mercredi 19 avril 2023

Le juge doit préciser le fondement juridique de sa décision

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

SG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 30 mars 2023




Cassation


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 243 F-D

Pourvoi n° F 21-25.987




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 MARS 2023

La société Eden, entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], exerçant sous l'enseigne Coté Intérieur a formé le pourvoi n° F 21-25.987 contre l'arrêt rendu le 29 septembre 2021 par la cour d'appel de Cayenne (chambre civile), dans le litige l'opposant à M. [G] [Z], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Vernimmen, conseiller référendaire, les observations de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat de la société Eden, après débats en l'audience publique du 14 février 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Vernimmen, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Cayenne, 29 septembre 2021), M. [Z] a fait intervenir la société Eden pour équiper sa maison en menuiseries aluminium, carrelage et éléments de cuisine sur mesure.

2. L'ensemble de ces matériaux et éléments ont été livrés et posés en mars 2017.

3. N'ayant pas été réglée du solde de sa facture, la société Eden a assigné M. [Z] en paiement.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. La société Eden fait grief à l'arrêt d'infirmer partiellement le jugement et de rejeter sa demande en paiement d'une certaine somme, alors « qu'en soulevant d'office, sans inviter les parties à présenter leurs observations, le moyen tiré de ce que le devis du 21 avril 2016 n'avait pas été signé par M. [Z] et qu'il ne pouvait se déduire des circonstances ultérieures qu'il aurait été accepté par lui au rebours de ce qu'avait estimé le premier juge, lorsque l'appelant n'avait nullement contesté avoir contracté une telle dette auprès de la société Eden mais se bornait à contester la bonne exécution par son cocontractant de ses propres obligations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

5. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

6. Pour rejeter la demande en paiement de la société Eden, l'arrêt relève que M. [Z] avait signé divers devis et bons de commande à l'exclusion de celui du 21 avril 2016 puis retient que le courriel du 14 septembre 2017 n'étant pas probant, l'engagement contractuel de M. [Z] au titre du devis du 21 avril 2016 n'était pas établi.

7. En statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen relevé d'office et tiré du défaut du non-engagement contractuel résultant du devis du 21 avril 2016, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Et sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

8. La société Eden fait le même grief à l'arrêt, alors « que le juge doit trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables et préciser le fondement juridique de sa décision ; que pour infirmer le jugement entrepris et débouter la société Eden de sa demande, la cour d'appel s'est bornée à énoncer sans faire référence au moindre principe ou au moindre fondement juridique qu' « au regard des malfaçons affectant les travaux réalisés par la société intimée ou son sous-traitant, générant une dette indemnitaire dès lors que la reprise des travaux concernant la pose des menuiseries aluminium et des éléments de cuisine est nécessaire à leur utilisation normale, la créance dont la société Eden sollicite le paiement n'est pas certaine, liquide et exigible » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle a violé l'article 12 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 12, alinéa 1er, du code de procédure civile :

9. Aux termes de ce texte, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables.

10. Pour rejeter la demande en paiement de la société Eden, l'arrêt retient qu'au regard des malfaçons affectant les travaux réalisés par la société Eden générant une dette indemnitaire dès lors que la reprise des travaux concernant la pose des menuiseries aluminium et des éléments de cuisine était nécessaire à leur utilisation normale, la créance dont la société Eden sollicitait le paiement n'était pas certaine, liquide et exigible.

11. En statuant ainsi, sans préciser le fondement juridique de sa décision, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 septembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Cayenne ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Cayenne autrement composée ;

Condamne M. [Z] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de société Eden ;

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