Arrêt commenté RTDI 2014, n° 2, p. 20, par M. Lionel-Marie.
Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 29 janvier 2014
N° de pourvoi: 13-10.833
Non publié au bulletin Cassation partielle
M. Terrier (président), président
Me Balat, avocat(s)
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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société Knappe composites du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Entreprise H. Darnis et Cie et la société Jad, anciennement dénommée Secoval ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 17 octobre 2012), que la société Knappe composites a conclu un marché de travaux avec la société Art métal soumis au cahier des clauses administratives générales ; que se prévalant de désordres affectant l'étanchéité à l'air et à l'eau des bâtiments, la société Knappe composites a refusé de signer le procès-verbal de réception et de payer le solde du marché et des travaux supplémentaires ; que la société Art métal l'a assignée en paiement ;
Sur le premier moyen, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :
Attendu que la société Knappe composites fait grief à l'arrêt de déclarer la société Art métal recevable en son action et de rejeter les fins de non-recevoir qu'elle a soulevées alors, selon le moyen :
1°/ que constitue une fin de non-recevoir la méconnaissance de l'obligation de recourir au préalable à une procédure de règlement amiable ou d'arbitrage ; que les fins de non-recevoir peuvent être invoquées en tout état de cause et notamment en appel ; qu'en écartant la fin de non-recevoir tirée des dispositions de l'article 21-2 du cahier des clauses administratives générales relatif à la procédure d'arbitrage au motif que cette procédure n'avait pas été évoquée avant que ne soit rendu le jugement avant dire droit du 21 juin 2006 désignant M. X... en qualité d'expert, la cour d'appel a violé les articles 122 et 123 du code de procédure civile ;
2°/ que la renonciation à un droit ne se présume pas ; que le fait de participer à une mesure d'instruction en vue de déterminer l'étendue des désordres n'implique pas, à lui seul, la volonté non équivoque de renoncer à une fin de non-recevoir invoquée ensuite dès le début de la procédure devant la juridiction du fond ; qu'en jugeant le contraire, par motifs propres et adoptés, la cour d'appel a violé le principe précité, l'article 122 du code de procédure civile et l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que l'article 21.2 de la norme NF P 03-001, en ce qu'il prévoit que « pour le règlement des contestations qui peuvent s'élever à l'occasion de l'exécution ou du règlement du marché, les parties doivent se consulter ou examiner l'opportunité de soumettre leur différend à un arbitrage ou pour refuser un arbitrage », n'institue pas une procédure obligatoire, préalable à la saisine du juge, dont le non-respect entraîne l'irrecevabilité de la demande ;
Que par ce motif de pur droit substitué à ceux critiqués, l'arrêt se trouve légalement justifié ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la société Knappe composites fait grief à l'arrêt de déclarer la société Art métal recevable en son action et de rejeter les fins de non-recevoir qu'elle a soulevées alors, selon le moyen :
1°/ que le marché de travaux du 10 juin 2003 stipule que le solde des travaux sera réglé « à la signature du procès-verbal de réception du bâtiment » ; qu'en estimant que la signature du procès-verbal de réception ne conditionnait pas l'exigibilité du solde du montant du marché de travaux, la cour d'appel a dénaturé ce document contractuel et violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que les parties peuvent contractuellement décider que la réception sera expresse ; qu'en estimant, par motifs adoptés du jugement qu'elle confirmait, que l'absence de signature du procès-verbal de réception ne faisait pas obstacle au paiement du solde du prix en raison d'une réception tacite de l'ouvrage cependant que le marché de travaux stipule que le solde des travaux sera réglé « à la signature du procès-verbal de réception du bâtiment », la cour d'appel a méconnu la volonté des parties et a violé l'article 1134 du code civil ;
3°/ qu'en l'absence d'une volonté non équivoque de recevoir l'ouvrage, la seule prise de possession des lieux par le maître de l'ouvrage est insuffisante pour caractériser l'existence d'une réception tacite ; qu'en estimant, par motifs adoptés du jugement qu'elle confirmait, que l'occupation du bâtiment par la société Knappe composites valait réception tacite des locaux, la cour d'appel, qui n'a pas constaté l'existence d'une volonté non équivoque du maître de l'ouvrage de recevoir cet ouvrage, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792-6 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu, par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation et rendue nécessaire par l'ambiguïté des termes de la clause relative au paiement des travaux, que la signature du procès-verbal de réception ne conditionnait pas l'exigibilité du solde du montant du marché car cela permettrait au maître de l'ouvrage en refusant de signer le procès-verbal, y compris sans motif légitime, de rendre sa propre dette non exigible, la cour d'appel a exactement déduit de ces seuls motifs que la fin de non-recevoir devait être rejetée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la société Knappe composites fait grief à l'arrêt de déclarer la société Art métal recevable en son action et de rejeter les fins de non-recevoir qu'elle a soulevées alors, selon le moyen, qu'aux termes de l'article 19.6.2 du cahier des clauses administratives générales applicable aux travaux de bâtiment faisant l'objet de marchés privés, rendu applicable en l'espèce par stipulation expresse du marché de travaux du 10 juin 2003, le maître de l'ouvrage notifie à l'entrepreneur le décompte définitif des sommes dues en exécution du marché ; qu'aux termes de l'article 19.6.3 du cahier des clauses administratives générales (« l'entrepreneur dispose d'un délai de trente jours à compter de la notification pour présenter par écrit ses observations éventuelles au maître d'¿uvre et pour en aviser simultanément le maître d'ouvrage. Passé ce délai, il est réputé avoir accepté le décompte définitif » ; qu'en estimant que les dispositions susvisées ne pouvaient pas recevoir application en l'espèce en raison de l'absence de maître d'¿uvre ayant pu examiner le décompte définitif notifié à la société Art métal, cependant que l'absence de maître d'¿uvre ne fait pas obstacle à la procédure prévue par le cahier des clauses administratives générales, les observations éventuelles de l'entrepreneur étant alors adressées au seul maître de l'ouvrage, la cour d'appel s'est déterminée par une motivation inopérante et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant exactement retenu qu'en l'absence de maître d'¿uvre ayant pu examiner le mémoire définitif, établir le décompte définitif des sommes dues en exécution du marché et le remettre au maître de l'ouvrage comme mentionné à l'article 19.6.1 du cahier des clauses administratives générales, les dispositions de l'article 19.6.3 prévues à la suite ne pouvaient recevoir application, la cour d'appel, qui en a déduit à bon droit que la fin de non-recevoir devait être rejetée, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Mais sur le quatrième moyen :
Vu l'article 1793 du code civil ;
Attendu que pour condamner la société Knappe composites à payer à la société Art métal la somme de 95 408,96 euros pour solde de ses travaux, outre intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts, l'arrêt retient que l'expert judiciaire a chiffré la somme restant due à la société Art métal au regard du montant du marché initial, des travaux supplémentaires acceptés les modalités applicables au marché de travaux, dont il n'a pas été démontré qu'il s'agissait d'un marché à forfait, et de l'avoir établi au profit de la société Knappe composites ;
Qu'en statuant ainsi, sans s'expliquer sur les raisons pour lesquelles elle écartait la qualification de marché à forfait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Knappe composites à payer à la société Art métal la somme de 95 408,96 euros, outre intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts, l'arrêt rendu le 17 octobre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la société Art métal aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Art métal à payer la somme de 3 000 euros à la société Knappe composites ;
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mercredi 16 juillet 2014
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