Cour de cassation - Chambre civile 2
- N° de pourvoi : 21-20.947
- ECLI:FR:CCASS:2023:C200391
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du jeudi 13 avril 2023
Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, du 10 juin 2021Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 13 avril 2023
Rejet
Mme MARTINEL, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 391 F-D
Pourvoi n° C 21-20.947
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 AVRIL 2023
La société Altech géothermie, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° C 21-20.947 contre l'arrêt rendu le 10 juin 2021 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section SB), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [Y] [R], domicilié [Adresse 4],
2°/ à Mme [N] [P], prise en son nom personnel et en qualité de représentante légale de sa fille, [V] [R],
3°/ à Mme [V] [R], représentée par sa mère, Mme [N] [P],
toutes deux domiciliées étage [Adresse 1],
4°/ à la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin, dont le siège est [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Durin-Karsenty, conseiller, les observations de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société Altech géothermie, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 mars 2023 où étaient présentes Mme Martinel, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Durin-Karsenty, conseiller rapporteur, Mme Vendryes, conseiller, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 10 juin 2021), [T] [R], salarié de la société Altech géothermie, est décédé d'une chute le 14 janvier 2010 alors qu'il intervenait seul sur le chantier d'une maison en construction pour effectuer des travaux de finition sur la chaufferie.
2. Poursuivi du chef d'homicide involontaire, la société Altech géothermie (la société) et la société Immobilière du Haut-Rhin, maître d'oeuvre, ont été relaxées par un arrêt définitif du 5 avril 2017.
3. M. [Y] [R], ayant droit de la victime, a saisi un tribunal des affaires de sécurité sociale qui, par jugement du 14 août 2018, a dit que l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur, que la rente d'ayant droit sera due jusqu'à l'âge de 20 ans, en la fixant à son maximum, et condamné la société à une certaine somme à titre de préjudice moral. Mme [P], agissant tant en son nom qu'en qualité de représentante légale de sa fille mineure, [V] [R], ayants droit de la victime, ont saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale aux mêmes fins et par jugement du 4 novembre 2019, le tribunal a fait droit à leurs demandes.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. La société fait grief à l'arrêt de dire que l'accident du travail mortel dont [T] [R] a été victime le 14 janvier 2010 est dû à la faute inexcusable de son employeur, la société, de fixer au maximum la majoration des rentes d'ayants droit dues à M. [Y] [R] et à Mme [V] [R], et dit que cette majoration leur sera due jusqu'à l'âge de 20 ans, de fixer à la somme de 10 000 euros le préjudice moral de M. [Y] [R], à la somme de 20 000 euros le préjudice moral de Mme [N] [P] et à la somme de 15 000 euros le préjudice moral de Mme [V] [R], de condamner la société Altech géothermie à rembourser à la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin le montant de la majoration des rentes et de l'indemnisation des préjudices moraux avancé par la caisse et de dire l'arrêt opposable à la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin, alors « que les décisions définitives des juridictions pénales statuant au fond sur l'action publique ont au civil autorité absolue, à l'égard de tous, en ce qui concerne ce qui a été nécessairement jugé quant à l'existence du fait incriminé, sa qualification et la culpabilité ou l'innocence de ceux auxquels le fait est imputé ; que l'arrêt définitif de la cour d'appel de Colmar du 5 avril 2017 a, pour relaxer la société Altech géothermie du chef d'homicide involontaire, dans le cadre d'une relation de travail, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, jugé que rien n'avait permis de déterminer les causes de la chute de M. [R], cause de son décès, que, compte tenu du très long délai écoulé entre la mise en service du système de chauffage par la société Altech géothermie et l'intervention de son salarié pour un simple travail de finitions s'apparentant à une prestation de maintenance ou de service après-vente, le responsable de la société Altech géothermie était en droit de penser que le chantier était totalement terminé y compris s'agissant de la protection de la trémie de l'escalier et qu'en envoyant seul M. [R] dans la maison afin d'y effectuer quelques finitions sur le système de chauffage installé depuis plusieurs mois, le responsable de la société Altech géothermie s'est comporté comme un homme normalement diligent et qu'il ne peut lui être reproché aucun manquement ou négligence ; qu'en jugeant, pour retenir que l'accident du travail mortel dont M. [R] a été victime était dû à la faute inexcusable de son employeur, que la société Altech géothermie qui ne s'est pas assurée et n'a pas vérifié les conditions dans lesquelles M. [R] allait intervenir sur le chantier, aurait dû avoir conscience du danger auquel a été exposé son salarié et n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver, la cour d'appel qui a ainsi fondé sa décision sur un manquement de la société Altech géothermie à son obligation de sécurité et une conscience du danger que le juge répressif avait exclus de même qu'il avait exclu tout lien de causalité entre les manquements reprochés à cette société et la chute de M. [R] aux causes demeurées inconnues, a violé le principe de l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil et l'article 1355 du code civil, ensemble l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale. »
Réponse de la Cour
5. Ayant, d'abord, rappelé que l'arrêt pénal retient que si la cause du décès de M. [R] a été sa chute depuis l'étage par une trémie non protégée, rien en revanche n'a permis de déterminer les causes de cette chute et qu'un doute subsiste sur les raisons pour lesquelles il a chuté d'un étage de la maison, et ensuite relevé qu'il résulte des constatations de l'inspecteur du travail, des enquêteurs et des photographies, l'absence de garde-corps au niveau de l'escalier d'où la victime est tombée, alors qu'elle ne bénéficiait d'aucun moyen de protection et que le responsable de la société, s'il pouvait penser que le chantier était entièrement terminé, ne s'en est pas assuré et n'a pas vérifié les conditions dans lesquelles le salarié allait intervenir sur le chantier, faisant ainsi ressortir que l'employeur, qui aurait dû avoir conscience du danger auquel a été exposé son salarié, n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver, c'est sans encourir le grief allégué que la cour d'appel a retenu la faute inexcusable de l'employeur.
6. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Altech géothermie aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 13 avril 2023
Rejet
Mme MARTINEL, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 391 F-D
Pourvoi n° C 21-20.947
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 AVRIL 2023
La société Altech géothermie, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° C 21-20.947 contre l'arrêt rendu le 10 juin 2021 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section SB), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [Y] [R], domicilié [Adresse 4],
2°/ à Mme [N] [P], prise en son nom personnel et en qualité de représentante légale de sa fille, [V] [R],
3°/ à Mme [V] [R], représentée par sa mère, Mme [N] [P],
toutes deux domiciliées étage [Adresse 1],
4°/ à la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin, dont le siège est [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Durin-Karsenty, conseiller, les observations de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société Altech géothermie, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 mars 2023 où étaient présentes Mme Martinel, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Durin-Karsenty, conseiller rapporteur, Mme Vendryes, conseiller, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 10 juin 2021), [T] [R], salarié de la société Altech géothermie, est décédé d'une chute le 14 janvier 2010 alors qu'il intervenait seul sur le chantier d'une maison en construction pour effectuer des travaux de finition sur la chaufferie.
2. Poursuivi du chef d'homicide involontaire, la société Altech géothermie (la société) et la société Immobilière du Haut-Rhin, maître d'oeuvre, ont été relaxées par un arrêt définitif du 5 avril 2017.
3. M. [Y] [R], ayant droit de la victime, a saisi un tribunal des affaires de sécurité sociale qui, par jugement du 14 août 2018, a dit que l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur, que la rente d'ayant droit sera due jusqu'à l'âge de 20 ans, en la fixant à son maximum, et condamné la société à une certaine somme à titre de préjudice moral. Mme [P], agissant tant en son nom qu'en qualité de représentante légale de sa fille mineure, [V] [R], ayants droit de la victime, ont saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale aux mêmes fins et par jugement du 4 novembre 2019, le tribunal a fait droit à leurs demandes.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. La société fait grief à l'arrêt de dire que l'accident du travail mortel dont [T] [R] a été victime le 14 janvier 2010 est dû à la faute inexcusable de son employeur, la société, de fixer au maximum la majoration des rentes d'ayants droit dues à M. [Y] [R] et à Mme [V] [R], et dit que cette majoration leur sera due jusqu'à l'âge de 20 ans, de fixer à la somme de 10 000 euros le préjudice moral de M. [Y] [R], à la somme de 20 000 euros le préjudice moral de Mme [N] [P] et à la somme de 15 000 euros le préjudice moral de Mme [V] [R], de condamner la société Altech géothermie à rembourser à la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin le montant de la majoration des rentes et de l'indemnisation des préjudices moraux avancé par la caisse et de dire l'arrêt opposable à la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin, alors « que les décisions définitives des juridictions pénales statuant au fond sur l'action publique ont au civil autorité absolue, à l'égard de tous, en ce qui concerne ce qui a été nécessairement jugé quant à l'existence du fait incriminé, sa qualification et la culpabilité ou l'innocence de ceux auxquels le fait est imputé ; que l'arrêt définitif de la cour d'appel de Colmar du 5 avril 2017 a, pour relaxer la société Altech géothermie du chef d'homicide involontaire, dans le cadre d'une relation de travail, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, jugé que rien n'avait permis de déterminer les causes de la chute de M. [R], cause de son décès, que, compte tenu du très long délai écoulé entre la mise en service du système de chauffage par la société Altech géothermie et l'intervention de son salarié pour un simple travail de finitions s'apparentant à une prestation de maintenance ou de service après-vente, le responsable de la société Altech géothermie était en droit de penser que le chantier était totalement terminé y compris s'agissant de la protection de la trémie de l'escalier et qu'en envoyant seul M. [R] dans la maison afin d'y effectuer quelques finitions sur le système de chauffage installé depuis plusieurs mois, le responsable de la société Altech géothermie s'est comporté comme un homme normalement diligent et qu'il ne peut lui être reproché aucun manquement ou négligence ; qu'en jugeant, pour retenir que l'accident du travail mortel dont M. [R] a été victime était dû à la faute inexcusable de son employeur, que la société Altech géothermie qui ne s'est pas assurée et n'a pas vérifié les conditions dans lesquelles M. [R] allait intervenir sur le chantier, aurait dû avoir conscience du danger auquel a été exposé son salarié et n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver, la cour d'appel qui a ainsi fondé sa décision sur un manquement de la société Altech géothermie à son obligation de sécurité et une conscience du danger que le juge répressif avait exclus de même qu'il avait exclu tout lien de causalité entre les manquements reprochés à cette société et la chute de M. [R] aux causes demeurées inconnues, a violé le principe de l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil et l'article 1355 du code civil, ensemble l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale. »
Réponse de la Cour
5. Ayant, d'abord, rappelé que l'arrêt pénal retient que si la cause du décès de M. [R] a été sa chute depuis l'étage par une trémie non protégée, rien en revanche n'a permis de déterminer les causes de cette chute et qu'un doute subsiste sur les raisons pour lesquelles il a chuté d'un étage de la maison, et ensuite relevé qu'il résulte des constatations de l'inspecteur du travail, des enquêteurs et des photographies, l'absence de garde-corps au niveau de l'escalier d'où la victime est tombée, alors qu'elle ne bénéficiait d'aucun moyen de protection et que le responsable de la société, s'il pouvait penser que le chantier était entièrement terminé, ne s'en est pas assuré et n'a pas vérifié les conditions dans lesquelles le salarié allait intervenir sur le chantier, faisant ainsi ressortir que l'employeur, qui aurait dû avoir conscience du danger auquel a été exposé son salarié, n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver, c'est sans encourir le grief allégué que la cour d'appel a retenu la faute inexcusable de l'employeur.
6. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Altech géothermie aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
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