Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 19 mars 2020
N° de pourvoi: 18-25.395Non publié au bulletinCassation partielle sans renvoi
M. Chauvin (président), président
Me Le Prado, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat(s)
Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
CIV. 3
CM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 19 mars 2020
Cassation partielle
sans renvoi
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 230 F-D
Pourvoi n° A 18-25.395
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 MARS 2020
1°/ la société Albius, société civile de construction vente, dont le siège est [...] , représentée par la société Auber compagnie, liquidateur, dont le siège est [...] ,
2°/ M. C... W..., de la SELARL W..., domicilié [...] , en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Albius, ayant déclaré reprendre l'instance,
ont formé le pourvoi n° A 18-25.395 contre l'arrêt rendu le 21 septembre 2018 par la cour d'appel de Saint-Denis (chambre civile TGI), dans le litige les opposant à la société Les Grands travaux de l'Océan indien, société anonyme, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Jacques, conseiller, les observations de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Albius et de M. W..., ès qualités, de Me Le Prado, avocat de la société Les Grands travaux de l'Océan indien, et après débats en l'audience publique du 11 février 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Jacques, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Reprise d'instance
1. Il est donné acte à la société C... W... de sa reprise d'instance, en sa qualité de mandataire à la liquidation judiciaire de la société Albius.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis, 21 septembre 2018), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 8 décembre 2016, pourvois n° 14-17.812 et 14-20.221), la société Albius, ayant entrepris la construction d'un groupe d'immeubles comportant quatre-vingt-quinze logements, a confié à la société des Grands travaux de l'Océan indien (la société GTOI) le lot gros oeuvre.
3. Après expertise judiciaire, la société GTOI a assigné la société Albius, depuis en liquidation judiciaire, en paiement de situations impayées.
Examen des moyens
Sur les deux premiers moyens, ci-après annexés
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le troisième moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
5. La société Albius fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société GTOI des intérêts au taux légal majoré de sept points à compter du 15 mars 2010, date de l'assignation introductive d'instance, alors « que la norme Afnor P03-001, contractuellement rendue applicable au marché litigieux par le cahier des clauses administratives particulières, subordonnait le droit de l'entrepreneur au paiement d'intérêts moratoires à un taux égal au taux d'intérêt légal augmenté de 7 points, à une mise en demeure du maître de l'ouvrage par lettre recommandée, de sorte qu'en l'absence d'une telle mise en demeure, l'entrepreneur n'avait pas droit à des intérêts à ce taux conventionnel ; que la cour d'appel avait constaté l'absence de production aux débats par l'entrepreneur d'une lettre recommandée de mise en demeure du maître de l'ouvrage, ce dont il résultait que ledit entrepreneur, en l'absence d'une telle mise en demeure, n'avait pas droit à des intérêts au taux conventionnel ; qu'en condamnant néanmoins la société Albius au versement d'intérêts moratoires à ce taux conventionnel, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a méconnu ainsi la loi des parties, violant l'article 1134 ancien du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1134 et 1153 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :
6. Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
7. Dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, sauf les règles particulières au commerce et au cautionnement.
8. Pour condamner la société Albius à payer des intérêts au taux légal majoré de sept points à compter de l'assignation, l'arrêt retient que les parties ont expressément soumis le marché à la norme NF P03-001 qui prévoit que les retards de paiement ouvrent droit pour l'entrepreneur, après mise en demeure par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est égal au taux d'intérêt légal augmenté de sept points, que la société GTOI ne produit pas la lettre recommandée valant mise en demeure qui constitue le point de départ à compter duquel peuvent courir les intérêts moratoires et que ce point de départ doit donc être fixé au jour de l'assignation.
9. En statuant ainsi, alors que le droit à des intérêts de retard au taux contractuel était subordonné à une mise en demeure du maître de l'ouvrage par lettre recommandée, de sorte que, en l'absence d'une telle lettre, la condamnation au paiement du solde du marché ne pouvait être assortie que des intérêts au taux légal, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
10. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
11. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que qu'il fixe au taux légal majoré de sept points le taux des intérêts moratoires dus à compter du 15 mars 2010 par la société Albius à la société GTOI sur la somme de 295 008,65 euros, l'arrêt rendu le 21 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
DIT que les intérêts dus par la société Albius à la société GTOI sur la somme de 295 008,65 euros courent à compter du 15 mars 2010 au taux légal ;
Condamne la société GTOI aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
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