lundi 15 janvier 2024

Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer

 

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 15 novembre 2023




Rejet


Mme CHAMPALAUNE, président



Arrêt n° 608 F-B

Pourvoi n° U 22-23.266


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 15 NOVEMBRE 2023

M. [M] [P], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° U 22-23.266 contre l'arrêt rendu le 22 septembre 2022 par la cour d'appel de Douai (chambre 1, section 2), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Le Potager des princes, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],

2°/ à M. [L] [U], domicilié [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. [P], de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société Le Potager des princes, de M. [U], et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 26 septembre 2023 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 22 septembre 2022), en 1985, M. [P], artiste, sculpteur et peintre, spécialisé dans la représentation de chevaux, sollicité par M. [U], fondateur du musée [4] vivant aux grandes écuries de [Localité 3], a créé une oeuvre destinée au musée, intitulée « Fontaine aux chevaux » ou « la Prueva », consistant en une sculpture monumentale représentant trois chevaux dans une demi-vasque circulaire.

2. Plusieurs reproductions sans autorisation de cette oeuvre ou de partie de l'oeuvre ont été réalisées par [X] [K] dit [X] [G]. L'une de celles-ci, dont le caractère contrefaisant a été reconnu par arrêt irrévocable de la cour d'appel de Paris du 17 décembre 2008, a été exposée dans les jardins de la société Le Potager des princes ayant pour activité la gestion des jardins botaniques et parc animalier à [Localité 3], fondée par M. [U].

3. Par lettre du 5 mai 2020, M. [P] a contacté M. [U] en sa qualité de directeur du parc « Le Potager des princes », afin de convenir des moyens d'une réparation amiable au titre de la violation de ses droits de propriété intellectuelle.

4. Le 5 mars 2021, M. [P] a assigné en référé M. [U] et la société Le Potager des princes, en contrefaçon de droit d'auteur, afin de faire cesser le trouble manifestement illicite résultant de l'atteinte à ses droits de propriété intellectuelle et d'obtenir l'indemnisation provisionnelle de son préjudice. M. [U] et la société Le Potager des princes ont opposé une fin de non-recevoir tirée de la prescription.

Examen des moyens

Sur le second moyen

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. M. [P] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses demandes formées contre la société Le Potager des princes, alors « que si l'action en réparation des atteintes portées aux droits de l'auteur se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, l'action aux fins de faire cesser lesdites atteintes n'est soumise à aucun délai de prescription, la propriété ne s'éteignant pas par le non-usage ; qu'en retenant, pour déclarer irrecevable l'ensemble des demandes formées par M. [P] au titre de la contrefaçon de sa statue intitulée "Fontaine aux chevaux" ou "la Prueva", que la prescription des actions civiles en contrefaçon de droit d'auteur est soumise au délai quinquennal de l'article 2224 du code civil dont le point de départ est le jour où le titulaire a eu connaissance de la contrefaçon, même si celle-ci s'inscrit dans la durée, et que M. [P] a été informé de la présence de la statue litigieuse dans le jardin de la société Le Potager des princes dès le rapport d'expertise du 3 septembre 2004 dans le cadre de l'instruction pénale qui a abouti à l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 17 décembre 2008 reconnaissant son caractère contrefaisant, de sorte que le délai de prescription a expiré le 17 décembre 2013, cependant que n'étaient pas prescrites les demandes de M. [P] tendant à faire cesser les actes de contrefaçon par la remise entre ses mains de l'oeuvre contrefaisante aux fins de destruction, la cour d'appel a violé les articles 544, 2224 et 2227 du code civil. »

Réponse de la Cour

7. Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

8. C'est à bon droit que, après avoir énoncé que la prescription des actions civiles en contrefaçon de droit d'auteur est soumise à ces dispositions, la cour d'appel a retenu que, le délai de prescription ayant commencé à courir le 17 décembre 2008, date à laquelle avait été admis le caractère contrefaisant de l'oeuvre exposée, l'action intentée le 5 mars 2021 était prescrite, même si la contrefaçon s'inscrivait dans la durée.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [P] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [P] et le condamne à payer à la société le potager des Princes et M. [U] la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze novembre deux mille vingt-trois. ECLI:FR:CCASS:2023:C100608

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