N° 18MA00612
Inédit au recueil Lebon
6ème chambre - formation à 3
M. ZUPAN, président
M. Philippe GRIMAUD, rapporteur
M. THIELÉ, rapporteur public
ROUSSE ET ASSOCIES, avocat
lecture du lundi 20 mai 2019
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Texte intégral
Vu la procédure suivante :Procédure contentieuse antérieure :
La commune d'Abriès a demandé au tribunal administratif de Marseille, à titre principal, de condamner solidairement la société MG Concept Ingénierie et la société Bucci Frères et Fils à lui verser la somme de 27 789,20 euros toutes taxes comprises ou, à titre subsidiaire, de condamner la société MG Concept Ingénierie, seule, à lui verser la même somme en réparation des désordres affectant la conduite principale de son réseau d'assainissement.
Par un jugement n° 1509812 du 14 décembre 2017, le tribunal administratif de Marseille a condamné solidairement la société MG Concept Ingénierie et la société Bucci Frères et Fils à verser la somme de 5 035,20 euros toutes taxes comprises à la commune d'Abriès et a mis les frais et honoraires de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 10 543,80 euros toutes taxes comprises en ce qui concerne l'intervention de l'expert et à la somme de 5 382 euros toutes taxes comprises en ce qui concerne l'intervention du sapiteur, à la charge de la société MG Concept Ingénierie et de la société Bucci Frères et Fils à hauteur de 50 % pour chacune d'entre elles.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 14 février 2018, la société Bucci Frères et Fils, représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) à titre principal, de rejeter la demande présentée par la commune d'Abriès devant le tribunal administratif de Marseille ;
3°) de condamner la société MG Concept Ingénierie à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre ;
4°) de mettre les dépens à la charge de toute partie perdante ;
5°) de mettre à la charge de la commune d'Abriès la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la réception étant intervenue sans réserve, sa responsabilité contractuelle ne peut être engagée ;
- les défauts retenus par le Tribunal pour engager sa responsabilité décennale étaient apparents lors de la réception ;
- ces désordres ne remettent en cause ni la solidité de l'ouvrage ni son affectation à sa destination actuellement et ne sont susceptibles d'entraîner aucun désordre futur ;
- le maître de l'ouvrage, en tout état de cause, n'a pas invoqué la possibilité d'apparition d'un tel désordre devant le Tribunal ;
- la reprise de l'ouvrage n'est pas nécessaire et le Tribunal ne pouvait donc la condamner à verser la somme de 3 000 euros à la commune ;
- en application de l'article 9.1 du cahier des clauses administratives particulières, les frais de contrôle et d'inspection sont à la charge du maître de l'ouvrage et le Tribunal ne pouvait donc la condamner à verser la somme de 1 435,20 euros à la commune ;
- la commune ne justifie pas la réalité d'un trouble de jouissance ;
- ainsi que l'a jugé le Tribunal, la demande de la commune relative au reversement de la subvention doit être rejetée ;
- la société MG Concept Ingénierie devra la garantir de la condamnation prononcée à son encontre car elle a omis d'imposer, au sein du cahier des clauses techniques particulières, des exigences quant à la déformation des canalisations et n'a pas réservé les défauts à la réception.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juin 2018, la société MG Concept Ingénierie, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête de la société Bucci Frères et Fils ;
2°) à titre principal, et par la voie de l'appel provoqué, d'annuler le jugement attaqué et de rejeter la demande présentée par la commune devant le tribunal administratif de Marseille ;
3°) à titre subsidiaire et par la voie de l'appel incident, de confirmer le jugement en ce qu'il retient la responsabilité de la société Bucci Frères et Fils et de l'annuler en ce qu'il retient sa propre responsabilité ;
4°) de mettre les dépens à la charge de toute partie perdante ;
5°) de mettre à la charge de toute partie perdante la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'expert ne précisant pas quelle règle aurait été méconnue, il n'est pas possible de regarder l'ouvrage comme entaché de malfaçon ;
- l'ouvrage n'étant affecté d'aucun désordre, sa responsabilité ne peut être engagée ;
- l'absence de réalisation des contrôles n'entretient en tout état de cause aucun lien de causalité avec les malfaçons affectant l'ouvrage ;
- aucune solidarité ne peut être retenue entre elle et la société Bucci Frères et Fils ;
- la commune n'établit pas avoir reversé la subvention ;
- le remboursement de la subvention étant indu et n'entretenant aucun lien de causalité avec les travaux, les constructeurs ne peuvent être condamnés sur ce point ;
- la malfaçon étant imputable aux seuls travaux de la société Bucci Frères et Fils, celle-ci devra la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 janvier 2019, la commune d'Abriès, représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête de la société Bucci Frères et Fils ;
2°) à titre principal, et par les voies, respectivement, de l'appel incident contre la société Bucci Frères et Fils et de l'appel provoqué contre la société MG Concept Ingénierie, d'annuler le jugement attaqué en ce qu'il a rejeté sa demande indemnitaire relative à la restitution de subvention à l'agence de l'eau et au préjudice de jouissance et de condamner solidairement la société Bucci Frères et Fils et la société MG Concept Ingénierie à lui verser la somme de 27 789,20 euros toutes taxes comprises en réparation des préjudices qu'elle a subis ;
3°) de mettre à la charge de la société Bucci Frères et Fils et de la société MG Concept Ingénierie la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle est fondée à rechercher la responsabilité contractuelle de la société MG Concept Ingénierie en raison d'un défaut de conseil à la réception dès lors que cette société n'a pas procédé au contrôle des ouvrages avant la réception, qui était imposé par les stipulations des articles 9.1 et 9.2 du cahier des clauses administratives particulières et du cahier des clauses techniques particulières du marché de travaux ;
- l'ovalisation entre les regards n° 10 et 11 constitue un désordre de nature décennale dès lors qu'elle est de nature à porter atteinte à la solidité de l'ouvrage et constitue un désordre actuel susceptible de s'aggraver dans le futur ;
- les travaux de réparation doivent être mis à la charge des constructeurs ;
- le montant de la subvention reversée doit être mis à la charge des constructeurs dès lors que le reversement est obligatoire et constitue la conséquence des désordres.
Par ordonnance du 7 janvier 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 22 février 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. G... Grimaud, rapporteur,
- les conclusions de M. C... Thiele, rapporteur public,
- et les observations de Me F..., substituant Me D..., représentant la société Bucci Frères et Fils, de Me E..., représentant MG Concept Ingénierie et de Me H..., représentant la commune d'Abriès.
Considérant ce qui suit :
1. Par un marché en date du 18 septembre 2007, la commune d'Abriès a confié à la société MG Concept Ingénierie la maîtrise d'oeuvre des travaux de réfection des réseaux humides de la rue de l'Adroit. Par un marché de travaux du 3 mars 2008, la commune a confié à la société Bucci Frères et Fils le lot n° 1 de ce marché de travaux, portant sur les ouvrages d'assainissement et d'adduction d'eau. Ces ouvrages ont été réceptionnés sans réserve, le 7 juillet 2008 avec effet au 13 juin 2008. A la suite d'une demande en ce sens de l'agence de l'eau Rhône Méditerranée et Corse, qui avait subventionné les travaux à hauteur de 22 147 euros, la commune a fait procéder par la société Comes à l'inspection télévisée de la conduite principale du réseau, qui a révélé des malfaçons et des dépôts anormaux. L'agence de l'eau a, sur le fondement du rapport de la société Comes et d'un autre rapport d'analyse, établi par la société Socotec, demandé à la commune la réfection des parties d'ouvrages atteintes de malfaçons. En l'absence de réalisation de ces travaux, l'agence a, le 30 janvier 2013, décidé une réfaction de 4 429,40 euros sur la subvention accordée.
Sur l'appel principal :
En ce qui concerne la responsabilité décennale de la société Bucci Frères et Fils :
2. Il résulte des principes qui régissent la garantie décennale des constructeurs que des désordres apparus dans le délai d'épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent leur responsabilité, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans.
3. S'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le Tribunal, que la plupart des désordres et malfaçons constitués de dépôt adhérents, de poinçonnements et d'ovalisations ne rendent pas la canalisation impropre à sa destination et ne portent pas atteinte à sa solidité, l'expert indique que l'ovalisation d'une canalisation, qui ne doit pas excéder un taux de 5 % à court terme, n'est pas admissible au-delà d'un seuil de déformation de 10 % en raison des risques de rupture, d'infiltration, d'exfiltration et de perturbation des écoulements engendrés par cette déformation. A cet égard, et contrairement à ce qui est soutenu, la circonstance que l'expert, faute de réglementation spécifique ou de document technique unique opposable, invoque les règles de l'art et les tolérances généralement admises dans ce type de chantier, ne saurait priver ses conclusions de valeur dès lors qu'aucune des parties ne remet en cause le bien-fondé des seuils d'ovalisation ainsi retenus. Or, il résulte de l'instruction, et notamment des constatations et conclusions de l'expert, que la conduite présentait, lors de son inspection par le sapiteur, soit sept ans après son achèvement, un taux d'ovalisation de 14 % entre les regards nos 10 et 11. Cette ovalisation de la canalisation, qui n'a pu être constaté qu'à la suite d'une inspection télévisée menée après la réception, n'était par ailleurs pas apparente à la date où celle-ci est intervenue. Il en résulte que ce désordre, dont l'expert conclut qu'il doit être réparé, est de nature à porter nécessairement atteinte à la solidité de l'ouvrage dans un délai prévisible et est dès lors de nature à engager la responsabilité décennale de la société Bucci Frères et Fils. La circonstance que les autres parties du réseau ne soient pas affectées de défauts structurels majeurs et ne révèlent aucune difficulté de fonctionnement est, eu égard aux risques découlant du désordre constaté sur ce tronçon, sans incidence sur la responsabilité de la société Bucci Frères et Fils.
4. Il résulte de ce qui précède que la société Bucci Frères et Fils n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que ce désordre était de nature à engager sa responsabilité décennale dès lors que, saisis par la commune du moyen tiré de l'atteinte à la solidité de l'ouvrage, ils se devaient nécessairement de prendre en considération, quand bien même cette question n'était pas expressément débattue, les conséquences futures de la déformation de la canalisation en cause.
En ce qui concerne le préjudice :
5. En premier lieu, il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal que la reprise de la canalisation entre les regards nos 10 et 11 est nécessaire eu égard aux risques que sa déformation fait peser sur sa solidité. La somme de 3 600 euros toutes taxes comprises arrêtée sur ce point par les premiers juges ne faisant l'objet d'aucune contestation sérieuse, il y a lieu de confirmer le jugement attaqué sur ce point.
6. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que l'inspection télévisée réalisée par la société Comes au mois de juin 2009 a été réalisée à la demande de l'agence de l'eau afin de vérifier la bonne exécution des travaux. Elle ne peut dès lors être regardée comme présentant un lien de causalité avec le désordre ayant engagé la responsabilité décennale de la société Bucci Frères et Fils. Cette dernière est dès lors fondée à soutenir que les premiers juges ont à tort intégré le coût de cette inspection télévisée, soit 1 435,20 euros toutes taxes comprises, dans le préjudice indemnisable de la commune d'Abriès.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Bucci Frères et Fils est seulement fondée à demander que la condamnation prononcée à l'article 1er du jugement attaqué soit ramenée à la somme de 3 600 euros toutes taxes comprises.
Sur l'appel incident de la commune d'Abriès :
8. En premier lieu, si le directeur général de l'agence de l'eau Rhône Méditerranée et Corse a émis le 11 janvier 2013 un titre exécutoire d'un montant de 4 429,40 euros à l'encontre de la commune d'Abriès en vue de recouvrer une partie de la subvention initialement accordée pour la réalisation des travaux, il résulte de l'instruction, et notamment du courrier accompagnant ce titre exécutoire, que la restitution partielle ainsi imposée à la commune était justifiée par le retard de cette dernière à effectuer les travaux correctifs demandés par l'agence de l'eau en novembre 2011, qui n'avaient pas toujours pas été exécutés en janvier 2013. Si la commune avait alors argué de l'impossibilité de réaliser ces travaux en période hivernale, elle ne démontre pas avoir été empêchée de les faire exécuter avant l'hiver 2012-2013, de telle sorte que, la cause première de la réfaction appliquée étant ce retard, qui lui est imputable, le préjudice financier correspondant n'entretient pas de lien de causalité direct avec les responsabilités qu'engagent les constructeurs. La commune d'Abriès n'est dès lors pas fondée à soutenir, au soutien de son appel incident, que c'est à tort que les premiers juges ont écarté sur ce point ses prétentions.
9. En second lieu, la commune d'Abriès n'établit pas l'existence du trouble de jouissance qu'elle invoque à raison de l'encombrement de la voie publique pendant la période de réalisation des travaux correctifs. La demande de 3 000 euros qu'elle présentait sur ce point a donc été à bon droit rejetée par le Tribunal.
10. Il résulte de ce qui précède que les conclusions d'appel incident de la commune ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions d'appel provoqué de la société Bucci Frères et Fils contre la société MG Concept Ingénierie :
11. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus au point 3 que le désordre procède d'une méconnaissance des règles habituelles de tolérance en matière de déformation des canalisations, lesquelles sont réputées être connues des constructeurs. Dès lors, la société Bucci Frères et Fils n'est pas fondée à soutenir que la société MG Concept Ingénierie aurait commis une faute de conception en s'abstenant de reprendre ces règles de tolérance dans les documents du marché. Au surplus, et en tout état de cause, dès lors qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert, que le désordre découle non d'un défaut de conception mais de malfaçons matérielles en cours d'exécution, l'absence de stipulation contractuelle sur ce point, à la supposer fautive, n'entretiendrait pas de lien de causalité avec le désordre objet du litige.
12. En second lieu, l'engagement de la responsabilité d'un maître d'oeuvre à l'égard d'un constructeur intervenant dans le cadre d'un marché de travaux publics au titre de sa mission de surveillance de l'exécution du marché est subordonné à la seule existence d'un comportement du maître d'oeuvre présentant un caractère fautif, eu égard à la portée de son intervention et compte tenu des propres obligations des autres constructeurs.
13. Aux termes de l'article intitulé " essais et épreuves d'étanchéité " du chapitre " assainissement et eaux pluviales " du cahier des clauses techniques particulières : " Au fur et à mesure de la finition de chaque tronçon de réseau ou en fin de travaux, mais dans les cas avant remblaiement, il devra être procédé aux essais et épreuves d'étanchéité. / Ces essais et épreuves seront à réaliser par les soins de l'entrepreneur et sous sa responsabilité, et il aura à sa charge tous les frais de contrôle et d'essais (...). / Ces essais et épreuves seront les suivants, (...) / L'inspection du réseau sera réalisée par caméra par un organisme spécialisé. / L'entrepreneur sera tenu de remédier aux défectuosités constatées, le cas échéant. (...) ".
14. Il résulte en l'espèce de l'instruction, ainsi qu'il a été dit au point 3 ci-dessus, que le désordre affectant la canalisation n'était pas apparent lors de la réception, de sorte que la responsabilité de la société MG Concept Ingénierie ne saurait être engagée pour avoir omis, à ce moment, de le signaler, faute qui serait au surplus sans lien de causalité avec le préjudice dont se plaint la société Bucci Frères et Fils, laquelle aurait alors en tout état de cause été tenue d'en assurer la reprise à titre contractuel. Il n'est par ailleurs pas soutenu et il ne résulte pas davantage de l'instruction que ce désordre ou les malfaçons l'ayant causé se seraient manifestés au cours du chantier. Dès lors, la société Bucci Frères et Fils qui était en outre, en vertu des stipulations précitées, chargée de faire procéder à un contrôle télévisé des ouvrages, n'est pas fondée à soutenir que le maître d'oeuvre aurait, eu égard à la portée de son intervention et compte tenu des obligations respectives des constructeurs, commis une faute en s'abstenant d'émettre des réserves à la réception.
15. Il résulte de ce qui précède que la société Bucci Frères et Fils n'est pas fondée à demander à être garantie par la société MG Concept Ingénierie de la condamnation prononcée à son encontre.
Sur les conclusions d'appel provoqué de la commune d'Abriès contre la société MG Concept Ingénierie :
16. En premier lieu, la responsabilité des maîtres d'oeuvre pour manquement à leur devoir de conseil peut être engagée, dès lors qu'ils se sont abstenus d'appeler l'attention du maître d'ouvrage sur des désordres affectant l'ouvrage et dont ils pouvaient avoir connaissance, en sorte que la personne publique soit mise à même de ne pas réceptionner l'ouvrage ou d'assortir la réception de réserves. Il importe peu, à cet égard, que les vices en cause aient ou non présenté un caractère apparent lors de la réception des travaux, dès lors que le maître d'oeuvre en avait eu connaissance en cours de chantier.
17. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus aux points 3 et 13, il résulte de l'instruction que l'ovalisation affectant la canalisation, n'était ni apparente à la réception, ni connue du maître d'oeuvre au cours de l'exécution du chantier. La commune d'Abriès n'est dès lors pas fondée à rechercher la responsabilité contractuelle de la société MG Concept Ingénierie pour défaut de conseil à la réception.
18. En second lieu, si la société MG Concept Ingénierie n'a pas fait procéder, avant la réception, au contrôle des ouvrages qui était imposé par les stipulations des articles 9.1 et 9.2 du cahier des clauses administratives particulières et du cahier des clauses techniques particulières du marché de travaux, la faute éventuellement commise à ce titre n'avait trait qu'à son obligation de surveillance de l'exécution des travaux au cours du chantier et non à son obligation de conseil lors la réception et ne peut dès lors plus être invoquée par le maître de l'ouvrage dès lors que la réception des ouvrages est intervenue sans réserve.
19. Il résulte de ce qui précède que la commune d'Abriès n'est pas fondée à demander la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société MG Concept Ingénierie à réparer le désordre qu'elle a subi sur le fondement de la responsabilité contractuelle.
Sur les appels incident et provoqué de la société MGCI :
20. Il résulte de ce qui vient d'être dit aux points 15 à 18 que la société MG Concept Ingénierie n'a commis aucune faute contractuelle susceptible d'engager sa responsabilité à l'égard de la commune d'Abriès. Elle est dès lors fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges l'ont condamnée solidairement avec la société Bucci Frères et Fils à réparer le dommage subi par la commune.
21. La situation de la société MG Concept Ingénierie n'étant pas aggravée par le présent arrêt, ces conclusions d'appel provoqué doivent quant à elles être rejetées comme irrecevables.
Sur les frais d'expertise :
22. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre le montant des frais et honoraires de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 15 925,80 euros toutes taxes comprises par ordonnance du président du tribunal administratif de Marseille du 20 novembre 2015, à la charge exclusive de la société Bucci Frères et Fils.
23. Il résulte de tout ce qui précède que la société Bucci Frères et Fils et la société MG Concept Ingénierie sont fondées à demander la réformation du jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 novembre 2017 en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Sur les frais liés au litige :
24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que la somme réclamée par la commune d'Abriès sur leur fondement soit mise à la charge de la société Bucci Frères et Fils et de la société MG Concept Ingénierie, qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance. Il y a lieu, en revanche, de mettre une somme de 1 000 euros à la charge de la commune d'Abriès, à verser à la société Bucci Frères et Fils et à la société MG Concept Ingénierie sur le fondement de ces dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La condamnation prononcée par l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Marseille n° 1509812 du 21 novembre 2017 au bénéfice de la commune d'Abriès est ramenée de 5 035,20 à 3 600 euros toutes taxes comprises et mise à la charge de la seule société Bucci Frères et Fils.
Article 2 : Les frais et honoraires de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 10 543,80 euros toutes taxes comprises pour l'expert et de 5 382 euros toutes taxes comprises pour le sapiteur, sont mis à la charge de la seule société Bucci Frères et Fils.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille n° 1509812 du 21 novembre 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : La commune d'Abriès versera une somme de 1 000 euros à la société MG Concept Ingénierie et une somme de 1 000 euros à la société Bucci Frères et Fils en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Aucun commentaire :
Enregistrer un commentaire
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.