Actualité 2016 de
l’assurance construction
La validité des clauses d’exclusion
L’assureur ne peut se
prévaloir d’une exclusion contenue dans les conditions générales faute de les
joindre aux conditions spéciales et d’approbation formelle de la part de
l'assuré
Cass. 3e civ., 21
janv. 2016, n° 14-25.829, RGDA2016.126, A. Pelissier:
“Attendu, d'une part,
que, la société L'Auxiliaire ne s'étant pas prévalue dans ses conclusions
d'appel d'une connaissance par l'assuré des stipulations des conditions
générales par la référence à celles-ci dans les conventions spéciales, le moyen
est nouveau, mélangé de fait et de droit ;
Attendu, d'autre part,
qu'ayant souverainement retenu que, compte tenu de la mise en page et de
l'espacement entre les « conditions », seules les conditions spéciales avaient
été jointes aux conditions particulières et étaient opposables à l'assuré et
relevé que les conditions générales n'avaient fait l'objet par ailleurs
d'aucune approbation formelle de la part de l'assuré, la cour d'appel, qui
n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a
pu en déduire, abstraction faite d'un motif surabondant, sans dénaturation, que
la société L'Auxiliaire ne pouvait pas se prévaloir de la clause d'exclusion
contenue dans les conditions générales ; »
A l’inverse, l’assuré
voulant se prévaloir d’une garantie doit en apporter la preuve. La production
de conditions particulières renvoyant systématiquement à des conditions
générales non communiquées par l’assuré est insuffisante.
Cass. 2e civ., 10
déc. 2015, n° 14-29.428, RGDA2016.126, A. Pelissier:
« Mais attendu
que l'arrêt retient que les conditions générales en vigueur à la date du
contrat d'assurance GIX souscrit le 12 mars 1981 n'ont pas été produites ; que
M. X...ne peut soutenir que l'acte signé le 12 mars 1981 portant conditions
particulières se suffit à lui-même pour déterminer le montant de l'indemnité
due par l'assureur en exécution du contrat, alors que ce document effectue
systématiquement des renvois aux articles des conditions générales ; que si les
conditions particulières suffisent à faire preuve de l'existence du contrat
liant M. X...à l'assureur, elles ne permettent pas de faire la preuve de
l'étendue ainsi que des conditions de la garantie dont M. X...demande la mise
en oeuvre ; que l'assureur ne peut se voir imposer de faire la preuve, à la
place de son assuré, des clauses en vigueur au 12 mars 1981 qui déterminent le
champ des garanties et le mode de calcul contractuel de l'indemnité dont il
demande le paiement ; que les demandes en paiement de M. X...qui ne met pas la
cour d'appel en position de procéder à l'évaluation des indemnités prévues au
contrat, ne peuvent être satisfaites, peu important l'accord très limité des
parties sur le taux d'IPP et l'application des tarifs mis à jour en 1998 ;
Que de ces constatations
et énonciations, découlant de son appréciation souveraine de la valeur et de la
portée des éléments de preuve soumis à son examen, la cour d'appel a pu
déduire, hors de toute dénaturation des stipulations contractuelles et sans
inverser la charge de la preuve, que M. X...n'établissait pas le contenu de la
garantie souscrite ».
La Cour de cassation
contrôle régulièrement le caractère formel et limité des clauses d’exclusion :
Clause relative aux
travaux exécutés par l’assuré sujette à interprétation
Cass. 3e civ., 27
octobre 2016, n° 15-23.841, D. Noguéro RDI 2016.654 :
« Attendu, selon
l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 juin 2015), rendu sur renvoi après
cassation (Civ. 3e, 29 mai 2013, pourvoi n° 12-17.205), que la société civile
immobilière Le Sénateur (la SCI) a confié la réalisation de travaux de
surélévation d'un immeuble à la société Provence bâtiments, assurée au titre
d'une police d'assurance multirisque professionnelle par la société MAAF
assurances (la MAAF) ; que, se plaignant de désordres et de l'abandon du
chantier, la SCI a, après expertise, assigné en indemnisation les constructeurs
et la MAAF ;
Attendu que, pour
infirmer le chef du jugement condamnant la MAAF à relever et garantir la
société Provence bâtiments des condamnations prononcées au bénéfice de la SCI,
l'arrêt retient que la clause prévue à l'article 5-13 du contrat d'assurance
multirisque professionnelle souscrit auprès de la MAAF ne réduit pas à néant la
garantie des dommages ayant pour cause l'exécution de travaux par l'assuré dès
lors que restent garantis les dommages corporels et les dommages matériels
autres que les frais de reprise, dépose ou repose de ces travaux et qu'il
s'agit d'une exclusion formelle et limitée dont la MAAF est en droit de se
prévaloir ;
Qu'en statuant ainsi,
alors que la clause précitée, qui exclut « les frais exposés pour le
remplacement, la remise en état ou le remboursement des biens que vous avez
fournis et/ou pour la reprise des travaux exécutés par vos soins, cause ou
origine du dommage, ainsi que les frais de dépose et repose et les dommages
immatériels qui en découlent », était sujette à interprétation, ce qui excluait
qu'elle fût formelle et limitée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; ».
Clause relative aux
travaux exécutés par l’assuré : formelle et limité et ne vidant pas le
contrat de sa substance.
Civ. 2e, 19 mai 2016,
n° 15-18.545, RGDA 2016. 372, P. Dessuet.
« Attendu, selon l'arrêt attaqué, que
M. et Mme X... ont confié la construction d'une maison à ossature de bois à M.
Y..., assuré auprès de la société Mutuelles du Mans assurances IARD (la société
MMA) ; que les travaux ont été interrompus en cours de chantier ; que M. et
Mme X..., se plaignant de malfaçons, ont fait assigner en paiement de
diverses sommes M. Y... qui a appelé la société MMA en garantie ;
Sur le moyen unique, pris en sa première
branche :
Vu l'article L. 113-1 du code des
assurances ;
Attendu que pour condamner la société MMA
à garantir M. Y... de toutes les condamnations prononcées contre lui, l'arrêt
relève que M. Y... a souscrit une garantie dénommée " responsabilité
civile avant achèvement " qui garantit l'assuré, selon l'article 21 des
conditions spéciales 971, contre les conséquences pécuniaires de la
responsabilité civile qui peut lui incomber en raison des dommages corporels,
des dommages matériels, des dommages immatériels consécutifs à des dommages
corporels et matériels garantis, subis par autrui et imputables à son activité
professionnelle, et retient que le contrat applicable prévoit des exclusions,
dont certaines ne sont ni formelles ni limitées, qui annulent pratiquement toutes
les garanties prévues en précisant que tel est le cas de l'exclusion générale
visant " les dommages subis par les ouvrages ou travaux effectués par
l'assuré et ses sous-traitants " ;
Qu'en statuant ainsi alors que cette
clause, claire et précise, laissant dans le champ de la garantie les dommages
autres que ceux résultant des malfaçons affectant les ouvrages ou travaux, est
formelle et limitée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le moyen unique, pris en sa
troisième branche :
Vu l'article L. 113-1 du code des
assurances ;
Attendu que pour statuer comme il le fait,
l'arrêt, après avoir énuméré un certain nombre d'exclusions et d'extensions de
garanties figurant dans les conditions spéciales applicables, se borne à
affirmer que par leur nombre et leur étendue, les clauses d'exclusion, dont
certaines ne sont ni formelles ni limitées, annulent pratiquement toutes les
garanties prévues et que le rapprochement de l'étendue du risque garanti
couvrant les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile qui peut
incomber à l'assuré pour les dommages subis par autrui et imputables à son
activité professionnelle, de toutes les clauses d'exclusion permet de conclure
que celle-ci est trop largement amputée et vidée de sa substance ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans préciser
la portée de chacune des clauses d'exclusion au regard du champ de la garantie,
la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son
contrôle, a privé sa décision de base légale ; »
Clause vidant le contrat
de sa substance
Cass. 3e civ., 13
octobre 2016, n°15-13.445 et 15-14.608 :
« Attendu, selon
l'arrêt attaqué (Paris, 19 décembre 2014), que la société Rabot Dutilleul
construction (société Rabot), entreprise générale chargée de la construction
d'un immeuble, a confié le lot « espaces verts » à la société Voisin parcs et
jardins (société Voisin), sous-traitant, assurée en garantie civile
contractuelle auprès de la société Axa ; que la réception des travaux est
intervenue avec réserves ; que, des infiltrations en terrasse étant apparues,
la société Rabot a, après expertise, assigné les sociétés Voisin et Axa en
paiement de sommes ; que la société Voisin a formé une demande
reconventionnelle en paiement d'un solde de facture ;
[…]
Mais attendu qu'ayant
relevé que les travaux de reprise consistaient en l'enlèvement des terres et la
remise en état des lieux, et que la société Axa garantissait la
responsabilité de la société Voisin après livraison relativement aux dommages
ayant pour origine une erreur de conception, une erreur dans l'exécution des
prestations ou une malfaçon des travaux exécutés, la cour d'appel, répondant
aux conclusions prétendument délaissées, a pu retenir que les clauses prévoyant
l'exclusion des « frais de retrait des produits livrés par l'assuré » et des «
frais engagés pour remédier à un défaut, réparer, parachever ou refaire le
travail, remplacer tout ou partie du produit » vidaient la garantie de sa
substance et condamner la société Axa à garantir la société Voisin ; »
Clause d’exclusion et
condition de garantie
Cass. 3e civ., 7 avr.
2016, n° 15-13393, (Police « en péril dénommé et pas en tous sauf »).
EDAS 2016, n°6, p.4, C.
Charbonneau :
« Attendu, selon
l'arrêt attaqué (Chambéry, 6 janvier 2015), que M. Y... a conclu un contrat de
promotion immobilière avec la société Pro Invest, mise par la suite en
liquidation judiciaire, pour la construction d'une maison d'habitation ; que le
promoteur avait confié le lot « plomberie chauffage ventilation » à M. X...,
assuré auprès de la société Axa France IARD ; qu'après réception prononcée avec
des réserves, M. Y... s'est plaint de désordres affectant les travaux confiés à
M. X... et a, après expertise, assigné celui-ci en indemnisation de ses
préjudices ; que M. X... a appelé en garantie son assureur ;
[…]
Mais attendu
qu'ayant relevé que les conditions particulières de la police renvoyaient à
l'article 13 des conditions générales selon lequel l'assureur s'engageait à
prendre en charge les conséquences pécuniaires de la responsabilité incombant à
l'assuré en raison des préjudices causés à autrui ne consistant pas en dommages
matériels ou immatériels de construction, ce dont il résulte que cette stipulation
constituait une condition de la garantie échappant aux prévisions de l'article
L. 113-1 du code des assurances, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de
procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante et qui en a
exactement déduit que la demande en garantie formée contre l'assureur devait
être rejetée, a légalement justifié sa décision » ;
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