Actualité 2016 de
l’assurance construction
La prescription biennale
Sur la prescription biennale et la durée de la garantie
dommages-ouvrage voir ci-après.
Est inopposable à l’assuré la
clause du contrat d'assurance relative à la prescription ne précisant pas que
la lettre recommandée avec demande d'avis de réception, pour être interruptive
de prescription, doit concerner le règlement de l'indemnité
Cass. 2e civ., 7 avr. 2016,
n° 15-14.154, RGDA2016.300 M. Asselain :
« Mais attendu qu'aux
termes de l'article R. 112-1 du code des assurances, les polices d'assurance
relevant des branches 1 à 17 de l'article R. 321-1 doivent rappeler les
dispositions des titres Ier et II, du livre Ier de la partie législative du code
des assurances concernant la prescription des actions dérivant du contrat
d'assurance ; qu'il en résulte que l'assureur est tenu de rappeler dans le
contrat d'assurance, sous peine d'inopposabilité à l'assuré du délai de
prescription édicté par l'article L. 114-1 du code des assurances, les causes
d'interruption de la prescription biennale prévues à l'article L. 114-2 du même
code ;
Et attendu qu'ayant constaté
que la clause du contrat d'assurance relative à la prescription ne précisait
pas que la lettre recommandée avec demande d'avis de réception, pour être
interruptive de prescription, doit concerner le règlement de l'indemnité, la
cour d'appel en a exactement déduit que cette mention était insuffisante et que
le délai de prescription était inopposable à l'assuré ; »
Il est en de même si les
dispositions générales des contrats ne précisaient pas toutes les causes
ordinaires d'interruption de la prescription.
Cass. 2e civ., 4 frév. 2016,
n°15.14.649 :
« Attendu que, pour
déclarer les demandes de M. X... irrecevables comme prescrites, l'arrêt énonce
que les dispositions générales du contrat multirisques de la société
Continent indiquent, sous la rubrique « Prescription »: «Toutes actions
relatives au présent contrat sont prescrites par deux ans à compter de
l'événement qui leur a donné naissance. La prescription peut être interrompue
dans les cas suivants : désignation d'un expert à la suite d'un sinistre, envoi
d'une lettre recommandée avec accusé de réception : par nous en ce qui concerne
le paiement de la cotisation, par vous en ce qui concerne le règlement de
l'indemnité, citation en justice (même référé), commandement ou saisie signifié
à celui que l'on veut empêcher de prescrire » ; que les dispositions
générales du contrat multirisques de l'assureur, sous la même rubrique «
Prescription », indiquent : « Toutes les actions concernant ce contrat,
qu'elles émanent de vous ou de nous, doivent être exercées dans un délai de
deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance. La prescription peut
être interrompue par : désignation d'un expert, envoi d'une lettre recommandée
avec accusé de réception adressée par nous en ce qui concerne le paiement de la
cotisation et par vous en ce qui concerne le règlement d'un sinistre, saisine
d'un tribunal même en référé, toute autre cause ordinaire » ; que l'assureur a
donc respecté ses obligations d'information telles qu'elles résultaient des
articles L. 114-1 et R. 112-1 du code des assurances ;
Qu'en statuant ainsi, alors
qu'il résultait de ses constatations que les dispositions générales des
contrats ne précisaient pas toutes les causes ordinaires d'interruption de la
prescription, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; »
La lettre recommandée de
l’assuré qui informe l’assureur de l’évolution du sinistre, sans formuler de
demande relative à ce dernier et à son indemnisation, n’interrompt pas la
prescription biennale
Cass. 2e civ., 14 avr. 2016,
n° 15-20.275, RGDA2016.300 M. Asselain:
“Attendu, selon l'arrêt
attaqué (Paris, 23 septembre 2014), qu'après avoir constaté en juillet 2001
l'apparition d'importantes fissures sur la façade principale et le vide
sanitaire du pavillon dont il est propriétaire, M. X... a effectué en août 2001
une déclaration de sinistre auprès de son assureur, la société Mutuelle
assurance des commerçants et industriels de France (l'assureur) ; que
contestant le refus de garantie opposé par ce dernier, il a saisi un juge des
référés d'une demande d'expertise ; qu'un expert judiciaire a été désigné par
une ordonnance du 5 juillet 2005 ; qu'après avoir, le 4 juillet 2006, adressé à
l'assureur une lettre recommandée avec demande d'avis de réception relative à
ce sinistre, M. X... l'a assigné en exécution du contrat d'assurance ;
[…]
Mais attendu qu'ayant
constaté que M. X... avait dans sa lettre du 4 juillet 2006 informé
l'assureur de l'évolution du sinistre déclaré en août 2001 sans formuler de
demande relative à ce dernier et à son indemnisation, c'est à bon droit que
la cour d'appel en a déduit que cette lettre n'avait pas concerné le
règlement, pour ce sinistre, de l'indemnité, au sens de l'article L. 114-2 du
code des assurances, et n'avait dès lors pu interrompre la prescription
biennale ».
Indépendamment de l’article
L. 114-2 du code des assurances, la suspension de la prescription de l’article
2239 du code civil est applicable aux actions dérivant d’un contrat
d’assurance.
Cass. 2e civ., 19 mai 2016,
n° 15-19.792,
RDI 2016, p. 418, D. Noguéro, Constr.-Urb. 2016, comm. 136, M.-L. Pagès-de
Varenne, RGDA2016.379, R. Schulz :
« Mais attendu qu'aux
termes de l'article 2239, alinéa 1, du code civil, la prescription est
suspendue lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d'instruction présentée
avant tout procès ; que, selon l'alinéa 2 de ce texte, le délai de prescription
recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à
compter du jour où la mesure a été exécutée ; que les articles L. 114-1, L.
114-2 et L. 114-3 du code des assurances ne font pas obstacle à l'application
de l'article 2239 du code civil ; qu'il s'ensuit que la suspension de la
prescription prévue par l'article 2239 du code civil est applicable aux actions
dérivant d'un contrat d'assurance ;
Que la cour d'appel ayant
constaté qu'une expertise judiciaire avait été ordonnée par une ordonnance
du juge des référés du 4 novembre 2009 et que la mesure d'instruction était
toujours en cours, en a déduit à bon droit que la mesure d'instruction ordonnée
avait suspendu la prescription de l'action, de sorte que l'exception de
prescription devait être rejetée ; »
Le jugement rendu à la
demande de l'assureur dommages-ouvrage à l'encontre de l'entreprise et de son
assureur (moins de deux ans après l’expertise ordonnée en référé) ayant ordonné une nouvelle expertise,
concernant les mêmes désordres et désignant les mêmes experts, a interrompu la
prescription biennale de l'article L. 114-1 du Code des assurances.
Cass. 3e civ., 10 mars 2016,
n° 14-29.397,
Constr.-Urb. 2016, comm. 78, M.-L. Pagès-de Varenne :
« Vu les articles L.
114-1 et L. 114-2 du code des assurances, ensemble l'article 2244 du code
civil, dans sa rédaction applicable à la cause ;
Attendu, selon l'arrêt
attaqué (Paris, 19 septembre 2014), que le syndicat d'agglomération nouvelle de
Marne-la-Vallée Val-Maubuée (le SAN), devenu la communauté d'agglomération de
Marne-la-Vallée Val-Maubée (la communauté d'agglomération) a fait procéder à la
construction d'une salle polyvalente à la réalisation de laquelle est
intervenue, en qualité de sous-traitante, la société Paul Mathis, assurée par
la CAMBTP ; qu'une police d'assurance dommages-ouvrage a été souscrite auprès
de la société Generali IARD (la société Generali) ; que la société Generali
ayant refusé sa garantie après une déclaration de sinistre, le SAN l'a assignée
en référé et a obtenu, le 18 octobre 2000, la désignation d'expert ; qu'une
ordonnance de référé du 21 mars 2001 a rejeté la demande de la société Generali
en extension des opérations d'expertise ; qu'un jugement du 23 mai 2002, rendu
au contradictoire de la société Paul Mathis et de son assureur, à la demande de
la société Generali, a ordonné une expertise ; que le SAN a assigné la société
Generali en paiement du coût des travaux de reprise des désordres ; que les
deux instances ont été jointes ;
Attendu que, pour déclarer
prescrite l'action de la communauté d'agglomération contre la société Generali,
l'arrêt retient que le jugement du 23 mai 2002, rendu après assignation
délivrée par la société Generali à la société Paul Mathis et son assureur,
ordonne une nouvelle expertise et que la mission confiée aux experts n'est pas
une extension ou une modification de la mission qui leur avait été donnée le 18
octobre 2000 ;
Qu'en statuant ainsi, alors
que le jugement du 23 mai 2002 vise l'expertise ordonnée en référé le 18
octobre 2000, concerne les mêmes désordres et désigne les mêmes experts, et que
dans les rapports entre l'assureur et son assuré, toute décision judiciaire
apportant une modification quelconque à une mission d'expertise ordonnée par
une précédente décision a un effet interruptif de prescription à l'égard de
toutes les parties, y compris à l'égard de celles appelées uniquement à la
procédure initiale et pour tous les chefs de préjudice procédant du sinistre en
litige, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Bibliographie :
E. Seifert, Mentions de la police sur la prescription
biennale : encore et toujours plus, Resp. et ass. 2016 form. 9
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