Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 4 février 2016
N° de pourvoi: 15-10.107
Non publié au bulletin Cassation partielle
Mme Flise (président), président
Me Bouthors, Me Le Prado, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat(s)
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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société Generali IARD (la société Generali) du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mme X... ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Buresi AJP était sous-locataire de locaux commerciaux dépendant d'un immeuble en copropriété situé au 54 cours Napoléon à Ajaccio, donnés à bail par Mme Y... à la société Méditerranéenne d'investissement et de participation (la société MIP), qui ont été endommagés à la suite d'un premier sinistre déclaré le 7 mai 2009, provoqué par des fissures en façade de l'immeuble, puis d'un second, provoqué, après le 12 mars 2010, par des infiltrations d'eau provenant, selon les conclusions d'un expert désigné en référé, de l'une des façades de l'immeuble ainsi que d'un logement loué par Mme Z... à Mme X..., assuré auprès de la société MAIF (la MAIF) ; que la société Buresi AJP a assigné la société MIP, le syndicat des copropriétaires du 54 cours Napoléon à Ajaccio (le syndicat des copropriétaires) et son assureur, la société Generali, ainsi que Mme X..., aux fins, notamment, d'indemnisation de ses préjudices résultant de l'impossibilité de poursuivre l'exploitation commerciale des lieux ; que Mme Y... est intervenue volontairement à la procédure ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le troisième moyen du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident du syndicat des copropriétaires, ainsi que sur la seconde branche du premier moyen du pourvoi incident de Mme Z... et de la MAIF, annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le deuxième moyen du pourvoi principal de la société Generali pris en sa première branche :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour dire que la société Generali devra relever et garantir le syndicat des copropriétaires de toute condamnation, l'arrêt énonce qu'elle soutient que les dommages occasionnés par des infiltrations en façade sont exclus du champ d'application du contrat, tel que cela ressort de ses conditions générales datées du 5 novembre 1982, qu'elle communique sans préciser à quel paragraphe des 24 pages du document elle fait allusion et sans produire les conditions particulières de la convention ni aucun élément susceptible en l'espèce de l'exonérer de cette garantie ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la société Generali invoquait la clause d'exclusion des sinistres ayant pour origine un défaut d'entretien de l'immeuble et soutenait que, selon l'expert, les infiltrations litigieuses imputables aux parties communes de l'immeuble relevaient d'un tel manquement, et alors que le document de 24 pages qu'elle produisait renfermait l'ensemble des stipulations contractuelles de l'assurance, dont l'exclusion de garantie dont elle se prévalait ainsi, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident de Mme Z... et de la MAIF pris en sa première branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour condamner Mme Z..., sous la garantie de la MAIF, à payer à la société Buresi AJP une certaine somme au titre de la perte de son fonds de commerce, l'arrêt énonce qu'il résulte des pièces versées aux débats et du rapport de l'expert judiciaire qu'un premier sinistre a été déclaré le 7 mai 2009, qu'un huissier de justice a constaté des infiltrations les 7 avril et 18 mai 2010, et l'expert judiciaire a lui-même constaté les dommages le 25 novembre 2010 ; qu'entretemps, les 25 mai et 8 juin 2010, un plombier était intervenu sur une fuite affectant l'installation sanitaire privative de Mme Z... ; que l'expert a conclu que les dommages avaient deux origines distinctes : d'une part, des infiltrations par un réseau d'importantes fissures ouvertes sur la façade et des coulures depuis la gouttière, d'autre part, la fuite qui s'est produite dans l'appartement de Mme Z...; qu'il ne résulte pas des pièces versées aux débats que les fissures sur la façade aient fait l'objet d'un traitement avant le 16 janvier 2012 ; que les constatations qui ont pu être réalisées après l'expertise, le 16 septembre 2011, le 3 septembre 2012 et le 29 octobre 2013 font état de présence d'humidité dans le local en question et même d'infiltrations importantes dans les appartements du premier étage et du troisième étage ; qu'il est établi par le rapport Eurexo en date du 12 mars 2010 qu'à cette date l'appartement de Mme Z...présentait dans la salle de bain des traces d'humidité provenant du plafond, mais que les canalisations n'étaient pas fuyardes et que le sol était sec ; qu'ainsi la fuite réparée le 25 mai 2010 ne peut qu'être postérieure au 12 mars 2010 ; que contrairement aux infiltrations de la façade l'infiltration en provenance de la canalisation d'eau froide du cumulus de l'appartement a été temporaire et rapidement résolue ; que ces éléments conduisent donc la cour d'appel à estimer la responsabilité du syndicat des copropriétaires à deux tiers et celle de Mme Z... à un tiers ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ces constatations que le sinistre survenu dans les locaux sous-loués à la société Buresi AJP s'était déclaré une première fois le 7 mai 2009 et avait été constaté les 7 avril, 18 mai et 25 novembre 2010, et qu'il avait deux origines, à savoir d'importantes infiltrations dues à des fissures sur la façade de l'immeuble ainsi qu'une fuite dans l'appartement de Mme Z...qui n'existait pas au 12 mars 2010, laquelle a été réparée dès les 25 mai et 8 juin 2010, et sans répondre à Mme Z... et à la MAIF qui faisaient valoir que, selon l'expert de l'assureur de la société Buresi AJP, la visite contradictoirement organisée le 11 mars 2010 avait permis de constater que le local était alors inexploitable et d'ailleurs fermé, et qu'ainsi cette fermeture, comme l'impossibilité d'exploiter, dont résultait la perte du fonds de commerce, étaient antérieures à la fuite dans l'appartement de Mme Z..., et donc exclusivement imputables aux infiltrations par la façade de l'immeuble, de sorte que la responsabilité de Mme Z... ne pouvait être retenue de ce chef, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi incident de Mme Z... et de la MAIF :
Vu l'article 1384, alinéa 1er, du code civil ;
Attendu que pour condamner Mme Z..., sous la garantie de la MAIF, à payer, à raison d'un tiers, à la société Buresi AJP le montant des loyers afférents au local sous-loué à cette société, depuis le mois de janvier 2010 et jusqu'à la date de la décision du premier juge, l'arrêt, après avoir relevé que l'expert judiciaire avait conclu que les dommages affectant ce local avaient deux origines distinctes : d'une part, des infiltrations par un réseau d'importantes fissures ouvertes sur la façade de l'immeuble de la copropriété, d'autre part, la fuite qui s'est produite dans l'appartement de Mme Z..., et constaté ensuite qu'il était établi par un rapport Eurexo en date du 12 mars 2010 qu'à cette date l'appartement de Mme Z...présentait dans la salle de bain des traces d'humidité provenant du plafond, mais que les canalisations n'étaient pas fuyardes et que le sol était sec, de sorte que la fuite réparée le 25 mai 2010 ne pouvait qu'être postérieure au 12 mars 2010, énonce que le paiement des loyers en pure perte depuis le 1er janvier 2010 jusqu'à la date du jugement par la société Buresi qui n'a pas pu exercer son activité à compter de 2010, constitue un poste de préjudice qui doit être, en application de l'article 1384 du code civil sur la responsabilité du fait des choses, pris en charge par le syndicat des copropriétaires pour deux tiers et Mme Z... pour un tiers ;
Qu'en faisant ainsi peser pour partie sur Mme Z... la charge de la réparation due pour l'intégralité de la perte de loyers subie par la société Buresi AJP depuis le 1er janvier 2010, alors qu'elle retenait que
la fuite provenant de son appartement ne pouvait qu'être postérieure au 12 mars 2010, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte susvisé ;
Et sur le troisième moyen du pourvoi incident de Mme Z... et de la MAIF :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que l'arrêt condamne Mme Z..., sous la garantie de la MAIF, à payer à Mme Y... un tiers de la somme de 19 488, 60 euros au titre des travaux de remise en état ;
Qu'en statuant ainsi, alors que Mme Y... sollicitait à ce titre la condamnation de la seule société MIP à lui payer les sommes nécessaires aux réparations, la cour d'appel, qui a méconnu les termes du litige, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal :
Met, sur sa demande, la société Generali hors de cause sur le deuxième moyen du pourvoi incident de Mme Z... et de la MAIF ;
Met, sur leur demande, la société Generali et la société Buresi AJP hors de cause sur le troisième moyen du pourvoi incident de Mme Z... et de la MAIF ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne Mme Andrée Y..., épouse Z..., sous la garantie de la MAIF, à payer à la société Buresi AJP la somme de 69 329, 33 euros au titre de la perte de son fonds de commerce et, à raison d'un tiers, le montant des loyers afférents au local sous-loué à cette société, depuis le mois de janvier 2010 et jusqu'à la date de la décision du premier juge, et à Mme Laure Y... un tiers de la somme de 19 488, 60 euros au titre des travaux de remise en état de ce local, l'arrêt rendu le 5 novembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; remet en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Condamne le syndicat des copropriétaires du 54 cours Napoléon à Ajaccio et la société Buresi AJP aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Buresi AJP et le syndicat des copropriétaires du 54 cours Napoléon à Ajaccio in solidum à payer à la société Generali IARD la somme globale de 3 000 euros, le syndicat des copropriétaires du 54 cours Napoléon à Ajaccio à payer à la société Buresi AJP la somme de 3 000 euros, la société Buresi AJP à payer à Mme Z... et à la société MAIF la somme globale de 3 000 euros ; rejette les autres demandes ;
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