mercredi 28 mai 2014

La Cour de cassation commente son arrêt de principe de 2013 sur la transmissibilité de l'action contractuelle du promoteur

http://www.courdecassation.fr/publications_26/rapport_annuel_36/livre_4_jurisprudence_cour_6619/arrets_rendus_chambres_6675/droit_immobilier_environnement_urbanisme_6678/vente_29238.html

Extrait du dernier rapport annuel de la Cour de cassation :

Vente – Immeuble – Accessoires – Action en réparation des dommages causés à l’immeuble – Exercice – Conditions – Détermination

3e Civ., 10 juillet 2013, pourvoi n° 12-21.910, Bull. 2013, III, n° 102

Un immeuble construit est vendu. Des malfaçons apparaissent. À qui appartient l’action en réparation du dommage, au vendeur ou à l’acquéreur ?

Si le désordre est né après la vente, l’action en responsabilité décennale appartient à l’acquéreur, nouveau propriétaire. Il s’agit de l’application de l’article 1792 du code civil, qui réserve cette action au maître ou à l’acquéreur de l’ouvrage.

Qu’en est-il si le désordre est né avant la vente.

La question est si délicate que la Cour de cassation a varié dans sa jurisprudence.

En 1975, elle a jugé que « les acquéreurs successifs d’un immeuble sont recevables à agir contre les constructeurs sur le fondement de la garantie décennale qui accompagne, en tant qu’accessoire, l’immeuble, nonobstant la connaissance, par les acquéreurs, des vices de celui-ci lors de la signature de l’acte de vente et l’absence, dans ce dernier, de clause prévoyant un tel recours » (3e Civ., 28 octobre 1975, pourvoi n° 74-10.842, Bull. 1975, III, n° 311).

En 1997, elle a retenu la position inverse en jugeant que « la vente de l’immeuble n’emporte pas de plein droit cession au profit de l’acquéreur des droits et actions à fin de dommages-intérêts qui ont pu naître au profit du vendeur en raison de dégradations causées à l’immeuble antérieurement à la vente » (3e Civ., 18 juin 1997, pourvoi n° 95-18.254, Bull. 1997, III, n° 149).

En 2009, procédant à un revirement, elle est revenue à la solution de 1975, en ajoutant à la réponse précitée l’expression « à moins que le vendeur ne puisse invoquer un préjudice personnel lui conférant un intérêt direct et certain à agir » (3e Civ., 23 septembre 2009, pourvoi n° 08-13.470, Bull. 2009, III, n° 202).
Cette dernière solution a été étendue à l’action en responsabilité contractuelle de droit commun (3e Civ., 7 novembre 2012, pourvoi n° 11-20.540).

Outre la raison juridique, expressément affirmée, liée à la théorie de l’accessoire, cette solution s’explique par la volonté de la Cour de conférer l’action, donc les fonds, à celui qui seul peut engager les réparations, l’acquéreur, nouveau propriétaire. Cette volonté correspond à celle du législateur, qui reconnaît l’action décennale à l’acquéreur de l’ouvrage.
Restait sans solution expresse, le cas où, le désordre étant né, le vendeur a engagé son action avant la vente.
Adoptant la même solution, la Cour de cassation juge, dans l’arrêt ici commenté, « que, sauf clause contraire, les acquéreurs successifs d’un immeuble ont qualité à agir, même pour les dommages nés antérieurement à la vente et ce nonobstant l’action en réparation intentée par le vendeur avant cette vente, contre les constructeurs sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun qui accompagne l’immeuble en tant qu’accessoire ».
La doctrine de la Cour est désormais bien fixée, étant observé que cette solution, adoptée en matière de responsabilité contractuelle, ne devrait pas être différente en matière de responsabilité décennale.
L’action se transmet à l’acquéreur avec l’immeuble vendu, que le désordre soit né après ou avant la vente, et ce même si le vendeur a, avant la vente, engagé une action en réparation. Restent deux dérogations possibles  : la clause contractuelle contraire et le préjudice personnel subi par le vendeur.

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