cass. civ. 3ème, 15 avril 2021, n° 19-20.424. Cité en sommaire, D. 2021, p. 799.
Note C. Sizaire, Constr.-urb., 2021-6, p. 29.
Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 19-20.424
- ECLI:FR:CCASS:2021:C300357
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du jeudi 15 avril 2021
Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, du 24 mai 2019Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
FB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 15 avril 2021
Cassation partielle
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 357 FS-P
Pourvoi n° T 19-20.424
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 15 AVRIL 2021
La société Activités courrier industriel, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° T 19-20.424 contre l'arrêt rendu le 24 mai 2019 par la cour d'appel de Montpellier (1re chambre A), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Face Languedoc Roussillon, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à la société Le Jarret, société en nom collectif, dont le siège est [Adresse 3],
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société Activités courrier industriel, de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société Face Languedoc Roussillon, et l'avis de Mme Vassallo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 16 mars 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, M. Nivôse, Mme Greff-Bohnert, MM. Jacques, Boyer, Mme Abgrall, conseillers, Mmes Georget, Renard, Djikpa, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 24 mai 2019), la société civile immobilière Activités courrier industriel (la SCI), maître d'ouvrage, a conclu avec la société en nom collectif Le Jarret (la SNC) un contrat de promotion immobilière avec délégation de maîtrise d'ouvrage.
2. La SNC a confié les travaux à la société EM2C, qui a sous-traité certains lots à la société Midi asphalte, devenue la société Face Languedoc Roussillon.
3. Une procédure de sauvegarde a été ouverte au bénéfice de la société EM2C.
4. N'ayant pu obtenir le règlement de l'intégralité de ses créances par l'entrepreneur principal, la société Face Languedoc Roussillon a assigné la SCI et la SNC en dommages-intérêts sur le fondement de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975.
Examen du moyen
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
5. La SCI fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Face Languedoc Roussillon une certaine somme, in solidum avec la SNC, alors
« que le maître d'ouvrage n'engage sa responsabilité à l'égard du sous-traitant, faute d'avoir mis l'entrepreneur principal en demeure de le faire agréer, qu'à la condition d'avoir eu connaissance de la présence du sous-traitant sur le chantier ; que cette connaissance doit être personnelle et ne saurait se déduire de la seule connaissance qu'en avait le maître d'ouvrage délégué ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a cru pouvoir condamner la SCI à payer à la société Face Languedoc Roussillon, sous-traitante, une somme à titre de dommages-intérêts pour manquement aux dispositions de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 sur la sous-traitance, sans rechercher si la SCI avait eu personnellement connaissance de sa présence sur le chantier ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1382, devenu 1240, du code civil et 14-1, alinéas 1 à 3, de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance :
6. Selon le premier de ces textes, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
7. Selon le second, pour les contrats de travaux de bâtiment et de travaux publics, le maître de l'ouvrage doit, s'il a connaissance de la présence sur le chantier d'un sous-traitant n'ayant pas fait l'objet des obligations définies à l'article 3 ou à l'article 6, ainsi que celles définies à l'article 5, mettre l'entrepreneur principal ou le sous-traitant en demeure de s'acquitter de ces obligations et si le sous-traitant accepté, et dont les conditions de paiement ont été agréées par le maître de l'ouvrage ne bénéficie pas de la délégation de paiement, le maître de l'ouvrage doit exiger de l'entrepreneur principal qu'il justifie avoir fourni la caution.
8. Il en résulte que, la faute délictuelle ou quasi-délictuelle du mandataire n'engageant pas la responsabilité du mandant, celui-ci ne peut être condamné sur le fondement de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 que s'il a personnellement connaissance de la présence du sous-traitant sur le chantier.
9. Pour condamner le maître d'ouvrage à réparer le préjudice subi par le sous-traitant, l'arrêt retient que le promoteur avait connaissance de sa présence sur le chantier.
10. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la SCI avait connaissance de la présence du sous-traitant sur le chantier, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Portée et conséquences de la cassation
11. La cassation s'étend, en application de l'article 624 du code de procédure civile, à la disposition condamnant la SNC à garantir la SCI des sommes mises à sa charge.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la SCI Activités courrier industriel à payer à la société Face Languedoc Roussillon la somme de 54 408,79 euros à titre de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2010, in solidum avec la condamnation prononcée par le premier juge à l'encontre de la SNC Le Jarret et en ce qu'il condamne la SNC Le Jarret à garantir intégralement la SCI Activités courrier industriel des condamnations qu'il prononce contre elle en principal, intérêts, frais et dépens, l'arrêt rendu le 24 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne la société Face Languedoc Roussillon aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
CIV. 3
FB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 15 avril 2021
Cassation partielle
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 357 FS-P
Pourvoi n° T 19-20.424
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 15 AVRIL 2021
La société Activités courrier industriel, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° T 19-20.424 contre l'arrêt rendu le 24 mai 2019 par la cour d'appel de Montpellier (1re chambre A), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Face Languedoc Roussillon, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à la société Le Jarret, société en nom collectif, dont le siège est [Adresse 3],
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société Activités courrier industriel, de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société Face Languedoc Roussillon, et l'avis de Mme Vassallo, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 16 mars 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, M. Nivôse, Mme Greff-Bohnert, MM. Jacques, Boyer, Mme Abgrall, conseillers, Mmes Georget, Renard, Djikpa, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 24 mai 2019), la société civile immobilière Activités courrier industriel (la SCI), maître d'ouvrage, a conclu avec la société en nom collectif Le Jarret (la SNC) un contrat de promotion immobilière avec délégation de maîtrise d'ouvrage.
2. La SNC a confié les travaux à la société EM2C, qui a sous-traité certains lots à la société Midi asphalte, devenue la société Face Languedoc Roussillon.
3. Une procédure de sauvegarde a été ouverte au bénéfice de la société EM2C.
4. N'ayant pu obtenir le règlement de l'intégralité de ses créances par l'entrepreneur principal, la société Face Languedoc Roussillon a assigné la SCI et la SNC en dommages-intérêts sur le fondement de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975.
Examen du moyen
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
5. La SCI fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Face Languedoc Roussillon une certaine somme, in solidum avec la SNC, alors
« que le maître d'ouvrage n'engage sa responsabilité à l'égard du sous-traitant, faute d'avoir mis l'entrepreneur principal en demeure de le faire agréer, qu'à la condition d'avoir eu connaissance de la présence du sous-traitant sur le chantier ; que cette connaissance doit être personnelle et ne saurait se déduire de la seule connaissance qu'en avait le maître d'ouvrage délégué ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a cru pouvoir condamner la SCI à payer à la société Face Languedoc Roussillon, sous-traitante, une somme à titre de dommages-intérêts pour manquement aux dispositions de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 sur la sous-traitance, sans rechercher si la SCI avait eu personnellement connaissance de sa présence sur le chantier ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1382, devenu 1240, du code civil et 14-1, alinéas 1 à 3, de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance :
6. Selon le premier de ces textes, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
7. Selon le second, pour les contrats de travaux de bâtiment et de travaux publics, le maître de l'ouvrage doit, s'il a connaissance de la présence sur le chantier d'un sous-traitant n'ayant pas fait l'objet des obligations définies à l'article 3 ou à l'article 6, ainsi que celles définies à l'article 5, mettre l'entrepreneur principal ou le sous-traitant en demeure de s'acquitter de ces obligations et si le sous-traitant accepté, et dont les conditions de paiement ont été agréées par le maître de l'ouvrage ne bénéficie pas de la délégation de paiement, le maître de l'ouvrage doit exiger de l'entrepreneur principal qu'il justifie avoir fourni la caution.
8. Il en résulte que, la faute délictuelle ou quasi-délictuelle du mandataire n'engageant pas la responsabilité du mandant, celui-ci ne peut être condamné sur le fondement de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 que s'il a personnellement connaissance de la présence du sous-traitant sur le chantier.
9. Pour condamner le maître d'ouvrage à réparer le préjudice subi par le sous-traitant, l'arrêt retient que le promoteur avait connaissance de sa présence sur le chantier.
10. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la SCI avait connaissance de la présence du sous-traitant sur le chantier, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Portée et conséquences de la cassation
11. La cassation s'étend, en application de l'article 624 du code de procédure civile, à la disposition condamnant la SNC à garantir la SCI des sommes mises à sa charge.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du moyen, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la SCI Activités courrier industriel à payer à la société Face Languedoc Roussillon la somme de 54 408,79 euros à titre de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal à compter du 22 mars 2010, in solidum avec la condamnation prononcée par le premier juge à l'encontre de la SNC Le Jarret et en ce qu'il condamne la SNC Le Jarret à garantir intégralement la SCI Activités courrier industriel des condamnations qu'il prononce contre elle en principal, intérêts, frais et dépens, l'arrêt rendu le 24 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne la société Face Languedoc Roussillon aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
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