Cour de cassation - Chambre civile 1
- N° de pourvoi : 22-21.358
- ECLI:FR:CCASS:2023:C100572
- Publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du mercredi 18 octobre 2023
Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, du 11 juillet 2022Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 18 octobre 2023
Rejet
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 572 F-B
Pourvoi n° V 22-21.358
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 18 OCTOBRE 2023
M. [V] [K], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° V 22-21.358 contre l'arrêt rendu le 11 juillet 2022 par la cour d'appel de Pau (2e chambre, section 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [G] [N], domiciliée [Adresse 1],
2°/ à la société Vertego informatique, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 3],
défenderesses à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Kerner-Menay, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de M. [K], de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de Mme [N] et de la société Vertego informatique, et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 septembre 2023 où étaient présents Mme Champalaune, président, Mme Kerner-Menay, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 11 juillet 2022), le 27 septembre 2004, Mme [N] a constitué la société Vertego informatique dont elle est la gérante. La société a embauché M. [K], d'abord en qualité de conseiller pédagogique puis, le 1er septembre 2007, en qualité de responsable commercial.
2. Le 14 décembre 2017, la société a notifié à M. [K] son licenciement pour faute grave.
3. Le 21 décembre 2017, la société Vertego informatique et M. [K] ont conclu une transaction par laquelle les parties ont convenu de requalifier le licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de liquider diverses indemnités dues à M. [K] pour un montant total de 92 734,36 euros.
4. Le 6 décembre 2019, M. [K] a assigné la société Vertego informatique et Mme [N] en paiement de la somme de 1 500 000 euros correspondant, selon son estimation, à la moitié de la valeur nette de la société, au motif qu'il en serait associé de fait.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. M. [K] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses demandes, alors :
« 1° / que la transaction ne fait obstacle à l'introduction ou à la poursuite d'une action en justice ayant le même objet qu'entre les parties qui l'ont conclue ; qu'en retenant que M. [K] n'était pas recevable à demander le partage de l'actif net d'une société créée de fait avec Mme [N] en raison de la chose transigée le 27 (lire 21) décembre 2017, après avoir pourtant constaté que Mme [N] n'était pas partie à la transaction, peu important qu'elle ait prétendument été bénéficiaire d'une stipulation pour autrui, la cour d'appel a violé l'article 2052 du code civil ;
2°/ que, en tout état de cause, le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'aux termes de la clause de non-recours stipulée dans la transaction conclue le 21 décembre 2017 entre M. [K] et la société Vertego informatique : "M. [V] [K] renonce expressément, sans réserve et en toute connaissance de cause à l'intégralité des prétentions qu'elle qu'en soit la nature, ainsi qu'à toute instance ou action à l'encontre de la société Vertego et la gérante, devant le conseil de prud'hommes ainsi que devant toute autre instance judiciaire notamment civile, pénale ou administrative relative à l'exécution ou à la rupture du contrat de travail", de sorte que Mme [N] n'était pas visée personnellement, ou en sa qualité d'associée, par cette clause ; qu'en retenant, pour dire que M. [K] n'était pas recevable à demander le partage de l'actif net d'une société créée de fait avec Mme [N] en raison de la chose transigée le 27 (lire 21) décembre 2017, que la clause de non-recours renfermait une stipulation pour autrui qui avait pour effet d'étendre à Mme [N] le bénéfice de ladite clause, interdisant à M. [K] de contester l'existence de son contrat de travail tant à l'égard de la société Vertego informatique que de Mme [N], la cour d'appel a dénaturé cette clause claire et précise, en violation du principe susvisé ;
3°/ que la transaction ne fait obstacle qu'à l'introduction ou à la poursuite entre les parties d'une action en justice ayant le même objet ; qu'elle se renferme dans son objet de sorte que la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions ne s'entend que ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que la transaction conclue le 21 décembre 2017 entre M. [K] et la société Vertego informatique comportait un exposé liminaire relatant l'historique du contrat de travail et les positions respectives des parties sur le licenciement pour faute grave, que les parties y ont constaté leur désaccord "tant en ce qui concerne le bien-fondé, le contexte et la procédure de licenciement qu'en ce qui concerne les conséquences qui en découleraient", que M. [K] y a renoncé à l'intégralité des prétentions ainsi qu'à toute instance ou action "relative à l'exécution ou à la rupture de son contrat de travail" et y a reconnu être définitivement rempli de tous ses droits à l'égard de la société Vertego informatique ; qu'en retenant que l'action de M. [K] en partage de l'actif net d'une société créée de fait avec Mme [N] avait un objet identique à celui de cette transaction, pour en déduire qu'elle était irrecevable, cependant que cette action ne concernait pas le licenciement de M. [K], n'était pas relative à l'exécution ou à la rupture de son contrat de travail et ne portait pas sur les droits que détenait M. [K] à l'égard de la société Vertego informatique, et en particulier sur les droits découlant de l'exécution ou de la rupture de ce contrat de travail, la cour d'appel a violé les articles 2048 et 2052 du code civil. »
Réponse de la Cour
6. Si l'effet relatif des contrats interdit aux tiers de se prévaloir de l'autorité d'une transaction à laquelle ils ne sont pas intervenus, ces mêmes tiers peuvent néanmoins invoquer la renonciation à un droit que renferme cette transaction.
7. Après avoir relevé que les parties à la transaction avaient entendu régler définitivement l'ensemble des conséquences pécuniaires de la rupture du contrat de travail de M. [K], prenant notamment en compte les circonstances de son embauche, ses attributions et responsabilités au sein de la société Vertego informatique et son implication personnelle dans son développement, la cour d'appel a retenu que la clause de non-recours, qui interdit toute nouvelle prétention au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail, a pour effet d'interdire à M. [K] de remettre en cause la chose transigée, au titre de la même activité exercée au sein de la société Vertego informatique, en contestant désormais l'existence d'un contrat de travail requalifié en société créée de fait avec Mme [N], pour en déduire que M. [K] est définitivement réputé avoir exercé son activité au sein de la société Vertego informatique en qualité de salarié, laquelle est exclusive de celle d'associé de fait.
8. Il en résulte que, M. [K] ayant ainsi renoncé à son droit d'invoquer la qualité d'associé de fait, était irrecevable à agir contre la société Vertego informatique mais aussi contre Mme [N] qui était fondée à invoquer la transaction.
9. Par ce motif de pur droit, substitué d'office à ceux critiqués par le moyen, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1, et 1015 du code de procédure civile, la décision se trouve légalement justifiée.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [K] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [K] et le condamne à payer à Mme [N] et la société Vertego informatique la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille vingt-trois.ECLI:FR:CCASS:2023:C100572
CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 18 octobre 2023
Rejet
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 572 F-B
Pourvoi n° V 22-21.358
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 18 OCTOBRE 2023
M. [V] [K], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° V 22-21.358 contre l'arrêt rendu le 11 juillet 2022 par la cour d'appel de Pau (2e chambre, section 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [G] [N], domiciliée [Adresse 1],
2°/ à la société Vertego informatique, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 3],
défenderesses à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Kerner-Menay, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de M. [K], de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de Mme [N] et de la société Vertego informatique, et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 septembre 2023 où étaient présents Mme Champalaune, président, Mme Kerner-Menay, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 11 juillet 2022), le 27 septembre 2004, Mme [N] a constitué la société Vertego informatique dont elle est la gérante. La société a embauché M. [K], d'abord en qualité de conseiller pédagogique puis, le 1er septembre 2007, en qualité de responsable commercial.
2. Le 14 décembre 2017, la société a notifié à M. [K] son licenciement pour faute grave.
3. Le 21 décembre 2017, la société Vertego informatique et M. [K] ont conclu une transaction par laquelle les parties ont convenu de requalifier le licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de liquider diverses indemnités dues à M. [K] pour un montant total de 92 734,36 euros.
4. Le 6 décembre 2019, M. [K] a assigné la société Vertego informatique et Mme [N] en paiement de la somme de 1 500 000 euros correspondant, selon son estimation, à la moitié de la valeur nette de la société, au motif qu'il en serait associé de fait.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. M. [K] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses demandes, alors :
« 1° / que la transaction ne fait obstacle à l'introduction ou à la poursuite d'une action en justice ayant le même objet qu'entre les parties qui l'ont conclue ; qu'en retenant que M. [K] n'était pas recevable à demander le partage de l'actif net d'une société créée de fait avec Mme [N] en raison de la chose transigée le 27 (lire 21) décembre 2017, après avoir pourtant constaté que Mme [N] n'était pas partie à la transaction, peu important qu'elle ait prétendument été bénéficiaire d'une stipulation pour autrui, la cour d'appel a violé l'article 2052 du code civil ;
2°/ que, en tout état de cause, le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'aux termes de la clause de non-recours stipulée dans la transaction conclue le 21 décembre 2017 entre M. [K] et la société Vertego informatique : "M. [V] [K] renonce expressément, sans réserve et en toute connaissance de cause à l'intégralité des prétentions qu'elle qu'en soit la nature, ainsi qu'à toute instance ou action à l'encontre de la société Vertego et la gérante, devant le conseil de prud'hommes ainsi que devant toute autre instance judiciaire notamment civile, pénale ou administrative relative à l'exécution ou à la rupture du contrat de travail", de sorte que Mme [N] n'était pas visée personnellement, ou en sa qualité d'associée, par cette clause ; qu'en retenant, pour dire que M. [K] n'était pas recevable à demander le partage de l'actif net d'une société créée de fait avec Mme [N] en raison de la chose transigée le 27 (lire 21) décembre 2017, que la clause de non-recours renfermait une stipulation pour autrui qui avait pour effet d'étendre à Mme [N] le bénéfice de ladite clause, interdisant à M. [K] de contester l'existence de son contrat de travail tant à l'égard de la société Vertego informatique que de Mme [N], la cour d'appel a dénaturé cette clause claire et précise, en violation du principe susvisé ;
3°/ que la transaction ne fait obstacle qu'à l'introduction ou à la poursuite entre les parties d'une action en justice ayant le même objet ; qu'elle se renferme dans son objet de sorte que la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions ne s'entend que ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que la transaction conclue le 21 décembre 2017 entre M. [K] et la société Vertego informatique comportait un exposé liminaire relatant l'historique du contrat de travail et les positions respectives des parties sur le licenciement pour faute grave, que les parties y ont constaté leur désaccord "tant en ce qui concerne le bien-fondé, le contexte et la procédure de licenciement qu'en ce qui concerne les conséquences qui en découleraient", que M. [K] y a renoncé à l'intégralité des prétentions ainsi qu'à toute instance ou action "relative à l'exécution ou à la rupture de son contrat de travail" et y a reconnu être définitivement rempli de tous ses droits à l'égard de la société Vertego informatique ; qu'en retenant que l'action de M. [K] en partage de l'actif net d'une société créée de fait avec Mme [N] avait un objet identique à celui de cette transaction, pour en déduire qu'elle était irrecevable, cependant que cette action ne concernait pas le licenciement de M. [K], n'était pas relative à l'exécution ou à la rupture de son contrat de travail et ne portait pas sur les droits que détenait M. [K] à l'égard de la société Vertego informatique, et en particulier sur les droits découlant de l'exécution ou de la rupture de ce contrat de travail, la cour d'appel a violé les articles 2048 et 2052 du code civil. »
Réponse de la Cour
6. Si l'effet relatif des contrats interdit aux tiers de se prévaloir de l'autorité d'une transaction à laquelle ils ne sont pas intervenus, ces mêmes tiers peuvent néanmoins invoquer la renonciation à un droit que renferme cette transaction.
7. Après avoir relevé que les parties à la transaction avaient entendu régler définitivement l'ensemble des conséquences pécuniaires de la rupture du contrat de travail de M. [K], prenant notamment en compte les circonstances de son embauche, ses attributions et responsabilités au sein de la société Vertego informatique et son implication personnelle dans son développement, la cour d'appel a retenu que la clause de non-recours, qui interdit toute nouvelle prétention au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail, a pour effet d'interdire à M. [K] de remettre en cause la chose transigée, au titre de la même activité exercée au sein de la société Vertego informatique, en contestant désormais l'existence d'un contrat de travail requalifié en société créée de fait avec Mme [N], pour en déduire que M. [K] est définitivement réputé avoir exercé son activité au sein de la société Vertego informatique en qualité de salarié, laquelle est exclusive de celle d'associé de fait.
8. Il en résulte que, M. [K] ayant ainsi renoncé à son droit d'invoquer la qualité d'associé de fait, était irrecevable à agir contre la société Vertego informatique mais aussi contre Mme [N] qui était fondée à invoquer la transaction.
9. Par ce motif de pur droit, substitué d'office à ceux critiqués par le moyen, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1, et 1015 du code de procédure civile, la décision se trouve légalement justifiée.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [K] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [K] et le condamne à payer à Mme [N] et la société Vertego informatique la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille vingt-trois.
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