samedi 21 juin 2014

La prise de possession ne caractérise pas nécessairement l'intention de recevoir les travaux

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mardi 8 avril 2014
N° de pourvoi: 13-16.250
Non publié au bulletin Rejet

M. Terrier (président), président
Me Balat, Me Le Prado, avocat(s)


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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 20 juin 2012), que la société Big Brothers Company, assurée auprès de la société Crédit agricole Nord France aux droits de laquelle se trouve la société Pacifica, a fait réaliser des travaux d'électricité dans un immeuble commercial par la société Chris Elec, assurée auprès de la société MAAF assurances ; que l'exploitation d'un commerce de friterie a commencé au mois de juillet 2002 en l'absence de réception expresse de l'ouvrage ; que le 2 octobre 2002 un incendie s'est déclaré dans l'établissement et la société Pacifica, subrogée dans les droits de son assurée, a assigné la société MAAF assurances en indemnisation ;

Attendu que la société Pacifica fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes à l'encontre de la société MAAF assurances alors, selon le moyen :

1°/ que le maître de l'ouvrage peut accepter les travaux en l'état, nonobstant leur inachèvement ou l'existence de malfaçons, cette initiative produisant alors les effets d'une réception tacite pour autant que la décision ait été prise librement ; qu'en excluant l'existence d'une réception tacite de l'ouvrage dans lequel la société Chris Elec avait procédé à l'installation électrique litigieuse, au motif que la prise de possession des locaux par la société Big Brothers Company avait été dictée par des « impératifs financiers », sans être assorti du règlement du solde du prix, ce qui excluait l'existence d'une « volonté non équivoque du maître de l'ouvrage de recevoir les travaux réalisés par l'électricien », cependant que l'existence d'impératifs financiers n'est nullement incompatible avec une volonté du maître de l'ouvrage d'accepter les travaux en pleine connaissance de cause, de sorte qu'elle devait rechercher si la prise de possession des locaux ne résultait pas en l'espèce d'une décision de gestion de la société Big Brothers Company, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792-6 du code civil ;

2°/ qu'en excluant l'existence d'une réception tacite de l'ouvrage dans lequel la société Chris Elec avait procédé à l'installation électrique litigieuse, tout en constatant « qu'au jour de l'incendie, la livraison de l'installation électrique était effective depuis plusieurs mois puisque la société Big Brothers Company avait pris possession de l'immeuble et exploitait la friterie installée au rez-de-chaussée alimentée par l'installation électrique réalisée par la société Chris Elec à 90 % », ce dont il s'évinçait nécessairement que la réception tacite de l'ouvrage était intervenue, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1792-6 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que le maître d'ouvrage, sans avoir payé l'intégralité des travaux, avait décidé, pour des impératifs financiers, de démarrer son activité commerciale alors que restaient à effectuer des travaux de finition et le contrôle de l'installation prévu au contrat et retenu, par motifs adoptés, que la reprise de l'activité commerciale par la société Big Brothers Company manifestait davantage le souci du maître d'ouvrage d'éviter des pertes commerciales que son souhait d'accepter les travaux, la cour d'appel, procédant à la recherche prétendument omise, a pu en déduire que la prise de possession des locaux ne pouvait caractériser une volonté non équivoque de la société Big Brothers Company de recevoir les travaux ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Pacifica aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Pacifica à payer à la société MAAF assurances la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de la société Pacifica ;


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