mercredi 14 février 2018

Prescription et droit transitoire

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 1 février 2018
N° de pourvoi: 16-24.732
Non publié au bulletin Cassation

Mme Flise (président), président
SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, se prévalant d'une décision irrévocable du 13 mars 2009, ayant condamné la Société financière Antilles Guyane (la société Sofiag) à lui payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts, la SCI Tristan a fait délivrer, le 24 mai 2013, un commandement de payer à la société Sofiag, qui l'a contesté devant un juge de l'exécution ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 110-4, I, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, ensemble les articles 15 et 26, II, de ladite loi ;

Attendu qu'en vertu du premier de ces textes, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par dix ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes ; qu'il résulte des seconds que la réduction à cinq ans de ce délai de prescription par la loi susvisée du 17 juin 2008 ne s'applique qu'à compter du jour de l'entrée en vigueur de cette dernière ;

Attendu que pour rejeter la contestation par la société Sofiag du commandement de payer du 24 mai 2013 et sa demande de compensation, l'arrêt retient que le fondement de la créance de cette société se trouve dans les prêts notariés des 9, 16 et 27 juin 1986 et qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier de la société Sofiag qu'entre décembre 2003 et décembre 2008, terme du délai quinquennal, elle ait exercé un quelconque acte de poursuite contre la débitrice principale ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'antérieurement à l'entrée en vigueur, le 19 juin 2008, de la loi susvisée, la prescription applicable au prêt consenti par un établissement bancaire était de dix ans, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Vu les articles 2244 du code civil, L. 321-1 et R. 321-1 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble les articles 2243 du code civil et R. 321-20 du code des procédures civiles d'exécution ;

Attendu qu'il résulte des trois premiers de ces textes que le délai de prescription est interrompu par la délivrance d'un commandement de payer valant saisie immobilière ;

Attendu que pour rejeter la contestation par la société Sofiag du commandement de payer du 24 mai 2013 et sa demande de compensation, l'arrêt retient encore qu'en admettant que l'effet interruptif dû aux saisies-attribution ait perduré jusqu'à l'arrêt de mainlevée du 13 mars 2009, le seul acte interruptif postérieur est un commandement aux fins de saisie immobilière délivré le 17 juin 2010, dont le juge de l'exécution a constaté la péremption et ordonné la radiation par jugement du 2 juin 2015, qui a par conséquent ôté au commandement son effet interruptif, par application de l'article 2243 du code civil ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'article 2243 du code civil ne concerne que l'effet interruptif de prescription attaché à la demande en justice et que la péremption du commandement valant saisie immobilière en application de l'article R. 321-20 susvisé n'a pas pour conséquence d'anéantir l'effet interruptif de prescription attaché à la délivrance de ce commandement, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le quatrième moyen :

Vu l'article 624 du code de procédure civile ;

Attendu que la cassation prononcée du chef du rejet de la contestation de la société Sofiag entraîne, par voie de dépendance nécessaire, la cassation de la disposition condamnant cette société à des dommages-intérêts pour résistance abusive ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 septembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre ;

Condamne la SCI Tristan aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; la condamne à payer à la société Sofiag la somme de 3 000 euros ;

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