Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 12 novembre 2015
N° de pourvoi: 13-19.885
Non publié au bulletin Cassation partielle
M. Chauvin (président), président
Me Balat, SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat(s)
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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 22 avril 2013), que, suivant marchés du 14 décembre 1995 (chantier de Saint-Claude) et du 19 décembre 1996 (chantier de Spring Concordia à Saint-Martin), la société Semsamar (la Semsamar) a confié à la Société nouvelle de travaux (SNT), depuis lors en liquidation judiciaire, la construction de logements ; que le liquidateur de la SNT a, ès qualités, assigné la Semsamar en paiement de situations de travaux puis a sollicité l'indemnisation de préjudices ainsi que la mainlevée de cautions, saisies conservatoires et oppositions ; que la Semsamar a demandé le paiement de pénalités de retard, du coût des travaux de reprise de désordres et de dommages et intérêts ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :
Attendu, d'une part, qu'ayant souverainement retenu qu'une partie du retard du chantier de Saint-Claude était due aux modifications du projet initial, mal défini, et des plans de masse des plate-formes de certains bâtiments, ainsi qu'aux retards réitérés dans les paiements des situations par la Semsamar, et que celle-ci n'établissait pas la preuve d'un abandon du chantier, la cour d'appel a pu retenir, sans être tenue de s'expliquer sur chacune des pièces qu'elle décidait d'écarter ou de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que la résiliation unilatérale du marché, par la société Semsamar, était injustifiée ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que les travaux de reprise du chantier avaient été payés par la société Sagena, assureur dommages-ouvrage en exécution du jugement du tribunal de grande instance de Paris du 6 juillet 2004 et que le surplus de la somme réclamée par la Semsamar ne correspondait pas à un préjudice démontré, la cour d'appel qui a, sans dénaturation et procédant à la recherche prétendument omise, rejeté la demande d'indemnisation au titre des désordres, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur le second moyen du pourvoi principal, pris en ses première et deuxième branches, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant retenu, s'agissant du chantier de Spring Concordia, qu'aucun retard n'apparaissait imputable à la SNT, qu'il n'avait été répondu, ni par le maître d'ouvrage, ni par le maître d'oeuvre, aux demandes de délais présentées par la SNT en raison de la modification du projet et que l'expert indiquait que le maître de l'ouvrage, qui avait refusé sans réel motif l'agrément de certains sous-traitants, n'avait pas apporté son concours à l'entrepreneur général confronté à des difficultés avec l'un des sous-traitants substituant un sous-traitant non agréé, la cour d'appel, qui a pu, par ces seuls motifs, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, en déduire que la résiliation du marché par la Semsamar était injustifiée, a légalement justifié sa décision ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé que la grève était liée à des licenciements dans l'entreprise et souverainement retenu que la SNT ne produisait aucun élément de preuve permettant d'établir le refus d'intervention de la force publique à la suite de l'obtention d'une ordonnance portant expulsion des salariés, la cour d'appel, devant laquelle n'était pas produit l'arrêt du Conseil d'Etat du 18 juin 2008, en a exactement déduit que cette grève n'était pas constitutive d'un cas de force majeure ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi incident, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant retenu qu'aucune pièce relative aux cautions, saisies et oppositions, dont il était demandé mainlevée, n'était produite, la cour d'appel a pu rejeter ce chef de demande ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen du pourvoi principal, pris en sa troisième branche :
Vu les articles 1134 et 1147 du code civil ;
Attendu que, pour condamner la Semsamar au titre du manque à gagner de la société SNT relatif à la tranche conditionnelle, l'arrêt retient que la Sensamar en a confié la réalisation à une autre entreprise, sans qu'il soit soutenu que les travaux réalisés par celle-ci étaient différents de ceux prévus au marché de la SNT et que, même en l'absence de stipulation contractuelle prévoyant une indemnité de dédit, la Sensamar doit être condamnée à ce titre en raison de la violation de ses obligations contractuelles ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs qui ne suffisent pas à caractériser la faute de la Semsamar en lien avec la perte de bénéfices relatifs à la tranche conditionnelle du marché, et alors qu'elle avait relevé l'absence d'indemnité de dédit, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la Semsamar à payer à la Société nouvelle de travaux, représentée par son liquidateur amiable, la somme de 475 107,15 euros au titre de l'éviction fautive de la tranche conditionnelle du marché, l'arrêt rendu le 22 avril 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre, autrement composée ;
Condamne la Société nouvelle de travaux aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
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jeudi 19 novembre 2015
Résiliation injustifiée du marché - faute du maître de l'ouvrage - appréciation de la causalité du préjudice de l'entreprise
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