesdites périodes, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation des articles 1315 du code civil et 9 du code de procédure civile ;
3°/ que le fait que le travailleur temporaire soit disponible pour l'entreprise utilisatrice durant des périodes d'inactivité séparant différentes missions de travail temporaire ne suffit pas à établir qu'il est resté à la disposition de celle-ci pendant lesdites périodes pour effectuer un travail à son service ; qu'en prenant en considération le fait qu'elle ne parvenait pas à prouver que le salarié avait travaillé pour d'autres employeurs dans des proportions telles qu'elles l'auraient rendu indisponible pour elle durant les périodes d'inactivité, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 1221-1du code du travail ;
4°/ que pour fixer la somme prétendument due au salarié à titre de rappels de salaire pour les périodes d'inactivité durant la relation contractuelle, la cour d'appel a retenu que ce montant n'était pas contesté par les parties défenderesses ; qu'en se prononçant de la sorte, cependant que la société Plastic Omnium auto extérieur faisait valoir dans ses écritures -dont la cour d'appel a constaté qu'elles avaient été reprises oralement à l'audience, sans ajouts ni retraits- que la demande de rappel sur les périodes inter-contrat ne pouvait être quantifiée en l'état des éléments produits aux débats par le salarié, ce dont il s'induisait nécessairement qu'elle contestait le montant sollicité par ce dernier, la cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel de la société en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la succession des contrats et le recours systématique au possible report de la date de fin de mission initialement convenue, sans délai de prévenance, avaient créé une confusion quant à la durée effective de la mission, de sorte que les salariés, qui ne connaissaient les dates de début de mission qu'au fur et à mesure qu'ils les effectuaient, avaient dû se tenir constamment à la disposition de l'entreprise utilisatrice, la cour d'appel en a exactement déduit que des rappels de salaires, dont elle a souverainement apprécié le montant, étaient dus par cette entreprise pour les périodes intermédiaires ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur les deuxième et troisième moyens des pourvois de la société Plastic Omnium auto extérieur et le second moyen du pourvoi de la société Randstad :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne sont pas de nature à permettre l'admission des pourvois ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident des salariés :
Attendu que MM. Y..., Z..., A... et B... font grief aux arrêts de rejeter leur demande de rappel de salaires correspondant aux périodes comprises entre deux contrats de mission, alors, selon le moyen qu'il incombe au salarié d'établir qu'il s'est tenu à la disposition de l'entreprise en vue d'effectuer un travail afin de pouvoir justifier d'une créance salariale à l'encontre de celle-ci au titre des périodes non travaillées entre ses différents contrats à durée déterminée requalifiés en contrat à durée indéterminée ; que la mise à disposition du salarié ne saurait nécessairement se déduire de la longueur des délais entre deux missions, le long délai pouvant être le fait de l'employeur ; qu'en décidant néanmoins au vu de la longueur des périodes d'attente que les salariés avaient conservé une liberté de choix quant à leur décision de travailler ou pas pour la société Plastic Omnium auto extérieur et qu'ils ne s'étaient pas maintenus à sa disposition de manière constante au cours de la période considérée, la cour d'appel a statué par un motif inopérant, en violation ensemble des articles L. 1221-1 et L. 1245-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a retenu que les salariés qui avaient conservé une liberté de choix durant les longues périodes non travaillées, ne s'étaient pas maintenus à disposition de l'entreprise utilisatrice en vue d'effectuer un travail ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur les moyens des pourvois incidents des sociétés Crit, et Randstad et le moyen unique du pourvoi principal de la société Adia, réunis, tels que reproduits en annexe :
Attendu que les sociétés Crit, Adia et Randstad font grief aux arrêts de les condamner in solidum avec la société Plastic Omnium auto extérieur au paiement des sommes allouées aux salariés à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive ;
Mais attendu que la cour d'appel a relevé, d'une part, que les entreprises de travail temporaire, quelles qu'elles fussent, n'avaient pas reproduit dans les contrats de mission des travailleurs temporaires les clauses et mentions du contrat de mise à disposition énumérées à l'article L. 1251-43 du code du travail comme le leur impose l'article L. 1251-16 du même code, et d'autre part, que la succession des contrats avec le recours systématique au report possible du terme de la mission avait entraîné une confusion quant à la durée effective de la mission et placé les salariés dans une situation de mise à disposition quasi permanente auprès de l'entreprise utilisatrice ; qu'elle a pu en déduire que les sociétés Adia, Randstad et Crit qui avaient concouru par leurs fautes au dommage subi par les salariés devaient être condamnées in solidum avec la société Plastic Omnium auto extérieur à supporter les conséquences de la rupture des contrats ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois tant principaux qu'incidents ;
Condamne les sociétés Plastic Omnium auto extérieur, Crit, Adia et Randstad aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer la somme globale de 3 000 euros à MM. X... et douze autres salariés et rejette les autres demandes ;
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