Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 20-16.787
- ECLI:FR:CCASS:2022:C300210
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du mercredi 02 mars 2022
Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, du 12 décembre 2019Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 2 mars 2022
Cassation partielle
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 210 FS-B
Pourvoi n° K 20-16.787
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2022
La société Idéal International Design and Licensing, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° K 20-16.787 contre l'arrêt rendu le 12 décembre 2019 par la cour d'appel de Rennes (4e chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Banque populaire atlantique, devenue la société Banque populaire du Grand Ouest, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Maunand, conseiller doyen, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société Idéal International Design and Licensing, et l'avis de M. Burgaud, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 25 janvier 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Maunand, conseiller doyen rapporteur, M. Nivôse, Mmes Farrenq-Nési, Greff-Bohnert, MM. Bech, Boyer, Mmes Abgrall, Grandjean, conseillers, Mme Djikpa, conseiller référendaire, M. Burgaud, avocat général référendaire, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 12 décembre 2019), la société Sirius Vendôme, aux droits de laquelle vient la société International Design And Licensing (la société IDEAL), a, selon un marché du 16 juillet 2012, confié l'exécution des travaux d'aménagements de deux boutiques à la société Les ateliers du marais.
2. La société Banque populaire atlantique, devenue la société Banque populaire du Grand Ouest (la banque), a cautionné la société Les ateliers du marais au titre de la retenue de garantie applicable à ce marché.
3. La société Les ateliers du marais a été mise en liquidation judiciaire le 19 mars 2014.
4. La société Sirius Vendôme a assigné la banque en paiement des sommes dues par l'entrepreneur. La banque a soulevé l'irrecevabilité de cette demande, au motif qu'elle avait été formée plus d'un an après la réception de l'ouvrage.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche
5. La chambre commerciale de la Cour de cassation a délibéré sur ce grief, sur l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats à l'audience publique du 7 septembre 2021 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Barbot, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre.
Enoncé du moyen
6. La société IDEAL fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes formées contre la banque, alors « que les actes accomplis au mépris de la règle du dessaisissement qui frappe le débiteur dont la liquidation judiciaire a été prononcée ne sont pas nuls, mais inopposables à la procédure collective, et que l'inopposabilité qui sanctionne cette règle édictée dans l'intérêt des créanciers ne peut être invoquée que par le liquidateur ; qu'en retenant néanmoins que le procès-verbal de réception établi le 19 septembre 2014, le jour même du jugement prononçant la liquidation judiciaire de la société Ateliers du Marais, devait « être écarté », aux motifs que ce jugement avait « dessaisi la société Ateliers du Marais au profit du mandataire liquidateur » et que « son directeur général n'était plus habilité à signer quelque document que ce soit en son nom », quand le dessaisissement n'affectait pas la validité de la réception intervenue entre les parties le 19 septembre 2014 et que l'inopposabilité de cet acte ne pouvait être invoquée par la BPGO, la cour d'appel a violé l'article L. 641-9 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 641-9 du code de commerce :
7. La règle du dessaisissement étant édictée dans l'intérêt des créanciers, seul le liquidateur peut se prévaloir de l'inopposabilité d'un acte juridique accompli par le débiteur au mépris de cette règle, à condition que l'acte concerne les droits et actions inhérents à l'administration et à la disposition des biens dont le débiteur est dessaisi par l'effet du jugement de liquidation judiciaire, les actes conservatoires échappant à ce dessaisissement.
8. Pour écarter le procès-verbal de réception du 19 mars 2014 invoqué par la société IDEAL comme constituant la date de la réception des travaux déterminant le point de départ du délai d'un an stipulé dans le cautionnement, et déclarer, en conséquence, irrecevable sa demande formée contre la banque, l'arrêt retient que ce procès-verbal a été établi le jour même du jugement prononçant la liquidation judiciaire de la société Les ateliers du marais et que, ce jugement ayant dessaisi cette dernière au profit du liquidateur, son directeur général n'était plus habilité à signer quelque document que ce soit en son nom.
9. En statuant ainsi, alors que, le procès-verbal de réception de travaux ne constituant pas, en raison des conséquences qui s'y attachent, un simple acte conservatoire, seul le liquidateur de la société Les ateliers du marais était recevable à se prévaloir de l'inopposabilité du procès-verbal signé par cette société, dessaisie par l'effet de sa mise en liquidation judiciaire, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Portée et conséquence de la cassation
10. La cassation prononcée sur la deuxième branche du moyen dispense de statuer sur les quatre dernières branches, dès lors que, sauf s'il y a fraude de la part du maître de l'ouvrage, en présence d'une réception expresse, il ne peut être demandé au juge de rechercher l'existence d'une réception tacite antérieure.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes formées par la société International Design And Licensing (IDEAL) contre la société Banque populaire du Grand Ouest, l'arrêt rendu le 12 décembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes autrement composée ;
Condamne la société Banque populaire du Grand Ouest aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Banque populaire du Grand Ouest à payer à la société International Design And Licensing la somme de 3 000 euros ;
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 2 mars 2022
Cassation partielle
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 210 FS-B
Pourvoi n° K 20-16.787
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2022
La société Idéal International Design and Licensing, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° K 20-16.787 contre l'arrêt rendu le 12 décembre 2019 par la cour d'appel de Rennes (4e chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Banque populaire atlantique, devenue la société Banque populaire du Grand Ouest, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Maunand, conseiller doyen, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société Idéal International Design and Licensing, et l'avis de M. Burgaud, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 25 janvier 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Maunand, conseiller doyen rapporteur, M. Nivôse, Mmes Farrenq-Nési, Greff-Bohnert, MM. Bech, Boyer, Mmes Abgrall, Grandjean, conseillers, Mme Djikpa, conseiller référendaire, M. Burgaud, avocat général référendaire, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 12 décembre 2019), la société Sirius Vendôme, aux droits de laquelle vient la société International Design And Licensing (la société IDEAL), a, selon un marché du 16 juillet 2012, confié l'exécution des travaux d'aménagements de deux boutiques à la société Les ateliers du marais.
2. La société Banque populaire atlantique, devenue la société Banque populaire du Grand Ouest (la banque), a cautionné la société Les ateliers du marais au titre de la retenue de garantie applicable à ce marché.
3. La société Les ateliers du marais a été mise en liquidation judiciaire le 19 mars 2014.
4. La société Sirius Vendôme a assigné la banque en paiement des sommes dues par l'entrepreneur. La banque a soulevé l'irrecevabilité de cette demande, au motif qu'elle avait été formée plus d'un an après la réception de l'ouvrage.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche
5. La chambre commerciale de la Cour de cassation a délibéré sur ce grief, sur l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats à l'audience publique du 7 septembre 2021 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Barbot, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre.
Enoncé du moyen
6. La société IDEAL fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes formées contre la banque, alors « que les actes accomplis au mépris de la règle du dessaisissement qui frappe le débiteur dont la liquidation judiciaire a été prononcée ne sont pas nuls, mais inopposables à la procédure collective, et que l'inopposabilité qui sanctionne cette règle édictée dans l'intérêt des créanciers ne peut être invoquée que par le liquidateur ; qu'en retenant néanmoins que le procès-verbal de réception établi le 19 septembre 2014, le jour même du jugement prononçant la liquidation judiciaire de la société Ateliers du Marais, devait « être écarté », aux motifs que ce jugement avait « dessaisi la société Ateliers du Marais au profit du mandataire liquidateur » et que « son directeur général n'était plus habilité à signer quelque document que ce soit en son nom », quand le dessaisissement n'affectait pas la validité de la réception intervenue entre les parties le 19 septembre 2014 et que l'inopposabilité de cet acte ne pouvait être invoquée par la BPGO, la cour d'appel a violé l'article L. 641-9 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 641-9 du code de commerce :
7. La règle du dessaisissement étant édictée dans l'intérêt des créanciers, seul le liquidateur peut se prévaloir de l'inopposabilité d'un acte juridique accompli par le débiteur au mépris de cette règle, à condition que l'acte concerne les droits et actions inhérents à l'administration et à la disposition des biens dont le débiteur est dessaisi par l'effet du jugement de liquidation judiciaire, les actes conservatoires échappant à ce dessaisissement.
8. Pour écarter le procès-verbal de réception du 19 mars 2014 invoqué par la société IDEAL comme constituant la date de la réception des travaux déterminant le point de départ du délai d'un an stipulé dans le cautionnement, et déclarer, en conséquence, irrecevable sa demande formée contre la banque, l'arrêt retient que ce procès-verbal a été établi le jour même du jugement prononçant la liquidation judiciaire de la société Les ateliers du marais et que, ce jugement ayant dessaisi cette dernière au profit du liquidateur, son directeur général n'était plus habilité à signer quelque document que ce soit en son nom.
9. En statuant ainsi, alors que, le procès-verbal de réception de travaux ne constituant pas, en raison des conséquences qui s'y attachent, un simple acte conservatoire, seul le liquidateur de la société Les ateliers du marais était recevable à se prévaloir de l'inopposabilité du procès-verbal signé par cette société, dessaisie par l'effet de sa mise en liquidation judiciaire, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Portée et conséquence de la cassation
10. La cassation prononcée sur la deuxième branche du moyen dispense de statuer sur les quatre dernières branches, dès lors que, sauf s'il y a fraude de la part du maître de l'ouvrage, en présence d'une réception expresse, il ne peut être demandé au juge de rechercher l'existence d'une réception tacite antérieure.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes formées par la société International Design And Licensing (IDEAL) contre la société Banque populaire du Grand Ouest, l'arrêt rendu le 12 décembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes autrement composée ;
Condamne la société Banque populaire du Grand Ouest aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Banque populaire du Grand Ouest à payer à la société International Design And Licensing la somme de 3 000 euros ;
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